Syrie : de la déroute imminente des forces arabo-occidentales à Genève II

Une lecture politique de ce qui se déroule actuellement en Syrie montre un bouleversement des données, des visions et des objectifs, mais également un effondrement visible des projets et espérances des agresseurs. Les ballets diplomatiques surtout vers la Russie et les réponses de Poutine et de Lavrov qui ne souffrent d’aucune ambiguïté, ainsi que les déclarations, devenues plutôt sensées, des responsables américains – par leurs références à la réalité et à la légalité, quoique encore équivoques, sûrement pour ne pas contrarier ses alliés en inquiétude – montrent que pour l’Amérique la limite est atteinte sans percevoir le minimum de ce qui est planifié, comme résultat sur la Syrie, se réaliser. Deux années de guerre contre un peuple, son armée, ses institutions et son histoire sans l’apparition ne serait-ce qu’une faille significative dans l’édifice syrien ; deux années de destruction des infrastructures de toutes natures sans voir la déliquescence prévue malgré les dizaines de milliards de dollars «investis» dans un contexte de récession ou de faillite des économies occidentales, sachant que les bailleurs sont de riches monarchies arabes sous tutelle américaine. La volonté d’exister, la détermination et la patience des Syriens ont eu raison de l’agresseur, ses ruses et son aliénation. En arriver à mobiliser des groupes terroristes intégristes disséminés à travers le monde, surtout musulmans, que l’on traquait hier, pour en faire aujourd’hui, contre de l’argent, des combattants «de la liberté» et «de la justice» sous la fausse bannière de l’islam, au motif fallacieux du djihad, sans résultats probants, ne peut qu’obliger les puissants commanditaires, aussi déraisonnables qu’ils soient, au pragmatisme et au renoncement de cette aventure belliqueuse, onéreuse et sans horizon, qui virait vers une déflagration régionale, voire mondiale ! L’échec de l’aventure semble bien consommé. Depuis l’annonce, par les deux «Grands», les USA et la Russie, d’une conférence «internationale» sur la Syrie, prévue à Genève, qui se veut l’ultime round pour celer cet encombrant et dangereux dossier, il ne reste plus chez les autres protagonistes, impliqués dans le versement du sang syrien, que de s’aligner malgré leurs murmures, leurs agitations trahissant une profonde désillusion. Quand Moscou et Washington ont décidé que la conférence aura lieu les 14 et 15 juin à Genève, au niveau des ministres et vice-ministres des Affaires étrangères, suivi de Ban Ki-Moon, position que Berlin «partage», les autres seront contraint de suivre, y compris la funeste et félonne «Ligue arabe» que dirige le Qatar. En effet, dans le cas d’une guerre, toutes les décisions d’ordre politique s’inspirent ou se réfèrent aux résultats sur le terrain des combats ; c’est une condition sine qua non. Et ces résultats c’est l’armée syrienne qui les imprime. Il n’y a que la France, inféodée à Israël, qui dévoile, sans pudeur, son incompétence. C’est précisément au moment où les deux «Grands» envisagent d’y mettre fin, suite à un accord, en y convoquant cette Conférence, pour juste entériner la décision, que la France, honteuse et confuse, se sentant marginalisée, s’incruste pour manifester sa présence par un «m’as-tu-vu» en déclarant, pour la galerie, que «l’Iran ne doit pas participer» tout en reprenant le refrain désuet «Bachar al-Assad doit partir», narguant la Russie qui trouve sa participation essentielle. L’Iran, qui est aussi visé, est lié par un accord de défense mutuel avec la Syrie. Selon Reuters, Lavrov a haussé le ton ainsi : «La chose principale est que l’Occident veille à la participation à la conférence des groupes d'opposition sans condition préalable et de faire pression pour que les adversaires d'Assad n’exigent pas des choses irréalistes», ajoutant «aucun doute qu'il est obligatoire d'inviter tous les voisins de la Syrie, sans exception. L’Iran, comme vous le savez, est un pays voisin de la Syrie». La France justifie sa position par une tromperie (qui s’appliquerait plutôt sur elle) en claironnant : «Il y a un enjeu de stabilité régionale, on voit mal qu’un pays [l'Iran] qui représente une menace pour cette stabilité participe à cette conférence.» Prôner la paix en refusant les principaux protagonistes est non seulement insensé, mais motif de disqualification. C’est la France aussi qui soutient et arme les terroristes en Syrie en éloignant la solution. C’est donc la France qui représente une menace à la paix dans cette région, qui lui est étrangère, dont la participation est superflue, voire problématique, par ses accointances douteuses ! Elle persiste encore, à reconnaitre un CNS, issu du néant, sans ancrage et sans élection, comme «le seul représentant légitime du peuple syrien». Quel cynisme !
