Une contribution de Youcef Benzatat – La lettre de Toufik et l’acte manqué de Bensalah envers le peuple

Par ces temps de grognements de rivaux oligarques dans la maison Algérie, toute occasion est propice pour venir marquer son territoire. La dernière qui s’est présentée, ce fut lors de l’allocution de l’un d’entre eux, à l’occasion du vote de la loi de finances 2016, s’exprimant au nom de la présidence du Conseil de la nation. Détrompons-nous ! Il ne s’agit pas, dans cette affaire de la maison Algérie qui devrait s’élever sur ses piliers naturels qui seraient sa nation, sa République et la souveraineté législatrice de son peuple, mais celle de l’oligarchie qui la prend en otage, jalouse pour son pouvoir usurpé et jouisseuse par sa domination effrontée sur son peuple. Ce dernier est venu joindre sa voix à la cohorte des siens, qualifiant le contenu de la lettre de l’ex-chef du DRS, le général à la retraite Mohamed Mediene dit Toufik, sans le nommer explicitement, et de tous ceux qui se sont dressés contre eux, se contentant de faire allusion à de «récentes sorties médiatiques de certaines parties», par des «échanges virulents» et qui «s’inscrivent en porte à faux avec nos règles morales et notre traitement traditionnel des événements.» Un acte manqué qui résonne comme un avertissement à tous ceux qui s’aventureraient, parmi ces «parties», à transgresser ce traitement traditionnel des événements, à l’image du général Benhadid venant déballer le linge sale de la famille sur la place publique. Alors qu’il aurait dû se conformer à ces traditions morales que définit un code d’honneur implicite, qui consiste à préserver la fratrie et le système qui la soutient en reléguant cette virulence dans l’opacité d’un consensus trompe-l’œil, lui garantissant sa quiétude face à d’éventuelles colères du peuple et de sursauts de dignité de la conscience collective. Comme l’avait avoué Chadli Bendjedid avant sa mort : «Nous sommes liés par un code d’honneur.» Et celui qui s’aventurerait à le transgresser sera châtié et chassé à jamais du foyer familial. C’est en ces termes qu’il faudra interpréter cette autre «intrusion» du président du Conseil de la nation, qui n’est rien d’autre qu’un acte manqué, se voulant réconciliateur par un appel au respect du traitement traditionnel des événements et des règles morales en vigueur, alors qu’en vérité, il s’agit de mettre en garde contre cette forme de transgression inadmissible. En terminant son allocution sur des réalisations imaginaires par le clan dont il fait partie, celui du président Abdelaziz Bouteflika, en matière de liquidation de la violence idéologique qui gangrène la société de la part des extrémistes religieux, et de développement économique et social perceptibles par son seul entendement, M. Bensalah, dont il est ici question, ne fait que traduire l’impact déstabilisateur de la lettre de Toufik et du déballage médiatique du général Benhadid sur la quiétude dans laquelle s’est endormie l’oligarchie dans sa confiscation de la maison Algérie. Un impact lourd de conséquences et qui n’est pas prêt à s’estomper de si peu. Les langues continuent, à ce jour, à se délier de plus belle, où chacun se voit acculé à se positionner devant cette fracture béante. Celle-ci est si profonde que le passage à l’acte de ces oligarques ne les contraint plus à des réserves de pudeur, à s’embarrasser de dissimuler sous des rhétoriques mensongères la véritable nature de leur pouvoir. Celui que régissent des règles morales sous forme de code d’honneur, nécessitant un traitement traditionnel de ce genre d’événement et reléguant le peuple au statut d’indus citoyens, à qui ils n’ont aucun compte à rendre.
Youcef Benzatat

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