L’accolade entre l’ex-président du RCD et le membre fondateur du FIS dissous choque les démocrates

L’aveuglement en politique s’accompagne inévitablement d’une perte de mémoire. Comment comprendre autrement chez Saïd Sadi, cette accolade qu’il donne à Ali Djeddi, prise en photo, lors de la «conférence sur la transition démocratique», et portée à la connaissance de tous à travers les sites d’information ? Qui pouvait l’imaginer, venant du démocrate impénitent et intransigeant qu’il était quand il dirigeait le RCD dans les années du terrorisme ? Lutter contre «le pouvoir» est-il une bonne raison de s’allier aux anciens dirigeants du FIS dissous au moment où les Algériens que ce parti islamiste avait réussi à tromper par sa démagogie à base religieuse ont compris son jeu et s’en sont démarqués, sans parler des jeunes d’aujourd’hui qui l’ignorent complètement. Au lieu d’aller vers un rassemblement autonome des démocrates, le RCD a choisi de quitter ses anciens alliés pour rejoindre ses ennemis d’hier. La photo de l’accolade et celle de la poignée de mains, entre l’ancien leader démocrate et l’ex-dirigeant islamiste, donnent l’image du naufrage de leurs deux formations politiques : l’une, le RCD, qui ne retrouve plus ses repères fondamentaux, cristallisés autour du slogan pourtant toujours vivant d’«Algérie libre et démocratique» ; l’autre, le FIS, obstinément attaché à ses mots d’ordre d’exclusion mais qui n’arrivent à mobiliser plus personne sur ce terrain. L’un, égaré en fin de parcours, et l’autre, à la recherche de la moindre planche de salut, ils ne pouvaient finalement que se donner l’accolade. Les véritables démocrates, nombreux parmi les internautes, ont été choqués par ce spectacle totalement inattendu, présenté comme le résultat de l’évolution du paysage politique. Certains ont même semblé faire allusion à deux extrêmes qui se rejoignent. Mais, en fait, il s’agit du produit de la dérive malheureuse de l’un, Saïd Sadi, et de la ruse habituelle de l’autre, Ali Djeddi. Ils sont tous deux libres de construire les consensus qu’ils veulent et ceux qui, émus ou ébahis, les ont applaudis, au sein de la conférence, sont également libres de le faire. De là à conclure à un effacement du clivage entre deux projets de société, fondamentalement opposés, c’est aller un peu trop vite en besogne. L’analyse des travaux de la «conférence sur la transition démocratique», tenue le mardi 10 juin à l’hôtel Mazafran, à Zéralda, montre, heureusement, qu’on n’en est pas là, malgré des efforts évidents visant à pousser les démocrates qui ont participé à cet événement vers une compromission fatale. Tout le monde n’a pas perdu la mémoire ni les repères.
Kamel Moulfi

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