Surprise de taille, au même moment, elle «perd» une de ses colonies, la Polynésie, par un vote de l’Assemblée générale de l’ONU qui l’inscrit territoire à décoloniser par une résolution – présentée par trois minuscules pays – affirmant «le droit inaliénable de la population de la Polynésie française à l’autodétermination et à l’indépendance». Elle crie maintenant à «l’ingérence flagrante…un détournement des objectifs que les Nations unies se sont fixées en matière de décolonisation» (rien que ça ?) alors qu’elle ne cesse de s’immiscer dans les affaires des autres peuples, en s’employant à choisir à leur place, tels la Côte d’Ivoire, la Libye, le Mali, la Syrie est bien d’autres ! Finalement, cela n’arrive pas qu’aux autres. La France se rend compte, à ses dépens, qu’elle ne vaut pas grand-chose sur la scène internationale. Le front Ennosra qui constitue le groupe djihadiste, composé de wahhabo-takfiro-sionistes, le plus puissant de Syrie, semble en débâcle, selon les derniers développements sur le terrain militaire, sous les coups de boutoir de l’armée syrienne et/ou en s’entre-tuant suite à des luttes intestines et sur le terrain politique en déchéance, puisqu’il vient d’être classé désormais, perfidement , par son parrain, groupe «terroriste» après avoir misé sans succès sur lui en lui «déléguant» sa sale besogne par le truchement d’une «opposition syrienne à l’étranger» fragmentée, aux intérêts antinomiques.
Les Américains, qui ne visent que leurs intérêts, y verraient certainement d’un bon œil l’armée syrienne la débarrasser de toute cette racaille au risque de les voir retourner dans leurs pays poursuivre leurs méfaits. Les services européens de sécurité demandent même l’aide des services syriens pour les identifier, d’autant que le ministre allemand de l’Intérieur reconnaît l’existence d’environ 700 terroristes. La Syrie avait, en effet, présenté à l’ONU une liste de terroristes issus de 28 pays (dont EU et Européens), actifs en Syrie. Ces terroristes ne peuvent être traqués sans une coordination étroite avec, surtout, les services syriens, libanais et iraniens. Al-Qusayr, dans la banlieue de Homs près de la frontière libanaise, et à 15 km de Homs, considérée comme un point hautement stratégique pour les Américano-sionistes – par sa position de carrefour et importante porte d’entrée des groupes armés et des armes venant de l’étranger pour envahir Damas –, est finalement sur le point de tomber entre les mains de l’armée syrienne ainsi que 36 villages situés dans sa banlieue. Toutes les voies d'approvisionnements du front Al-Nosra seraient coupées. Le député libanais Assam Ghansou a confié à Al Nachra que des dizaines d’officiers français, britanniques, belges, hollandais, qataris auraient été capturés. Ne reste important, selon lui, que la libération de l'aéroport Al-Zabgha qui permettra d'annoncer zones sûres les frontières syro-libanaises. La chute d’Al-Qusayr sera un tournant décisif de la guerre ; un coup rude à l’axe wahhabo-takfiro-occidentalo-sioniste. Du coup, le Conseil national syrien appelle à une réunion urgente de la Ligue arabe pour arrêter cette «tentative de faire disparaître la ville et ses habitants de la carte» suivie de cris d’orfraie des commanditaires dont les EU qui «condamnent» l’assaut de l’armée syrienne pour libérer cette ville. Ce qu’ils autorisent chez eux, ils le dénient à la Syrie. De la fantaisie ? On parle aussi de «nettoyage» par ratissages, depuis quelques semaines, des zones et autres banlieues de Damas, d'Idleb, de Lattaquié, d'Alep, de Deir Ezzor, de Daraa et de Hama essentiellement – beaucoup sont déjà sous leur contrôle – où l’on rapporte des centaines de tués par jour parmi les groupes armés composites pour la plupart des mercenaires étrangers et ce, sans possibilité d’être approvisionnés, remplacés ou renforcés. Un enfer où il ne reste que la mort ou, avec chance, la fuite ou la reddition. Cette dernière, qui est considérée trahison, a pour réponse l’exécution immédiate par les pairs. Cependant, devant la mort certaine, des milliers ont choisi de se rendre. Cette bataille d’Al-Qusayr précipitera, sans aucun doute, la tenue de cette Conférence que les analystes syriens assurent qu’elle sortira avec un résultat en deçà de ce qui est programmé par les autorités syriennes. Forcément ! Selon les observateurs, l’armée syrienne, majoritairement sunnite, qui a une doctrine