Le budget 2023 en Algérie : comment réduire l’impact de l’économie informelle

crédit hallal
Le Wall Street algérien se trouve au square Port-Saïd. New Press

Une contribution de Ben Youcef Bedouani – «L’économie informelle est un symptôme de l’échec des politiques publiques à répondre aux besoins des populations les plus vulnérables.» (Esther Duflo, prix Nobel d’économie) – Le budget du gouvernement algérien pour 2023, signé par le président Abdelmadjid Tebboune, comprend des dépenses gouvernementales sans précédent de 98 milliards de dollars, une augmentation de 25% par rapport aux niveaux de 2022 (1, 2). Le budget vise à s’attaquer aux secteurs anachroniques tels que l’éducation, les soins de santé et l’agriculture, ainsi qu’à augmenter les salaires et à maintenir des politiques populaires de protection sociale, pour un coût total d’environ 43 milliards de dollars (3). Cependant, le déficit budgétaire de 2023 est estimé à 30 milliards de dollars (4, 5), et les griefs socio-économiques restent une préoccupation majeure pour l’administration Tebboune. Dans cette analyse, nous examinerons les défis et les opportunités présentés par le budget algérien 2023 et discuterons des projections pour l’avenir en cas d’améliorations.

Le budget 2023 annonce un déficit budgétaire estimé à 30 milliards de dollars et le cadre de gouvernance des autorités algériennes n’a pas encore optimiser sa vision à long terme pour créer une valeur ajoutée, faciliter la croissance ou faire évoluer l’économie vers un niveau plus dynamique. Les problèmes socio-économiques constituent une préoccupation majeure pour l’administration Tebboune, avec une inflation culminant à un niveau préoccupant de 9% au cours des cinq dernières années (6). Pendant ce temps, les efforts de l’administration pour augmenter les salaires tout au long de 2022-24 de 47% (7) pourraient ne pas être suffisants pour protéger le pouvoir d’achat des citoyens qui ont du mal à joindre les deux bouts alors que la situation économique, proprement parlant, ne s’améliore pas vraiment par rapport à il y a quelques années.

Par pur pragmatisme économique, pour accomplir ce budget, le succès de l’entreprise de l’administration Tebboune dépendra largement de sa capacité à faire des choix difficiles qui sortent du cadre habituel de la mentalité rentière de l’Etat et des habitudes coûteuses de l’Etat providence. Tant que les revenus énergétiques de l’Algérie seront dépensés de manière ad hoc et à court terme pour maintenir le statu quo, le cercle vicieux des déficits et du clientélisme semble destiné à continuer. Pour réaliser une croissance économique durable, l’Algérie doit adopter une approche financière plus pragmatique et donner la priorité aux besoins des jeunes Algériens, plutôt que de simplement ressortir des pratiques bien connues visant à gagner du temps et à assurer la paix sociale.

Opportunités

Malgré les défis, l’Algérie a un potentiel significatif pour l’amélioration économique si les défis structurels sont résolus et que l’environnement des affaires est amélioré pour attirer davantage d’investissements étrangers. Le marché informel, estimé à environ 30% du PIB (8), soit presque 45 milliards de dollars, présente des opportunités de génération de revenus s’il est géré efficacement. Une façon de le faire est d’encourager les entreprises informelles à s’enregistrer et à rejoindre l’économie formelle, ce qui augmenterait les recettes fiscales et développerait l’économie formelle. Pour diversifier l’économie au-delà des hydrocarbures, le gouvernement devrait investir davantage dans des sources d’énergie renouvelable (9) telles que l’énergie solaire et éolienne, en plus de l’hydrogène, qui réduiraient la dépendance du pays aux hydrocarbures et favoriseraient la croissance économique. Le pays devrait également mettre en œuvre des réformes structurelles pour améliorer la compétitivité des entreprises publiques (EP), qui représentent plus de la moitié de l’économie algérienne formelle. La privatisation de certaines EP – avec diligence et vision sociale – et la promotion d’une conduite responsable des entreprises nationales pourraient également améliorer le climat des investissements et attirer davantage d’investissements étrangers.

