Le complotisme se niche dans les instances gouvernementales et au sein de la bourgeoisie française (I)

France
Les Français se sont affranchis de la propagande officielle. D. R.

Une contribution de Khider Mesloub – En France, ces dernières années, le peuple fait l’objet d’un véritable procès pour crime de lèse-majesté informationnel, accusé de complotisme pour s’être affranchi du discours médiatique dominant, propagé d’ordinaire sans rencontrer de scepticisme, de doute, de résistance.

Une chose est sûre, dans l’Hexagone, la croyance en la toute puissante et hypnotisante parole médiatique s’est effondrée. Les Français, vaccinés contre la propagande étatique, sont désormais immunisés contre le virus médiatique. La médiacratie ne règne plus sur l’esprit des «citoyens» depuis quelque temps, arrachés à leur torpeur politique, léthargie intellectuelle, atonie combative.

En effet, en ces temps de crise multidimensionnelle de l’Etat français, d’expansion de la dissidence et de la résurgence de la radicale militance, les accusations de complotisme, cette technique de censure employée par les gouvernants pour verrouiller le débat, éluder les interrogations par trop fâcheuses, délégitimer les discours radicalement critiques, fleurissent dans les ors du Palais présidentiel macronien en voie d’absolutisme et sur les plateaux de la télévision française, majoritairement détenue par les grands argentiers.

Ainsi, en France, sous l’oligarchie macronienne, l’accusation de complotisme fait florès où elle vise souvent à disqualifier toute pensée critique, criminaliser toute voix dissidente.

Particulièrement utilisée depuis la Première Guerre mondiale, notamment à l’époque de l’existence de la flamboyante URSS, l’accusation de complotisme permet de discréditer, diaboliser, psychiatriser, voire criminaliser tout adversaire qui remet en cause la «vérité officielle», le discours dominant.

En matière de diffusion du savoir et d’information, le statut légitime le propos. En d’autres termes, le propos n’a pas la même légitimité selon le statut de son émetteur ou rédacteur. Seul le discours officiel dûment assermenté a droit de cité, bénéficie de l’autorisation argumentaire et réglementaire. Toute parole dissonante, émise par quelque «citoyen lambda», quand bien même scientifiquement documentée et argumentée, est frappée du sceau du discrédit et de l’interdit. Son auteur est ostracisé, fustigé, réduit au silence, voire accusé de complotisme.

Or, s’il y a une vérité historique à énoncer, c’est que le complot, pratique du complot des puissants qu’il faut différencier de la théorie du complot conceptualisée par les médias et brandie par les gouvernants, est l’œuvre des classes régnantes. La pratique du complot règne dans les instances de pouvoir. Au sein des classes dirigeantes, et non parmi les classes dérangeantes ; autrement dit le peuple, le prolétariat.

Le complot est indissociable de l’art de leur gouvernance du fait de l’illégitimité intrinsèque de leur pouvoir, fondé sur l’exploitation et l’oppression de la majorité de la population asservie, et en raison des rivalités économiques et divergences d’intérêts entre factions du pouvoir et entre pays (même alliés, comme l’a démontré l’affaire de l’annulation, en 2021, du contrat des sous-marins tramée en sous-main par les alliés de la France, les Etats-Unis, l’Australie et le Royaume-Uni), quelle que soit la forme de régime dont elles se dotent, démocratie ou dictature, ces deux faces de la même médaille étatique, interchangeables au gré des contextes historiques, comme l’époque actuelle l’illustre amplement avec la résurgence du despotisme viral et pandémique qui se propage plus vite et plus massivement que le débonnaire coronavirus en 2020.

En France, régulièrement, par une forme d’inversion accusatoire largement employée par les pervers narcissiques experts en manipulation en tous genres, la macronie accuse les opposants à ses mesures sécuritaires et antisociales de complotisme.

N’est-ce pas Macron, représentant du capital, qui cultive l’opacité en matière de gouvernance par la réunion régulière du Conseil de défense, forme de cabinet noir ou comité secret composé seulement de quelques ministres et généraux, où les échanges sont classés curieusement «secret défense» pour dissimuler on ne sait quelles informations débattues lors de ces délibérations secrètes (quiconque de ces sommités gouvernementales divulgue des informations sans y être autorisé encourt jusqu’à sept ans de prison) ? Où se niche le complot ? Parmi la population française ou au sein de l’Elysée ?

A chaque convocation de ce Comité de défense, devenue l’instance gouvernementale officielle, les Français ignorent tout de ce qui se dit – se trame – au sein de ce cénacle opaque, régenté sur un mode de gouvernance inscrit dans une dynamique martiale et guerrière, prenant des décisions sécuritaires discrétionnaires pour 68 millions de «citoyens».

