La chimérique richesse aurifère algérienne

Par Elyès A. – J'ai évoqué, dans une récente contribution, un certain nombre de pratiques malsaines auxquelles ont eu recours, ces dernières années, quelques importateurs d'or et d'argent ouvrés ou non ouvrés, et dont l'unique but était le blanchiment d'argent et le transfert vers l'étranger de grandes sommes en devise.

Par Elyès A. – J'ai évoqué, dans une récente contribution, un certain nombre de pratiques malsaines auxquelles ont eu recours, ces dernières années, quelques importateurs d'or et d'argent ouvrés ou non ouvrés, et dont l'unique but était le blanchiment d'argent et le transfert vers l'étranger de grandes sommes en devise.
Afin d'aider nos compatriotes à comprendre quelques points évoqués dans ladite contribution, il me semble utile de préciser le contexte dans lequel lesdites pratiques ont eu lieu. Notre pays consomme un peu plus de dix tonnes d'or et une quinzaine de tonnes d'argent par an et la quasi-totalité de cette consommation est faite par le secteur de la bijouterie traditionnelle. L'importation constitue la principale source pour faire face à nos besoins en ces matières, car, malheureusement, nous n'avons pas de mines de métaux précieux dignes de ce nom. En effet, l'entreprise nationale, Enor, qui était une filiale de Sonatrach avant l'année 2003 et qui avait été créée pour l'exploitation de nos deux mines d'or d'Amessmessa et de Tirek, dans le Sud, n'a jamais pu produire un dixième de nos besoins. Pis, en 2003, et avant son entrée en production (son premier kilogramme d'or n'ayant été coulé qu'en 2008), il a été procédé à l'ouverture de son capital et à son «mariage forcé» avec une entreprise australienne, Gold Mining Algeria (GMA), créée ex nihilo spécialement pour prendre une part du gâteau «Algérie». La presse algérienne a déjà abordé quelques aspects de ce scandale. GMA n'était en réalité qu'un groupe d'hommes composé de Canadiens, Australiens, Anglais… ayant un certain savoir-faire dans le pillage des mines africaines. Compte tenu de ce précieux savoir-faire, notre ministère de l'Energie les avait invités (appel d'offres sur mesure) pour prendre 52% d'Enor. Pour se servir à leur guise, nos précieux invités avaient exigé l'affinage en Suisse, puis la revente dans le même pays d'une bonne partie de la production, soit leur part. Bien sûr avec une sous-évaluation des quantités transférées pour affinage en jouant sur le titre notamment. L'appétit vient en mangeant, dit-on. Les mercenaires en question, et dans le but de se servir encore plus, ont concocté des «rapports d'explorations» qui auraient prouvé la présence en Algérie de «grands gisements» d'or ; sans bien sûr préciser si leur exploitation est rentable. Plus le mensonge est gros, plus il passe. Le responsable de GMA de l'époque, Douglas Perkins, une fois la rapine faite, et afin de préparer son retrait, annonça la découverte de l'un des plus grands gisements aurifères d'Afrique. Déclaration reprise bien sûr par notre ministre de l'Energie. La reprise à son compte de ce mensonge par notre ancien ministre de l'Energie était-elle faite délibérément ou s'agissait-il uniquement d'un excès d'euphorie de la part de responsables amateurs ? En tout cas, cette «trouvaille» a permis à GMA d'obtenir des financements de la banque BEA (une centaine de millions de dollars) et de faire oublier quelque 14 millions de dollars qu'elle devait, contractuellement, «miser» comme apport financier en plus de son «savoir-faire». Cette histoire nous a coûté une centaine de millions de dollars (BEA), quelques dizaines de millions d'euros (transférés sous forme de métal en Suisse)… Mais pas que ! Il ne faut pas oublier les centaines de milliers de litres d'acide chlorhydrique, des centaines de tonnes de cyanure de sodium, des tonnes d'acide nitrique… versés dans la nature pour le grand bien de notre sol et surtout de nos nappes phréatiques. Bien sûr, comme évoqué en haut, mis à part quelques quantités d'or extraites (jamais plus de 10% de nos besoins annuels, soit quelques centaines de kilos, dont une bonne partie envoyée en Suisse) l'or s'est transformé en sable pollué ! Quant à la fameuse GMA, et une fois son histoire dévoilée, elle a tout simplement quitté l'eldorado algérien en laissant à la généreuse Sonatrach le soin de réparer les dégâts. La presse nous rapporte régulièrement ce que sont devenus les quelque 500 employés d'Enor.
Voilà brièvement l'histoire de notre richesse aurifère. Il reste, par contre, un vrai gisement de métaux précieux en Algérie. Rentable, mais, bizarrement, personne ne semble vouloir en parler. C'est le gisement que constituent nos déchets d'équipements électriques et électroniques (DEEE). Le gros des DEEE est constitué de pièces contenues dans les ordinateurs, téléphones, postes radio, centraux téléphoniques, cabines téléphoniques, voitures, postes de télévision… Il serait intéressant de se poser quelques questions très simples et très pertinentes. Que deviennent nos DEEE depuis l'interdiction d'exportation de déchets ferreux et non ferreux ? Aucune entreprise n'est en mesure d'affiner et de revaloriser les DEEE contenant des métaux précieux en Algérie. C'est le cas d'ailleurs dans toute la région. Pour comprendre ce point, il faudrait porter le regard à l'est et surtout à l'ouest du pays. En effet, quand l'exportation de déchets ferreux et non ferreux était autorisée, les exportateurs sous- évaluaient les DEEE contenant des métaux précieux (or, argent et platine) qu'ils exportaient. Cette combine leur permettait de faire sortir du pays de belles sommes en devise. Mais depuis l'interdiction desdites exportations, les réseaux de collecte se sont organisés autrement. Ainsi, depuis maintenant plus d'une dizaine d'années, nos DEEE contenant des métaux précieux quittent le pays via des réseaux de contrebande bien organisée pour se retrouver surtout au Maroc. Nos DEEE souvent mélangés avec du cuivre feraient même partie des moyens de paiement des quantités de drogue qui entrent au pays. Le créneau est tellement bien développé que des groupes internationaux, y compris des groupes chinois, ont créé des représentations dans la région de Casablanca pour acheter et grouper les quantités de DEEE récupérées dans le pays, surtout en provenance d'Algérie.
E. A.
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