L’incitation des entreprises informelles à rejoindre l’économie formelle peut être réalisée en introduisant des politiques qui rendent plus attrayant de fonctionner dans le cadre légal. Cela peut inclure la simplification du processus d’enregistrement, la réduction des impôts et la fourniture d’un accès au crédit et à d’autres services de soutien. – «L’économie informelle est une source de créativité et d’innovation. Elle peut être un moteur de développement économique si elle est intégrée dans l’économie formelle.»- Kofi Annan, ancien secrétaire général des Nations unies.

Le changement des billets de banque, déjà opéré dans certains pays comme la Turquie, peut ne pas être une solution efficace, en l’état actuel de l’économie algérienne, pour forcer les entreprises informelles à rejoindre l’économie formelle. Cela pourrait créer plus de problèmes qu’elle n’en résout, tels que la perturbation du système financier et l’augmentation des pressions inflationnistes. Au lieu de cela, le gouvernement devrait travailler avec les entreprises informelles pour comprendre pourquoi elles hésitent à se formaliser et traiter leurs préoccupations. De plus, le gouvernement pourrait mettre en place des mesures pour décourager les activités informelles, telles qu’une application plus stricte des réglementations et une augmentation des sanctions pour non-conformité.

Projections

En abordant les défis et en saisissant les opportunités présentées par le budget algérien 2023, il pourrait y avoir une amélioration économique significative. Le système de subventions ciblées pourrait aider à améliorer l’efficacité des politiques de protection sociale, à réduire les dépenses publiques et à garantir que les secteurs les plus vulnérables de la société reçoivent un soutien. La rationalisation des procédures bureaucratiques et la protection des droits de propriété pourraient également rendre l’Algérie plus attractive pour les investissements étrangers, selon une analyse du département d’Etat américain «Déclarations sur le climat d’investissement 2022» (10). L’augmentation des investissements dans les sources d’énergie renouvelable comme le solaire et l’éolien pourrait créer de nouvelles opportunités d’emploi et réduire la dépendance du pays aux hydrocarbures, ce qui aiderait à atténuer les effets négatifs des fluctuations des prix mondiaux sur l’économie. La promotion d’un comportement commercial responsable parmi les entreprises nationales pourrait contribuer à instaurer la confiance chez les investisseurs étrangers.

Conclusion

Le budget algérien 2023 présente à la fois des défis et des opportunités pour améliorer l’économie. Bien que le déficit budgétaire et les griefs socio-économiques soient des préoccupations majeures, en abordant les défis structurels et en améliorant le climat des investissements, cela pourrait aider à attirer davantage d’investissements étrangers et à diversifier l’économie au-delà des hydrocarbures. L’incitation des entreprises informelles à rejoindre l’économie formelle, l’investissement dans les énergies renouvelables et l’amélioration de la compétitivité des entreprises publiques pourraient contribuer à promouvoir la croissance économique et la création d’emplois. En poursuivant ces stratégies, l’Algérie pourrait construire une économie plus durable et prospère.

B.-Y. B.

1-https://www.reuters.com/world/africa/algeria-approves-25-spending-rise-2023-budget-2022-12-26/

2-https://www.ft.com/content/98ad4b4d-b4d4-4c2d-bac9-fcbab7f17e22

3-https://www.mf.gov.dz

4-https://www.imf.org/en/Countries/DZA

5-https://www.aps.dz/ar/economie/135831-2023

6- https://data.worldbank.org/indicator/FP.CPI.TOTL.ZG

7-https://www.aps.dz/societe/143371-le-president-tebboune-reitere-son-engagement-d-augmenter-les-salaires-et-l-allocation-chomage

8-https://www.worldbank.org/en/research/brief/informal-economy-database

9-https://www.irena.org/-/media/Files/IRENA/Agency/Publication/2019/Oct/IRENA_Renewable_energy_market_analysis_Algeria_2019.pdf

10-https://www.state.gov/reports/2022-investment-climate-statements/algeria/

Comment (13)

    Anti N.O.M
    14 avril 2023 - 19 h 12 min

    J’ai l’impression que l’on nous dirrige vers le paiement numérique ou ont contrôlera sans cesse le peuple en fesant le lit du Nouvel ordre mondial !

    Brahms
    13 avril 2023 - 8 h 00 min

    L’ancien Ambassadeur de France Driencourt dans une interview s’est moqué des algériens en affirmant qu’on faisait le change dans des bistrots Kabyles à Marseille, Paris et Lyon.

