L’Observatoire européen des drogues met en garde contre le surdosage du kif marocain

L’Observatoire européen des drogues et des toxicomanies (OEDT) met en garde contre la consommation du kif marocain, jugé par ses experts comme «très nocif pour la santé». Dans son dernier rapport publié le mardi 27 mai à Lisbonne, cet organisme en charge de la lutte et de la prévention contre la drogue dans le Vieux Continent avertit ainsi sur les méfaits de cette drogue produite en grandes quantités au Maroc. Les résultats d’analyses obtenus dans des laboratoires européens de grande renommée sont sans appel : le kif marocain provoque des situations d’urgence aiguë. Tout en affirmant que le cannabis est la drogue la plus consommée en Europe, l’Observatoire européen des drogues exprime une grande inquiétude quant à la hausse de sa teneur en principe actif, le THC, «aussi bien pour la résine, majoritairement importée du Maroc, que pour l'herbe, dont la part de production locale augmente dans de nombreux pays». «Des situations d'urgence aiguë, notamment lorsque de fortes quantités ou du cannabis fortement dosé sont consommés, ont été enregistrées», note l'OEDT, qui alerte aussi sur l'émergence de produits de synthèse analogues au cannabis (cannabinoïdes), qui peuvent être «extrêmement puissants», avec des «effets néfastes préoccupants». Selon le même organisme, plus de 80 millions d'Européens adultes ont consommé une drogue illicite à un moment de leur vie. Et le cannabis reste la drogue illicite la plus consommée en Europe. 73,6 millions de personnes, âgées entre 15 et 64 ans, l'ont expérimenté dans leur vie, soit 21,7% des Européens adultes. 18,1 millions d'adultes (5,3%) en ont consommé dans l'année écoulée (dont 14,6 millions des 15-34 ans). Ainsi, les Européens ont consommé, en 2013, 2 050 tonnes de kif marocain. En 2012, 486 tonnes de résine de cannabis et 105 tonnes d'herbe de cannabis ont été saisies en Europe. Le Maroc est le plus gros producteur et exportateur de cannabis au monde. Selon l’Office des Nations unies pour la drogue et le crime (ONUDC), la surface cultivée au Maroc est estimée à 47 500 hectares contre 12 000 en Afghanistan.
Des chiffres et des frissons
Mais pour l’ONUDC, ces chiffres fournis par le gouvernement marocain ne reflètent pas l’étendue de cette culture dans le royaume chérifien. Ce doute est corroboré par le refus catégorique des autorités marocaines d’autoriser l’ONUDC à effectuer une enquête sur le terrain. L’organisme onusien évalue en effet à 72 000 hectares la superficie réservée à la culture de cannabis au Maroc. La production annuelle marocaine est de l’ordre de 38 000 tonnes d’herbe de cannabis et de 760 tonnes de résine de cannabis. Cette culture à grande échelle fait vivre près d’un million de Marocains et rapporte au Makhzen des centaines de millions d’euros chaque année. L’Organisation mondiale des douanes a indiqué, récemment, que 65% du cannabis saisi dans le monde provient du Maroc. En Algérie, les saisies de drogue effectuées par les différents corps de sécurité ne cessent d’augmenter. En 2013, elles ont avoisiné les 200 tonnes, dont 63,4 tonnes ont été réalisées par les services des Douanes. Il y a en effet une hausse considérable des quantités de stupéfiants saisies à la frontière ouest. Le Maroc livre depuis des années une véritable guerre de la drogue en redoublant d’ingéniosité pour échapper à la vigilance des gardes-frontières et écouler son «poison» sur le marché algérien ou le faire transiter vers l’Europe. En vain. Le renforcement de la sécurité tout au long de la bande frontalière pousse le Maroc à chercher d’autres circuits de transit vers l’Europe. Le plus huilé reste l’Espagne, pays tolérant vis-à-vis de la consommation du cannabis. Ainsi, l’essentiel du kif marocain passe par ce pays avant d’arriver sur le marché européen.
Rafik Meddour
 

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