Le pouvoir macronien absolutiste divertit ses sujets français avec les fantasmagoriques théories du complot pour mieux occulter ses concrets complots ourdis au grand jour depuis son cabinet noir élyséen afin de remplir un agenda dicté par ses maîtres, les puissants du grand capital financier !

De fait, historiquement, en France comme dans la majorité des pays, le complot s’est toujours niché dans les instances gouvernementales, au sein des classes dirigeantes et des différentes fractions du capital, habituées aux tractations opaques et à la diplomatie secrète. Ce faisant, le complot, le secret, le manque de transparence en vue du renforcement du pouvoir ou de la manipulation de la population font partie du mode de vie des classes dominantes depuis la division de la société en classes.

Sans conteste, la bourgeoisie peut être qualifiée comme la classe dominante la plus machiavélique de l’histoire. Evidemment, ce constat historique est rejeté par la bourgeoisie elle-même, assimilé à la «théorie du complot».

Or, l’annulation en 2021 du contrat des sous-marins français en confirme notre analyse. En effet, les manœuvres complotistes tramées en sous-main pour torpiller le contrat des sous-marins français par les dirigeants des grandes puissances impérialistes américaine, anglaise et australienne, vient nous rappeler les mœurs de voyou de la bourgeoisie. Dans un livre de l’écrivain anarchiste français Georges Darien, un des personnages s’écrie : «Depuis que Marx a découvert la loi de la valeur, fondée sur le vol de la plus-value, les truands se sentent ridicules devant les mafias bourgeoises capitalistes.» Aujourd’hui, le peuple, accusé de complotisme, doit se sentir ridicule devant les pratiques conspirationnistes des classes dominantes du bloc atlantiste.

Comme l’avait déclaré François Heisbourg, conseiller spécial à la Fondation pour la recherche stratégique (FRS) : «C’est un complot. Ce n’est pas simplement l’annulation du contrat des sous-marins.» «Le plus grave dans cette affaire, c’est que trois pays alliés, amis, avec lesquels on pensait avoir une certaine forme d’intimité stratégique, nous ont menés par le bout du nez», expliqua-t-il. «Les Américains et les Britanniques qui étaient en bande organisée avec les Australiens pour mettre sur pied cette opération nous ont tenus dans l’ignorance la plus épaisse. Les Français, comme le reste du monde, ont appris cette affaire dans le courant de la semaine. C’est consternant. Cela rappelle un peu ces grandes catastrophes diplomatiques comme l’affaire de Suez en 1956 quand les Britanniques et les Français avaient voulu mener en secret des opérations militaires sans en parler avec leurs autres alliés. On en ressent encore le contrecoup 70 ans plus tard», ajouta-t-il.

Le ministre des Affaires étrangères de l’époque, Jean-Yves Le Drian, ne s’y était pas trompé, en déclarant qu’«il y a eu mensonge, il y a eu duplicité, il y a eu rupture majeure de confiance, il y a eu mépris», de la part des dirigeants américains, britanniques et australiens. Autrement dit, comme le dit François Heisbourg, il y a eu complot, comme l’histoire des classes dominantes nous en a fourni abondamment la preuve. «Quand on a un allié, on ne le traite pas avec une telle brutalité, une telle imprévisibilité», avait ajouté avec naïveté Jean-Yves Le Drian, plein d’illusions en matière diplomatique.

Aussi, aujourd’hui, les gouvernants se livrent-ils, notamment le gouvernement Macron, selon les mécanismes de défense théorisés par Freud, à une projection quand ils brandissent cette arme de complotisme contre le peuple en quête de vérité informationnelle et de véracité politique. Vérité et véracité poursuivies désormais hors des canaux médiatiques classiques idéologiquement vérolés.

Par essence, contrairement aux puissants, le prolétariat (l’ensemble des hommes et femmes ne disposant que de leur force de travail pour survivre, ces dominés dépossédés de leur existence, autrement dit le peuple d’en bas) n’a aucun privilège à sauver, ni pouvoir à sauvegarder. Aussi, exclu du pouvoir décisionnel et médiatique, ignore-t-il ces armes de manipulation mentale, apanage des classes dominantes détentrices exclusives du pouvoir politique et économique, propriétaires de tous les moyens de communication (médias) et de l’éducation (école), autrement dit ces «appareils idéologiques d’Etat» chargés du conditionnement des esprits. A plus forte raison dans une conjoncture où l’Etat n’est plus qu’un instrument dominé par les entreprises multinationales.

En effet, en France comme dans tous les pays, actuellement l’Etat règne sans gouverner. Transformé en succursale sécuritaire du grand capital, il est réduit à gérer exclusivement la répression policière et à généraliser la tyrannie des interdits.