    Je vous le dis, on n’a plus aucune crédibilité internationale alors que c’est pourtant pas difficile d’orienter les gens vers les établissements bancaires pour faire leurs transactions financières.

    Donc, comment voulez vous attirer des investisseurs étrangers qui viennent avec des euros et ensuite ne peuvent plus changer leurs dinars en euros. Tout est à revoir.

    Prenez le Maroc comme exemple qui a signé un partenariat avec la Banque Postale française. Un marocain qui fait un virement le lundi depuis la France, l’argent se trouve au Maroc le mercredi soit en
    48 heures chrono (virement instantané) à un coût très bas 2 à 4 euros le virement.

    Par contre, l’algérien devra prendre l’avion, le bateau ou encore faire le change au téléphone via une connaissance pour faire sa transaction financière générant plus de frais financiers que d’avantages.

    Si je prends l’avion, je vais donc payer 500 € de frais + le train + le taxi + la perte de temps pour rapporter mes devises au pays. Il y a donc trop de contraintes d’où très peu d’argent arrive en Algérie alors que les marocains tournent à 10 milliards d’euros par an.

    Brahms
    10 avril 2023 - 13 h 55 min

    On a juste l’indépendance administrative acquise en 1962,

    En effet, on a toujours pas acquis notre indépendance économique et financière d’où ce système de l’informel qui consiste à enrichir la France et d’autres pays via l’évasion fiscale et financière.

    Qui peut stopper ce système ?

    Il faut que le peuple manifeste et signe la fin de la récréation, il faut que l’Algérie qui souhaite adhérer aux BRICS se débarrasse définitivement de ce système de l’informel qui vide le pays de ses devises et enrichit l’étranger via des produits importés faisant en plus de la concurrence déloyale aux produits algériens.

    Il faut enfin réclamer notre indépendance financière et économique, la France nous faisant les poches, on le sait, via notre pétrole de Hassi Messaoud où elle pique gratuitement 500 000 barils par jour à 90 dollars de 2018 à 2043 soit pendant 25 ans.

    Il y en a marre de tout ça.

      dz
      11 avril 2023 - 19 h 32 min

      brahms votre analyse est veridique mais que fait l etat pour regler ce probleme ? la fuite des devises est enorme ont a l impression d un laxisme tolere comment installer un etat de droit et respect de la loi il faut lutter contre le marche informel

      dzcca
      11 avril 2023 - 19 h 37 min

      la faute a qui ?

    Sprinkler
    10 avril 2023 - 13 h 11 min

    Ces bureaux de change clandestins qui ont  » pognon sur souk » (ou pignon sur rue…) obéissent à une seule règle, celle de l’offre et de la demande…Le Trésor et l’économie algériens y perdent sévèrement au…change. Le premier ne voit pas la couleur des billets, la seconde n’y gagne pas un dinar…Au bénéfice exclusif des barons de cette économie sous-terraine qui draine des milliards de dollars par an à la barbe de l’État…

      dz
      11 avril 2023 - 19 h 47 min

      mais de quoi a peur ce pouvoir pour reagir contre ces gens qui se moquent de l etat du change en plein square a la vue des forces de l ordre c est quoi ce pays ? les chouadas doivent se retourner dans leur tombes !

    Amin99
    10 avril 2023 - 13 h 10 min

    En Algérie, trop d’agent dort dans des coffres et sous les matelas.

    Notre système financier doit être complètement repensé, d’où l’intérêt d’une réforme financière en profondeur qui fait actuellement l’objet d’un projet de loi.

    L’incitation au dépôt d’argent de l’informel dans les banques va incontestablement rejoindre l’économie formelle et contribuer à la dynamique économique du pays. Ceci se traduit par l’augmentation de la liquidité dans les banques, la multiplication des prêts accordés aux entrepreneurs et un meilleur suivi de l’investissement productif.

    Les secteurs clés sont maintenant connus de tous, agriculture, industrie, énergie et mines, et les services.

    En parallèle, le gouvernement, avec l’augmentation de la richesse du pays, doit s’attaquer aux problèmes structurels et conjoncturels (salaire, santé, éducation, administration, inflation, habitat, autres) pour repondre aux besoins de la population.

