Deux signes ont confirmé la profondeur de la crise entre Alger et Abou Dhabi
Par Kamel M. – Il est, dans les usages protocolaires, des signes qui ne trompent pas. Non seulement Mohammed Ben Zayed n’a pas pris la peine de se déplacer à Alger et n’a pas dépêché son ministre de l’Energie, Suhail Mohamed Faraj Al-Mazrouei, pour prendre part au Sommet des pays producteurs de gaz, dont les travaux viennent de s’achever en présence de dix chefs d’Etat, mais même l’ambassadeur émirati a fait un geste révélateur de la crise profonde qui caractérise les relations entre les deux pays. La poignée de mains entre le président Tebboune et Youcef Saif Khamis Subaa Al-Ali était furtive et accompagnée d’un sourire factice qui confine plus au rictus. Avant cela, l’ambassadeur émirati s’était rendu au Centre international de conférence (CIC) Abdellatif-Rahal à bord d’un banal véhicule de l’ambassade, en lieu et place des grosses cylindrées noires dédiées à ce genre d’événements importants qu’il semble avoir voulu déprécier.
La guerre froide s’est donc définitivement installée entre Alger et Abou Dhabi qui multiplie les actes inamicaux envers l’Algérie, pour avoir critiqué ce que le président de la République a qualifié d’empressement effréné à la normalisation avec l’entité sioniste. Cette réaction semble être restée en travers de la gorge de Ben Zayed qui a, depuis, accéléré le processus de rapprochement avec la monarchie alaouite qu’il finance et arme contre son voisin de l’Est, avec le concours d’Israël. Parallèlement à ces actions hostiles, les Emirats arabes unis mènent une campagne de désinformation pour discréditer les efforts de l’Algérie visant à imposer un cessez-le-feu immédiat à Gaza où se déroule un génocide commis par leur allié et à faire condamner leur auteur, le régime nazi de Tel-Aviv.
C’est ainsi que les services émiratis ont infesté les réseaux sociaux de vidéos montrant des ressortissants algériens bloqués à Gaza en train de «recevoir» des aides de la part des Emirats et «suppliant» les autorités algériennes de les rapatrier, une façon de faire croire à l’abandon de ces compatriotes par leur pays. Or, expliquent des observateurs avisés, les Palestiniens eux-mêmes saluent le travail monumental fourni par une association algérienne sur place et dont l’action est tellement efficace que l’armée israélienne a bombardé son siège et une école qui servait à accueillir des réfugiés fuyant les bombardements ou des rescapés dont les maisons ont été réduites en poussière.
Par ailleurs, les Emirats arabes unis sont pointés du doigt en raison de l’impact négatif de leur industrie gazière sur l’environnement. Le Devoir a révélé le contenu d’un rapport publié par Climate Action Tracker qui a souligné le pari du pays hôte de la COP28 sur le captage du carbone. La conférence de l’ONU sur le climat, qui s’est déroulée en novembre 2023 à Dubaï, était présidée par le patron du géant gazier ADNOC, Sultan Al-Jaber, «dont la désignation à ce poste a suscité des craintes», notait le journal canadien. Ce dernier citait l’organisation Global Witness, selon laquelle les émissions indirectes des activités de la compagnie émiratie devraient augmenter de plus de 40% en 2030, contrairement à ce qu’avancent les responsables de ce pays.
K. M.
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