Le ministre saoudien des Affaires étrangères à Alger pour réparer les pots cassés

C’est le ministre des Affaires étrangères d’une Arabie Saoudite en pleine crise économique qui se rend en Algérie, ce jeudi. Alger et Riyad divergent sur tous les dossiers internationaux, à commencer par celui de la politique arabe de cette puissance pétrolière du Golfe qui a joué un rôle prépondérant dans le chaos qui règne dans, pratiquement, l’ensemble des pays non monarchiques de la région. La visite d’Adel Ben Ahmed Al-Jubeir permettra de poser sur la table les points d’achoppement qui éloignent les deux pays l’un de l’autre. Déjà, au début des années 1990, en pleine montée en puissance de la nébuleuse islamiste en Algérie, les autorités algériennes de l’époque reprochaient au régime wahhabite de financer les partis extrémistes algériens, au premier rang desquels l’aile politique des groupes islamistes armés, le FIS dissous. Le roi avait nié en bloc les accusations d’Alger, mais la mauvaise foi des Al-Saoud apparaissait au grand jour au travers des soutiens indirects que les organismes prétendument indépendants apportaient aux salafistes en Algérie, dans l’espoir d’instaurer un régime théocratique basé sur la charia dans sa perception la plus rétrograde. Le soutien de l’Arabie Saoudite aux groupes armés en Syrie, vingt ans plus tard, confirme cette propension de Riyad à vouloir imposer sa doctrine moyenâgeuse à tous les pays arabes «progressistes». Le refus de l’Algérie de prendre part à la coalition pour mener la guerre au groupe terroriste Daech embarrasse l’Arabie Saoudite. En effet, l’absence du pays pivot dans la lutte antiterroriste dans le monde ampute cette coalition hétéroclite de sa véritable force de frappe. L’Algérie est consciente que ce royaume qui domine le Conseil de coopération du Golfe nourrit secrètement des velléités autres que celles qu’il met en avant pour justifier sa soudaine intention de combattre l’hydre terroriste dont il est le géniteur. L’agression militaire qu’il dirige contre le Yémen en est la preuve. Il vise, in fine, à retourner cette coalition contre les chiites et se positionner comme le chef de file d’une guerre sunnite contre «le danger iranien» aux visées «expansionnistes». L’échec lamentable de l’intervention militaire au Yémen présage la déroute de toute coalition dirigée par les Al-Saoud, quelles qu’en soient les armées qui la composeront. Le choix de l’Algérie de tourner le dos à ce pays «frère» est, dès lors, pleinement justifié. Loin des terrains de bataille, la baisse drastique des cours du pétrole et la grave crise économique qui se profile en Arabie Saoudite, un pays qui vit largement au-dessus de ses moyens, seront également au centre des discussions. Entre les lignes du communiqué laconique qui couronnera la rencontre entre Ramtane Lamamra et son homologue saoudien, il ne faudra pas s’attendre à un quelconque rapprochement dans leur approche concernant les questions de l’heure. Au contraire, tout, absolument tout, concourt à creuser le fossé entre ces deux pays aux intérêts diamétralement opposés.
M. Aït Amara
 

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