Exclusif – Maître Aoudia : «Juger les frères Mohamed, c’est soutenir le GIA»

KA frères Mohamed
Maître Khadija Aoudia. D. R.

Algeriepatriotique : Vous venez de faire condamner l’Etat français dans l’affaire des frères Mohamed, deux patriotes algériens victimes d’une cabale échafaudée par le FIDH de Patrick Baudoin. Pouvez-vous nous donner plus de détails sur le verdict ?

Maître Khadija Aoudia : La France est signataire de la CEDH [Convention européenne des droits de l’Homme, ndlr], qui est une norme juridique hiérarchiquement supérieure au droit positif interne. L’article 6 de la CEDH, relatif au respect du procès équitable, n’a pas été respecté par les autorités judiciaires françaises en ce qu’il impose aux Etats contractants de juger dans un délai raisonnable toute personne accusée d’un crime.

J’ai donc assigné l’Etat français pour engager sa responsabilité civile en raison de la violation de l’article 6 de la CEDH. Le Tribunal judiciaire de Paris a fait droit à l’intégralité de mes demandes et a condamné l’Etat français à indemniser les plaignants, les frères Mohamed.

Comment avez-vous pris en charge le dossier après que trois avocats, Maîtres Cabanes, Lasber et Vergès, vous eurent précédée sans résultat ?

C’est M. Abdallah Zekri qui a œuvré sans relâche pour que l’affaire me fût confiée. Maître Jacques Vergès venait de décéder et, en ce qui me concerne, je commençais à avoir une petite notoriété en tant qu’avocate pénaliste. Forcément, deux Algériens dans une même ville ne pouvaient que se rencontrer. M. Zekri m’avait sollicitée, d’abord, au nom du Conseil français du culte musulman (CFCM) dont il est le délégué général, pour mener des actions pénales contre des personnalités politiques qui n’avaient de cesse, durant les périodes électorales, de diaboliser l’Arabe ou le musulman. De là est née une complicité intellectuelle et une véritable amitié.

Lors du non-lieu prononcé en 2016 – confirmé en mars 2017 –, vous aviez déploré une instrumentalisation politique de la justice à l’époque. De quelle manière cette affaire avait-elle été instrumentalisée et par qui ?

Effectivement, le procès des frères Mohamed est un procès politique inavoué, instrumentalisé par ceux qui avaient intérêt à jeter l’opprobre à l’endroit des patriotes, des membres du GLD et de l’armée algérienne. J’ignore qui était le ou les chefs d’orchestre. La question demeure : à qui aurait profité la condamnation des frères Mohamed ?

Que s’est-il passé depuis ?

Dans l’ombre, j’ai mené un combat judiciaire pour faire condamner l’Etat français. Je déplore le fait qu’en 2004 la presse nationale française, qui avait lynché les frères Mohamed, qui avait dénoncé la politique du «qui tue qui», qui titrait leurs articles «La guerre sale», faisant référence à la décennie sanguinaire, n’avait pas jugé utile d’informer les Français du non-lieu dont avait bénéficié les frères Mohamed. Pire, il sera passé sous silence le fait que les plaignants étaient des anciens membres ou partisans du GIA.

Difficile d’admettre qu’en poursuivant juridiquement les frères Mohamed, c’est un soutien tacite à d’anciens membres du GIA qui était apporté, alors que l’Etat français découvrait depuis 2015 l’horreur du terrorisme islamiste sur son territoire.

«Ce procès aurait pu être le premier d’une série», aviez-vous affirmé, au moment du verdict. Que vouliez-vous dire par-là ?

Effectivement, l’Etat français avait fait valoir sa compétence universelle pour poursuivre les frères Mohamed. Fort heureusement, la procédure a abouti à un non-lieu. Si une condamnation avait été prononcée, alors, cette affaire aurait fait jurisprudence. Ainsi, toutes les personnes anciennement militaires ou membres du GLD au moment de la décennie sanguinaire qui séjourneraient ou résideraient en France ou tout autre Etat signataire de la Convention de New York auraient pu, suivant les mêmes fondements, subir des poursuites judiciaires et être condamnées.

Peut-on dire que la page de la cabale dont les frères Mohamed est définitivement tournée ?

Oui, définitivement, les frères Mohamed, par cette dernière décision, ont retrouvé la dignité qui leur avait été ôtée.

Quelle leçon la justice française doit-elle tirer de cette affaire ?

Une leçon d’humilité.

Peut-on parler d’un cas de jurisprudence en ce qui concerne la décennie noire en Algérie et les procès intentés en France contre ceux qui ont lutté contre les terroristes islamistes dans les années 1990 ?

Une jurisprudence en faveur de tous ceux qui ont lutté contre le terrorisme en Algérie.

Propos recueillis par Karim B.

Comment (7)

    Biskra
    18 juin 2021 - 16 h 09 min

    BEAUTÉ, INTELLIGENCE et COMPÉTENCE qualités très rares, réunies et reconnues à votre sublime personne. Bravo, Madame ! Très fier de vous.