    Enfin, l’Algérie candidate aux BRICS doit rentrer dans le rang des pays émergents et commencer à préparer la convertibilité de sa monnaie.
    A bon entendeur

    Anonyme
    10 avril 2023 - 11 h 23 min

    Je n´arrive pas à comprendre, pourquoi l´état algérien ne commence pas par changer les billets de banque du pays.

    D´un, les riches (dans l informel) Algériens seront obligés de déposer leur argent dans les banques.

    De deux, on se débarrassera de ces billets qui donnent une mauvaise image de l´Algérie pour d´autres pays dont le design exprime les nouvelles ambitions de l Algérie.

    On pourrait par là meme diviser par 10 ou meme100 la valeur nominale des billets, ce qui donnera une meilleure appréciation des valeurs des biens.

    Brahms
    10 avril 2023 - 0 h 55 min

    Exercice illégal de la profession de banquier ?

    Les banques algériennes perdent énormément de commissions sur les transactions financières où n’importe qui, fait des transactions comme bon lui semble sans prouver l’origine de ces fonds.

    Imaginons qu’une personne vend de la contrefaçon ou de la drogue puis vient convertir ses dinars en Euros où sont les bénéfices pour l’économie nationale ? Rien, zéro pointé.

    Si X personnes font ça, multipliez par X personnes sur tout le territoire national, on voit vite que la musette est trouée permettant à de nombreux délinquants financiers de continuer dans cette voie.

    Très souvent ce sont des barons de l’import / export qui se cachent derrière le marché parallèle de l’informel où ils importent de la camelote de Turquie ou de Chine pour ensuite siphonner les devises du pays en échange de dinars algériens ce qui fait que l’économie nationale ne profite pas des devises.

    Il n’ y a donc aucune rentabilité pour les banques algériennes. Le citoyen algérien est donc à l’origine de son propre malheur car il ne veut pas respecter la légalité sur les transactions financières.

    ALLAH Y STOR NÔTRE PRÉSIDENT TEBBOUNE
    10 avril 2023 - 0 h 41 min

    Monsieur le président ABDELMADJID TEBBOUNE.
    Vous avez repris les commandes d’une Algérie qui à été saigné à blanc par les 20 ans de gouvernance de la bande de Oujda.
    Ils ont pillés le trésor public, destructurée le pays en renvoyant son urbanisme à l’âge de pierre.
    Ils ont fermé les dernières entreprises d’état en les vendant aux privés qui ne sont que les copains….
    Ils ont laissé mourir les algériens en les abandonnant aux plus grands dénuement, et une précarité aiguës, l’impossibilité de soignées par des soins appropriées à leurs pathologies.
    L’importation était la seul vision de ces charognards, ministres, maires, préfets, directeurs d’entreprises et d’administrations étatiques, et la liste est longue.
    Vous avez énormément de mérite de prendre le taureau par les cornes et relever le pays de la manière dont le valeureux patriote HOUARI BOUMÉDIENNE ALLAH yarhamou était en train de le faire, jusqu’au moment de son assassinat par les HARKIS qui gravitait autour de lui.
    Le peuple est parfaitement conscient que la tâche n’est pas facile et qu’il faut encore patienter un peu pour voir davantage les changements qui s’opèrent depuis vôtre arrivée aux commandes de l’Algérie.
    Le peuple Algérien tout entier est avec vous, derrière vous, pour le pire, comme pour le meilleur.
    INCHALLAH
    BI IDN ILLAH
    ALLAH Y HAFDEK

    Z
    9 avril 2023 - 22 h 16 min

    IL FAUT LA REGULATION DE L ETAT ET QUE CE MARCHE INFORMEL CE CONFORME A LA LOI ET DECLARE CES ACTIVITES ET SURTOUT ¨PAIE CES IMPOTS IL N Y AS PAS A NEGOCIER

    DZ
    9 avril 2023 - 21 h 58 min

    EN FAIT LE MARCHE INFORMEL EST UN ETAT DANS L ETAT C EST QUOI CE BINZ ET LES SERVICES DE L ETAT IL FONT QUOI IL FAUT FORCER CE MARCHE A CE PLIER AUX LOIS L ALGERIE EST ELLE UNE REPUBLIQUE BANANIERE,? ET LE SQUARE SAID C EST QUOI TOUT CE FATRAS QUE FAIS LA LOI ARRETER MOI TOUS CA VITE FAIT AU BOULOT TEBBOUNE N AS PAS A NEGOCIER AVEC EUX

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