A quoi ont servi les quatre millions d’euros destinés à l’informatisation des bureaux de poste ?

Le projet de modernisation de la gestion et de l’exploitation du réseau postal d’Algérie Poste, traîne en longueur depuis 2007. Au jour d’aujourd’hui, le taux d’avancement de l’informatisation des bureaux de poste (IBP), est à peine de 6%, huit ans après la conclusion du contrat avec la société sous-traitante AIGS. Selon des sources au fait du dossier du secteur de la poste et des télécommunications, le projet en question devait permettre à Algérie Poste de déployer un système de gestion informatisée de toutes les opérations postales et financières au niveau des bureaux de poste, par des positions de travail polyvalentes assurant toutes les actions, dont la gestion des comptes courants postaux, des comptes Cnep, des mandats, des paiements des pensions, de la consultation du système d’archivage (relevés et signatures), de l’encaissement de factures, du remboursement de crédits, de l’affranchissement et de la sécurisation de la vignette, etc. On apprend également qu’un budget a été dégagé au projet par le ministère de la Poste et des TIC, en vertu d’un premier contrat signé en 2007 avec la société AIGS pour un montant d’un million d’euros, pour développer l’IBP dans 200 bureaux. En 2014, alors qu’aucun résultat n’a été obtenu et malgré la lenteur des travaux qui n’ont démarré qu’en 2009, un nouveau contrat de gré à gré a été signé avec la même société pour 3 autres millions d’euros, par Algérie Poste pour informatiser tous les bureaux à travers le territoire national. Selon nos sources, Algérie Poste s’est ainsi aventurée à confier ce projet à la société AIGS qui appartiendrait à un ressortissant algérien «sans aucun point de présence en Algérie». De plus, AIGS «ne dispose d’aucune référence dans le domaine et son effectif se limite à son gérant qui est également son propriétaire», relèvent nos sources, qui précisent que cette société, étant dépourvue de ressources humaines et de compétences appropriées, s’est appuyée sur le personnel technique et la compétence d’Algérie Poste pour développer sa solution dans un bureau pilote de Draria à Alger mis à sa disposition par Algérie Poste. L’inexpérience d’AIGS et le manque de plateforme logicielle ont fait que de 2007 à 2009, un développement d’applicatifs en local spécifiques à Algérie Poste a été mené par des ingénieurs de l’entreprise désignés pour ce projet sous la conduite du responsable d’AIGS, dont la présence en Algérie est discontinue. Pour nos sources, le développement du réseau postal, «important, vital et très sensible», a été mis entre les mains d’une société sans qualifications ni références et qui ne dispose ni de compétences ni encore moins de moyens. Ce choix, relèvent nos sources, a compromis, voire paralysé le développement du secteur d’autant plus que le service après-vente et le soutien technique sont inexistants. Au vu de toutes les carences et lacunes constatées, au lieu de prendre les mesures qui s’imposent envers AIGS pour éviter de compromettre davantage l’informatisation des bureaux de poste, Algérie Poste continu de subir le manque de compétence de la société sous-traitante alors qu’aucun planning de réalisation n’est arrêté. Il s’avère, en effet, que le peu de réalisations (connexion en IBP) se fait de manière aléatoire, notamment lors de visites sur le terrain des responsables politiques. On relate ainsi le cas récent de M’sila qui a vu en mai 2015, ses bureaux de poste passés à IBP à l’occasion de la visite de la ministre sortante, alors que quatre mois auparavant, aucun bureau de la wilaya n’était passé à ce mode de fonctionnement. Globalement, le projet avance très lentement sans que les responsables d’Algérie Poste semblent s’en soucier. Au contraire, le responsable d’AIGS a bénéficié d’un bureau au niveau de la localité de Birtouta et encadre le personnel de la société désigné pour le projet, «au lieu d’exiger de lui de dédier au projet son propre personnel et de créer un bureau à Alger», notent nos sources. Au sein de l’entreprise, on est unanime sur le fait que la dilapidation des deniers de l’Etat a assez duré et qu’il est temps d’exiger d’AIGS de remettre les codes sources – puisque le développement de la solution est la propriété d’Algérie Poste –, pour permettre aux ingénieurs d’Algérie Poste de parachever le projet et connecter enfin les bureaux de poste. Le constat est, en effet, que ce sont les ingénieurs d’Algérie Poste qui sont en train de concrétiser ce projet actuellement. Pour nos sources, «celui qui a confié ce projet à AIGS est inconscient, irresponsable et ne mesure pas les risques qu’il fait encourir à Algérie Poste. Il fait preuve d’un manquement professionnel certain et avéré. Ce responsable continu d’une manière froide et imperturbable sa besogne de vouloir s’attacher aux services d’AIGS malgré tous les aléas rencontrés avec cette soi-disant société d’informatique méconnue dans ce domaine par les professionnels».
Meriem Sassi

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