    La France républicaine ....
    18 juin 2021 - 13 h 38 min

    La France républicaine, socialiste (à l’époque) et maintenant sous la droite, a toujours soutenu les islamistes sous couvert des droits de l’homme. Est-ce vraiment là la seule et unique raison pour les protéger ? Je ne le pense pas. Car, pour avoir eu l’occasion de connaitre certains éléments qui demandaient de l’aide au niveau de l’administration et qui semblaient défendus par les socialistes on a reconnu et dénoncé des sympathisants du FIS, capables, selon nous, de se retourner contre la France qui leur a ouvert les portes de l’exil et leur a octroyé des droits dont ils ne rêvaient même pas. La suite (attentats à répétition) tous le monde en garde un bien triste souvenir. Nous avions alors compris que le pouvoir de l’époque (et même ceux qui ont suivi) aidait ceux qui les arrangeaient dans le seul but de stigmatiser l’armée algérienne en l’accusant de tous les maux jusqu’à même se poser la question du , semant ainsi le trouble dans le subconscient collectif des algériens qui n’aspiraient pourtant qu’à vivre en paix.
    Si la France se trouve actuellement dans cet état d’insécurité c’est de la faute des gouvernants des années 90 qui ont permis à tous les extrémistes d’outre méditerranée de s’installer confortablement en France pour pouvoir continuer à organiser leurs assassinats à distance, éliminant les meilleurs intellectuels algériens.
    Je suis certain que les magouilles socialistes d’antan n’ont pas livré tous leurs secrets.
    La France doit absolument revoir sa stratégie vis-à-vis des islamistes (et non des musulmans) afin qu’on puisse lui faire confiance à l’avenir. A bon entendeur SALUT.

      Anonyme
      18 juin 2021 - 14 h 03 min

      La droite n’est pas au pouvoir en France

    Anonyme
    17 juin 2021 - 23 h 14 min

    Une loi d’amnistie générale avait été adoptée en Algérie. Je ne vois pas comment une personne puvait être poursuivi à l’etranger. Ce n’est pas logique. Il ne reste u’une seule place ou la justice se fera sans distinction de classe d’argent ou de copinage et ca personne n’y echappera.

      Ayweel
      18 juin 2021 - 14 h 44 min

      Loi d’amnistie !!! Votée et validée par qui??? Par ceux  qui sont, soit en  prison soit sur la voix d’être criminalises par l’histoire .  Nul ne peut pardonner aux ceux qui, soit par conviction idéologique ou en tant que mercenaire au service des étrangers, ont égorgé des simples militaires appelés, des policiers, gendarmes , médecins, enseignants (tes), chauffeurs, payasans, bergers….et mon défunt frère faisait partie de cette  vague de  milliers de citoyens algériens assassinés physiquement, moralement ou mantalement par ces criminels qui n’ont rien de fou , mais parfaitement conscient, et d’ailleurs un fou s’en fou de l’argent, par contre eux dans leur majorité sont devenus milliardaires.

    Anonyme
    17 juin 2021 - 22 h 03 min

    La France républicaine, socialiste (à l’époque) et maintenant sous la droite, a toujours soutenu les islamistes sous couvert des droits de l’homme. Est-ce vraiment là la seule et unique raison pour les protéger ? Je ne le pense pas. Car, pour avoir eu l’occasion de connaitre certains éléments qui demandaient de l’aide au niveau de l’administration et qui semblaient défendus par les socialistes on a reconnu et dénoncé des sympathisants du FIS, capables, selon nous, de se retourner contre la France qui leur a ouvert les portes de l’exil et leur a octroyé des droits dont ils ne rêvaient même pas. La suite (attentats à répétition) tous le monde en garde un bien triste souvenir. Nous avions alors compris que le pouvoir de l’époque (et même ceux qui ont suivi) aidait ceux qui les arrangeaient dans le seul but de stigmatiser l’armée algérienne en l’accusant de tous les maux jusqu’à même se poser la question du , semant ainsi le trouble dans le subconscient collectif des algériens qui n’aspiraient pourtant qu’à vivre en paix.
    Si la France se trouve actuellement dans cet état d’insécurité c’est de la faute des gouvernants des années 90 qui ont permis à tous les extrémistes d’outre méditerranée de s’installer confortablement en France pour pouvoir continuer à organiser leurs assassinats à distance, éliminant les meilleurs intellectuels algériens.
    Je suis certain que les magouilles socialistes d’antan n’ont pas livré tous leurs secrets.
    La France doit absolument revoir sa stratégie vis-à-vis des islamistes (et non des musulmans) afin qu’on puisse lui faire confiance à l’avenir. A bon entendeur SALUT.

    -DZ
    17 juin 2021 - 19 h 31 min

    La France et le marrouk ont toujours soutenu les terroristes en Algérie.
    Rien à cacher.

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