Tunisie : des membres du gouvernement s’attaquent aux journalistes

Le Syndicat national des journalistes tunisiens (SNJT) a vite réagi contre les attaques systématiques et répétées de certains membres du gouvernement tunisien. Des attaques qu’il qualifie de «déplacées» et d’«injustifiées» à l’égard d’une presse qui milite pour la liberté d’expression. «Des membres du gouvernement et de l'Assemblée nationale constituante attaquent les journalistes afin de les intimider et de dévaloriser leur travail, et aussi pour les faire taire et les réprimer», a déclaré à l'AFP la présidente de la SNJT Néjiba Hamrouni qui affirme que son syndicat œuvre à assurer «la protection des journalistes contre toute agression morale et physique, et défendre la liberté d'expression, menacée même après la chute de l'ancien régime de Ben Ali». Comme première réaction à ces attaques, le SNJT avait recommandé vendredi soir, à la fin des travaux de l'assemblée générale extraordinaire, de «boycotter partiellement les points de presse hebdomadaires du gouvernement» et de réactiver des décrets de lois promulgués en novembre 2011 portant sur la protection des journalistes contre toute forme d'agression. Il avait retenu le principe d'une grève générale à la suite de l'agression de quelques journalistes par des agents de la sécurité lors d'une manifestation de la centrale syndicale samedi dernier. Cette réaction intervient après les «fâcheuses» attaques notamment sur la chaîne satellitaire Al Jazeera du ministre tunisien des Affaires étrangères Rafik Abdessalem, qui avait accusé la presse tunisienne de «déformer les réalités et de minimiser les réalisations du gouvernement». Ce ministère d’obédience islamiste a en effet sorti ses griffes contre la presse tunisienne qui souffre, selon lui, d'un réel problème : celui d’avoir été trop longtemps au service du régime Ben Ali. «Entre 80% et 90% des médias tunisiens qui glorifiaient l'ancien régime ont procédé aujourd'hui à un retournement de veste pour suivre le credo révolutionnaire», avait-il déclaré, suscitant la colère du SNJT. Pour le ministre, «ceux qui se revendiquent aujourd'hui porte-paroles de la révolution sont les mêmes noms, les mêmes visages et les mêmes médias pro-régime Ben Ali qui ont viré à 180°». Des députés de la Constituante, notamment du parti islamiste Ennahda et de son partenaire de gauche, le Congrès pour la République (CPR), avaient accusé aussi les médias de «minimiser les efforts du gouvernement et des élus de l'ANC et d'être au service des contre-révolutionnaires». Ainsi, une année après la chute du régime de Ben Ali, la Tunisie n’est toujours pas sortie de l’auberge. Le débat politique se transforme en affrontements verbaux et parfois même physiques entre islamistes et laïcs. Et le nouveau gouvernement tunisien, foncièrement islamiste, en panne d’idées pour redynamiser l’économie et répondre aux besoins pressants de la société, ne supporte plus la critique, dégaine son arme verbale et tire sur la cible facile qu’est la presse.
Sofiane B.
 

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