et l’expérience, aidés par les forces de «défense nationale », procède par intelligence, discernement, méthode et patience : informations, étude, stratégie, contre-stratégie, tactiques, contre-tactiques, offensive, contre-offensive, contrairement à la horde mercenaire, hétéroclite, indisciplinée, sans conviction, qui répond par les assassinats de civils, le lancement des obus sur les villes, les attaques des concentrations de personnes par des voitures piégées, les destructions des infrastructures économiques, sociales et culturelles, les attentats-suicides, l’éviscération des cadavres, les kidnapping dont des vieillards amnésiques pour les utiliser sûrement comme monnaie d'échange, l’embrigadement des enfants… Ils s’autorisent aussi de décréter le djihad sexuel (forme de prostitution), de rendre licite le viol et le vol. Les planificateurs de cette conquête de la Syrie doivent être atteints d’une grave déchéance mentale pour engager et compter sur ces barbares-là ! Dans ces situations, la guerre contre la Syrie ne peut que toucher à sa fin, en faveur de la Syrie, au regard de la débandade qui règne dans leurs rangs d’une part et de la fébrilité et l’agitation sur le plan diplomatique qui saisit les États impliqués, d’autre part. Cette certitude se vérifie d’abord par les incontestables succès de l’armée syrienne, ensuite par le «coup de grâce» porté suite à l’acquisition récente par la Syrie de moyens de défense redoutables – tels les S300 et les nouveaux missiles de pointe, sol-mer, du type Yakhont, des antinavires équipés de radars sophistiqués – qui ont ôté tout espoir de poursuivre la guerre encore moins de la gagner ! Le tout pris en tenaille par une armada de navires de guerre russes dont 12, au moins, ont accosté récemment au port Tartus. Ceci a fait réagir de façon curieuse le général Martin Dempsey, chef de l’état-major interarmes américain, qui estime que cela «risquait d’encourager l’armée régulière syrienne et de prolonger le conflit» (?!). Plutôt mettre fin aux provocations si l’on se réfère à Nick Brown, rédacteur en chef de la revue IHS Jane’s, qui fait autorité en matière de défense, qui affirme que ces missiles sont «difficiles à détecter et encore plus difficiles à abattre… [qu’ils sont] de taille pour tenir les bâtiments de guerre à distance des rivages syriens». L’intention cachée est révélée par d’autres responsables US qui pensent que ces engins «empêchent un blocus maritime de la Syrie et bloquent toutes possibilités de ravitaillement des groupes armés via la mer». La dissonance, toutefois, vient du secrétaire américain à la Défense Chuck Hagel qui a déclaré que les États-Unis allaient «continuer à discuter avec la Russie» et que les deux pays «ont un intérêt commun à empêcher une guerre régionale potentiellement explosive». Les autres éléments qui ont accéléré les choses vers leur fin sont notamment le raid israélien qui a eu pour conséquence un effet inverse de celui projeté ; une aggravation de la «sécurité» d’Israël par l’ouverture du front du Golan – auquel adhère l’Irak avec l’annonce, par le conseiller de Maliki, Heydar Al-Lami, de la création de comités pour la libération de ses hauteurs occupées par les sionistes – la fourniture d’armes plus sophistiquées au redoutable Hezbollah et, enfin, la sortie fortuite de Carla Del Ponte qui a démoli l’argument de l’utilisation, par l’armée syrienne, des armes chimiques qui allait justifier une intervention militaire extérieure. Ce sont les groupes armés, que soutient l’Occident, qui les ont utilisées affirme-t-elle, sans ambages, après enquête. La dernière menace d’Israël d’user d’un autre raid sur la Syrie a non seulement reçu déjà la mise en garde ferme de la Russie, mais fait réagir l’ex-chef du renseignement sioniste, Amos Yadlin, qui a mis en doute le succès des raids prochains en affirmant que «cette entreprise ne peut être couronnée de succès vu les tensions que créerait une telle campagne… et les réactions que le camp d'en face manifesterait», ajoutant que «les S300 sont capables de viser les avions israéliens à des dizaines de kilomètres». Selon Haaretz, une autorité militaire aurait confié qu’Israël a «sous-estimé la puissance militaire du régime syrien et l'attitude à suivre fait toujours débat au sein de la hiérarchie militaire». Il faut toutefois rester sur vigilant avec cet Israël connu pour sa vilénie et ses coups tordus !
