L’Iran doit renoncer à l’arme nucléaire et Israël doit aussi démanteler la sienne

Israël nucléaire
Israël doit démanteler son arsenal nucléaire.D. R.

Une chronique de Michel Rogalski – C’est bien connu, les médias chassent en meute et, bien souvent, avec la complaisance de la classe politique qui participe ainsi à la fabrication de l’opinion publique. Le spectre de la bombe iranienne fait ainsi la une de tous les plateaux médiatiques sans que soit abordée la question de l’autre bombe, l’israélienne. Comme si celle-ci était naturelle, allait de soi et ne pouvait faire l’objet d’aucune interrogation. Ainsi, l’une serait admissible et l’autre désignée comme le mal absolu. La seconde ferait l’objet de toutes les critiques, la première serait un tabou qu’il serait indécent d’évoquer, au risque pour le journaliste qui en serait tenté de sentir son oreillette grésiller, le rappeler à l’ordre et lui faire sentir que sa carrière n’est plus assurée. Ainsi, il y aurait une bombe de la guerre et une bombe de la paix.

C’est ainsi que médias et classe politique organisent de concert le débat en évoquant de façon récurrente la menace iranienne d’accéder à l’arme nucléaire. On remarquera la fausse symétrie, l’une n’étant que virtuelle, l’autre bien réelle, mais tous deux se réfugiant, pour l’un dans l’absence d’assumer en entretenant un flou total et pour l’autre en jurant que telle n’est pas son intention et qu’on lui fait un mauvais procès. Dissimulation chez l’un et déni chez l’autre.

L’affaire remonte à loin et reste régie par l’ombre tutélaire du Traité de non-prolifération nucléaire signé en 1968, peu à peu rejoint par une majorité de pays – aujourd’hui 192. D’emblée, refuser d’adhérer à l’Accord signifiait une intention non dissimulée d’accéder au statut de puissance dotée de l’arme nucléaire. Peu de pays en prirent le risque. On en connaît la liste : Afrique du Sud, Inde, Pakistan, Israël. Tous ces pays, avec des complicités diverses, accédèrent à l’arme nucléaire. Deux y renoncèrent, l’Afrique du Sud et l’Ukraine, pour des raisons différentes. On peut donc affirmer que le Traité, même si tous ses termes ne sont pas intégralement appliqués, a rempli l’essentiel de son rôle, celui d’éviter la prolifération nucléaire.

Ainsi, l’Afrique est devenue un continent dénucléarisé et l’Amérique latine a évité de l’être malgré les ambitions symétriques de l’Argentine et du Brésil. La situation du continent asiatique étendu au Moyen-Orient est fort différente et beaucoup plus complexe car des situations spécifiques y coexistent permettant à chacun de s’affirmer comme un cas particulier. Après l’avoir signé, la Corée du Nord s’en est retirée et possède aujourd’hui l’arme et les missiles pouvant la porter. La Chine était déjà dotée au moment de l’Accord. L’Inde, le Pakistan et Israël, non signataires du Traité, se sont, chacun, doté de l’arme, et l’Iran, signataire de l’Accord, est suspecté par la communauté internationale de ne pas le respecter et de refuser de se soumettre aux inspections de l’AIEA (Agence internationale de l’énergie atomique), censée en contrôler l’application et à procéder à une aide technique pour accéder à l’usage pacifique du nucléaire. Il lui est reproché d’enrichir l’uranium à des taux qui se rapprochent de la capacité d’accéder à la bombe. L’Iran réfute ces accusations et affirme qu’il n’a pas une telle intention.

C’est dans ce contexte que, sous la mandature de Barack Obama, un accord fut signé à Vienne en 2015, le Joint Comprehensive Plan of Action (JPCoA), associant les cinq membres du Conseil de sécurité, l’Allemagne et l’Iran. Cet accord fut dénoncé unilatéralement par Donald Trump en 2018. Depuis lors, malgré les sanctions, Téhéran augmente le nombre et le rythme de ses centrifugeuses enrichissant l’uranium à des teneurs qui approchent un possible usage militaire.

Aujourd’hui, Donald Trump, devant l’inefficacité de son retrait de l’accord, semble désireux de renouer le contact avec l’Iran, sans se concerter avec l’Europe, et entame une série de négociations bilatérales auxquelles les Iraniens, lassés de l’entrave des embargos, acceptent de participer. Trump tente aujourd’hui de revenir sur sa posture, mais en écartant les Européens. Ces négociations se déroulent sous l’égide du Sultanat d’Oman alors qu’États-Unis et Iran n’ont plus de relations diplomatiques. Le contexte a bien changé. Israël s’est imposé comme puissance militaire régionale incontestée et accumule les victoires par les armes contre le Hamas à Gaza, contre le Hezbollah au Liban, bénéficie de la chute du régime syrien et a détruit une large partie des défenses antimissiles iraniennes. Téhéran a perdu beaucoup d’alliés au Moyen-Orient, peine sous les sanctions et redoute une attaque israélienne sur son potentiel nucléaire. Bref, Israël a fait le «sale boulot» pour le compte de l’Occident sous la protection des bâtiments de guerre américains patrouillant en Méditerranée orientale.