Désormais, entre le gouvernement Macron – chapeauté par le grand capital – et le peuple français, il n’y a qu’un mince cordon de CRS qui assure la vacillante gouvernance à coups de LBD, véritables armes de guerre destinées à rappeler au peuple le caractère policier et militaire de la démocratie totalitaire à la française instaurée depuis l’élection de Macron.

Jeter l’opprobre sur le peuple en pleine contre-offensive informationnelle et résistance politique est l’apanage des classes régnantes en sursis, condamnées par l’Histoire.

De manière générale, la désinformation consiste à fabriquer délibérément une communication falsifiée, via les supports médiatiques stipendiés, relayée avec une mise en scène spectaculaire pour lui imprimer une dimension émotionnelle effrayante propre à anesthésier toute réflexion au sein de la population tétanisée. Tel est le climat médiatique actuel dominé par la propagation du virus de la peur, la diffusion d’informations virales réduites à leurs banales expressions politiquement amplifiées et falsifiées.

Dans une société divisée et hiérarchisée, fondée sur l’exploitation et l’oppression de la majorité de la population laborieuse asservie, la désinformation fait partie intégrante d’une stratégie de guerre menée par les classes possédantes, aussi bien contre l’ennemi extérieur (puissance étrangère rivale) qu’intérieur, la classe opprimée, autrement dit le prolétariat menaçant.

Globalement, sous le capitalisme, notamment en France, pour régner, la classe dominante dispose du monopole des armes à feu, mais également de celui des «armes à faux», ces fabriques de l’information manipulatoire. Si les premières visent à neutraliser le corps social en révolte, les secondes ciblent en permanence, par la mobilisation des mass médias aux ordres, le cerveau de la population, pilonné à coups de propagandes informationnelles paralysantes et anesthésiantes. Cette arme-à-faux propagandiste, médiatique, officielle est d’autant plus persuasive et convaincante qu’elle émane de sources «autorisées étatiques légitimes», censées incarner la vérité officielle incontestée.

En France, le pouvoir macronien a sombré à tel point dans l’obscurantisme qu’il a éprouvé le besoin d’instituer, au lendemain des mouvements anti-pass et antivax, en 2022, une commission intitulée «les Lumières à l’ère numérique», en vue, probablement, de redonner de l’éclat à sa gouvernance ternie par l’imposture et gouvernée par l’opacité. Cette opacité est incarnée actuellement par l’occulte Conseil de défense, véritable cabinet noir au sein duquel siègent de ténébreux ministres et généraux animés de sombres projets, à observer l’interdiction faite aux membres de divulguer quelque information relative aux délibérations soumises au secret défense.

En effet, selon l’Elysée, cette commission a été chargée de «mesurer les dangers du numérique sur la cohésion nationale et nos institutions afin de mieux y faire face».

La vérité surgit toujours de l’obscurité dans laquelle les puissants s’efforcent, malaisément, de la cantonner pour lui éviter d’éclater au jour. En quelques petits mots, le gouvernement Macron a dévoilé l’objectif de cette commission : protéger la cohésion nationale et les institutions des dangers… de la dissidence, de la contestation, de la subversion, de l’insurrection, toutes entrées en activité volcanique dans une éruption sociale subversive, ces dernières années.

A la vérité, cette commission, tout comme d’autres structures similaires créées récemment, n’a aucune vocation pédagogique. C’est un instrument inquisitorial destiné à l’endiguement du déferlement des vagues de dissidence enregistrées sur tous les fronts de la vie sociale, notamment médiatique.

Pour ce faire, cet organe d’Etat de contrôle de la pensée a pour mission de préparer «des propositions complètes dans le champ de l’éducation, de la régulation de la lutte contre les diffuseurs de la désinformation en ligne».

En résumé, cette commission a pour dessein de proposer des pistes de réflexion pour converger vers les réflexions pistées, autrement dit au contrôle de la pensée, à la pensée contrôlée.

Officiellement, cette instance de moralisation des esprits est donc chargée de débusquer les «fausses informations» circulant sur Internet et de faire des propositions au gouvernement pour lutter contre le «complotisme».

K. M.

(Suivra)

Comment (2)

    Anonyme
    18 septembre 2025 - 10 h 56 min

    The Algerian people do not care about France or its politicians.
    We should ban double citizenship, cut all ties, repatriate our citizen living there.
    That’s it.

    🇩🇿 Fodil Dz
    18 septembre 2025 - 10 h 34 min

    En france, le pouvoir médiatique à la solde sont des outils de propagande.
    Il a utilisé, et continue de le faire, des techniques de propagande de guerre quand il s’agit d’aborder le conflit russo-ukrainien et la guerre contre le peuple palestinien devenu un véritable génocide.
    En france, le pouvoir médiatique à la solde ou « médiacratie » est devenu une sorte de « complotisme étatique ».

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