On «réfléchit» même à un ultime (?) stratagème qui consiste en l’envoi de «Casques bleus» afin, dit-on, de «rassurer certains groupes ethniques» et «aider à stabiliser le pays», alors que ce genre de force ne se déploie qu’en cas d’accord de paix d’une part et lorsqu’il y a conflit entre groupes ethniques d’autre part ; ce qui loin d’être le cas en Syrie contrairement à la propagande de l’Occident ! Et puis, le monde connaît maintenant le rôle des «Casques bleus» de l’ONU… des espions déguisés onusiens pour la plupart !
Rien n’y fera. Tout est fini. Il n’y aura plus d’hégémonie américaine sur la région ni de supériorité sioniste. Le multilatéralisme est désormais établi. Le couplet monotone rabâché à la nausée «communauté internationale» ne prendra plus, l’attrape-nigaud «Ligue des États arabes» ne piégera et ne trompera plus. Nous verrons que le monde reconnaîtra, l’héroïsme, les sacrifices et la résistance du modeste peuple syrien face à la puissante alliance qui voulait le sacrifier pour l’intérêt et la suprématie. L’écrivain et philosophe russe, proche de Poutine, Alexander Prokhanov fait cette remarque d’importance «ceux qui ne veulent pas voir l’occupation rampante de la planète par les Américains feraient bien d’observer la Syrie et le rôle qu’y joue l’Occident » (hebdo.ch, du 16 mai 2013).
Terminons par un extrait de l’entretien donné par Bachar al-Assad au journal argentin Clarin qui nous renseigne sur les principes qu’il ne faudra pas toucher et sur des faits qui battent en brèche les versions tronquées occidentales: «Je ne sais pas si Kerry ou les autres ont reçu un pouvoir du peuple syrien pour parler en son nom, à savoir, qui devrait partir et qui devrait rester. Cela sera déterminé par le peuple syrien par les élections…la présence d’observateurs est une décision nationale.» Sur le terrorisme, il a déclaré «soyons clairs…il y a confusion dans le monde entre la politique et la solution au terrorisme. Ils estiment qu’une conférence politique peut arrêter le terrorisme sur le terrain. C’est irréel». Sur les armes chimiques et les accusations, il explique ainsi «ces déclarations de nos ennemis…changent tous les jours. Les armes chimiques sont des armes de destruction massive. Ils disent que nous les avons utilisés dans des zones résidentielles. Si je vous dis qu’une bombe nucléaire a été larguée sur la banlieue et qu’il a dix ou vingt personnes victimes, vous allez me croire ? L’utilisation des armes chimiques dans les zones résidentielles signifie…des dizaines de milliers de personnes tuées en quelques minutes. Qui pourrait cacher une telle chose ?». On comprend, en effet, pourquoi les Américains corrigent l’accusation en disant, maintenant, «en petite dose» à défaut de se renier.
Dans peu de temps, il ne restera que les stigmates et les ondes d’une guerre psychomédiatique sans précédent, perfide, mensongère et vengeresse qui nourriront, durablement, plus de haine surtout pour les États compromis dans cette guerre injuste et prédatrice. Une haine, bien sûr envers tous ces pseudo-politiciens, ces pseudo-journalistes ou chroniqueurs avec leurs médias-mensonges, ces pseudo-organisations dites des «droits de l’Homme», ces pseudo-philanthropes qui font passer ces assassins, ces gueux, ces lâches, ces ignorants, ces obscurantistes, ces dégénérés pour des vertueux ou de «bons samaritains», des épris de justice, de paix et de liberté.
Djerrad Amar
 

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