En réalité, il est fort probable que l’Iran souhaite accéder au statut d’un État du «seuil nucléaire», c’est-à-dire d’être en capacité rapidement (entre un et deux ans) de devenir, si nécessaire, une puissance nucléaire. D’autres pays, comme la Corée du Sud ou le Japon, pourraient partager une telle ambition. Cela ferait tache d’huile au Moyen-Orient, et demain l’Arabie saoudite ou la Turquie participerait à une telle prolifération. Rien ne serait plus dangereux. Tout doit être fait, par des moyens diplomatiques et coopératifs, pour rechercher une issue non militaire.

Le paradoxe, c’est qu’au Moyen-Orient le seul Etat doté – Israël – est le plus véhément dans l’opposition farouche à une éventuelle bombe iranienne, adoptant ainsi comme seule logique celle de vouloir être la seule puissance nucléaire de la région, au point de menacer de frappes préemptives le dispositif iranien, comme il le fit à l’égard de l’Irak, en détruisant, en 1981, son réacteur nucléaire en cours de construction. Cette posture n’a aucune légitimité dès lors que sa sécurité est garantie par l’allié américain qui n’hésite pas à déplacer ses bâtiments de guerre en Méditerranée pour signifier sa totale solidarité avec Tel-Aviv et par le soutien acquis d’avance des pays occidentaux. Car, en cas de danger existentiel, tout le monde sait qu’Israël sera défendu de façon inconditionnelle par tous ses alliés qui ne manquent jamais de le répéter.

Cette bombe israélienne, qui fut construite avec la complicité dissimulée d’États dotés et signataires du Traité de non-prolifération – notamment de la France et des États-Unis – est une incitation à pousser d’autres pays de la région à s’engager dans la même voie. Longtemps cachée, niée et dissimulée, son existence est maintenant admise mais, au contraire d’arsenaux d’autres pays pour lesquels la communication est d’usage dès lors que les expérimentations sont réussies, elle reste entourée d’un flou discret. Envisagée très tôt par Ben Gourion, le programme israélien démarre dès la fin des années 1950 et sera effectivement considéré comme opérationnel dès le début des années 1970. Depuis lors, il est entouré d’une opacité entretenue et fait figure d’«exception» acceptée, y compris par l’AIEA qui n’a jamais pris le sujet à bras-le-corps et a ainsi contribué à en «normaliser» l’existence. Ainsi, le pays peut prétendre bénéficier du prestige de la possession de l’arme nucléaire sans avoir à en payer le moindre coût diplomatique ou moral et peut continuer à jouir du monopole de l’arme nucléaire dans la région. Partant de ce principe d’exception, Tel-Aviv peut s’exonérer de toute recherche politico-diplomatique en vue d’une zone exempte d’armes nucléaires au Moyen-Orient. Cette discrétion fut accompagnée et partagée par la quasi-totalité du monde occidental. Dans le pays, les critiques et les discussions fusent de toutes parts sur les options sécuritaires choisies par les dirigeants et visent tout à la fois : l’armée, le Mossad et le Shin Bet, mais la question nucléaire reste taboue et n’est jamais débattue.

Aujourd’hui, poser, à raison, la question de l’accession de l’Iran à l’arme nucléaire est légitime, et il faut se réjouir de la reprise des négociations avec les Etats-Unis à Oman, mais peut-on aborder ce sujet en entretenant délibérément le silence sur l’autre bombe du Moyen-Orient ? Autre forme de deux poids, deux mesures ?

M. R.

Directeur de la revue Recherches internationales

Comment (5)

    Dr Kelso
    18 mai 2025 - 11 h 49 min

    Ce qui n’est pas sans rappeler un discours avant-gardiste du Guide le colonel Gueddafi à la Ligue Arabe sur l’arme nucléaire et notamment l’entité sioniste qui en dispose comme tant d’autres.

    DE TOUS LES PAYS QUI ONT LA BOMBE ATOMIQUE, SEULE ISRAEL EST CAPABLE DE L'UTILISER.
    18 mai 2025 - 11 h 23 min

    les USA doivent comprendre une chose que tous les pays du monde qui dispose d’une bombe atomique, seule israel est tout à fait capable de la larguer sur un pays qui la dérange. pourquoi ? 1 ils sont convaincus qu’ils auront l’immunité, ils se considèrent comme intouchables, ils commettent des génocides atroces que même la shoah n’a pas connu comme ils le font en palestine, en toute impunité et même avec le soutien immoral et ô combien lâche de la france et des USA, 2 ils n’ont rien à cirer de la race humaine, il n’y a qu’eux qui comptent sur terre. 3 parce que les pays qui leur tiennent tête et qui défendent le droit des palestiniens et des faibles, n’en ont pas !
    CONCLUSION : IL FAUT IMPÉRATIVEMENT QUE L’IRAN MAIS AUSSI DEUX AUTRES PAYS ARABES ET MUSULMANS DOIVENT DISPOSER D’UNE BOMBE ATOMIQUE POUR DISSUADER ISRAEL D’UTILISER LES SIENNES.

    L’IRAN EST UN CONTREPOIDS A ISRAEL ET DE SES BOMBES ATOMIQUES.

    ON NE PEUT PAS INTERDIRE AUX UNS QUI SONT HISTORIQUEMENT RESPONSABLES DE LA VIE HUMAINE ET L’AUTORISER A ISRAEL QUI N’A AUCUN RESPECT POUR LES DROITS DE L’HOMME NI POUR LA DIGNITÉ HUMAINE.

    Antisioniste
    18 mai 2025 - 8 h 09 min

    “Aujourd’hui, poser, à raison, la question de l’accession de l’Iran à l’arme nucléaire est légitime, et il faut se réjouir de la reprise des négociations avec les Etats-Unis à Oman, mais peut-on aborder ce sujet en entretenant délibérément le silence sur l’autre bombe du Moyen-Orient ? Autre forme de deux poids, deux mesures” conclu Michel Rogalski

    Peu, pour ne pas dire personne, (a ma connaissance) n’a aborder cette question crucial de facon aussi objective.

    En effet, la paix au moyen orient est intrinsèquement lié a cette question que l’auteur a exposé avec une grande finesse.

    Les accords d’Abraham (normalisation avec l’entité terroriste sioniste) vers lesquels se sont rué les bédouin du désert qui se prennent vraiment pour des dirigeants, hormis le sultanat d’Oman, ne peuvent aboutir a une paix même si le junkie BMS franchie le pas et rejoint le troupeau de ses semblables (ce qui ne saura tarder).

    Pas besoin de sortir de West Point, Saint Cyr, Harvard ou du MIT pour comprendre que les voix européenne qui se sont élever pour soutenir ouvertement la cause palestinienne font partie d’une politique beaucoup plus élaborer, dont le but est d’accélérer le processus de normalisation général avec l’entité terroriste sioniste sans pour autant mettre sur la table la question de sa possession de l’arme nucléaire.

    Imaginer la farce des deux états qu’on nous rabâche, l’un doté de l’arme nucléaire, l’autre peinera a reconstruire un véritable état.

    Aucun chef d’état n’a aborder cette question, et je pense qu’il aura de fameuses « corones » celui qui le fera.

    LE MEILLEUR MOYEN DE DETRUIRE ISRAEL C'EST LA CONSCIENCE
    18 mai 2025 - 8 h 00 min

    israel son arme nucleaire cest la propagande, tout ce qui releve de lesoterisme, ingenieurie des masses a travers les messages subliminaux et bien sur les noirs dont elle se sert pour detruire genocider dautres peuple en partie les latins, européens, arabes et berberes.

    Un metissage culturel et ethnique pour enlever toute identite a ces peuples la en particulier les arabes et berberes. Je felicite encore une fois le gouvernnement algerien davoir expulsé des migrants saheliens mais il faut expulser tous les noirs (subsahariens) d’algerie car ils ont tous cette pensée Sioniste et je rajouterai egalement pas detrangers comme les snp, turcs, syriens, egyptiens etc bravo a Dr Kelso pour ses messages constants. tu as raison, l’algerie n’est pas une terre d’asile et n’a colonisé personne.
    Concernant l’arme nucl »aire au sens physique du terme, il n’ya pas que l’Iran même le Pakistan qui en disposent en Asie même dans le Monde Arabe il est très probable que des pays comme l’Algérie et l’Arabie Saoudite l »ont quelque part dévellopé dans le desert.

    C’est pour ça qu’Israel mise énormement sur l’ingénieurie de masses dans les pays européens en occident pour instrumentaliser et manipuler le sub conscient des masses. C’est ca leur arme nucl »aire ultime. Tout ce qui se passe en France par example, les modes, artistes, trends, réseaux sociaux, publicités, athlétes sont imposés et choisis par le mossad et ils font ça dans tout l’occident.

    Algerie patriote
    18 mai 2025 - 7 h 29 min

    Bonjour, il y a une arme encore plus dangereuse c’est leurs journalistes débiles et leurs tv qui braillent toute la journée…

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