Amar Belani : «Le Maroc doit transcender les obstacles artificiels s’il tient à l’union maghrébine»

L’ambassadeur d’Algérie à Bruxelles et chef de la mission algérienne auprès de l’Union européenne a affirmé que «le développement d'une coopération régionale globale est soumis aux aléas du processus de paix au Moyen-Orient et aux convulsions et autres péripéties qui entourent le dossier du Sahara occidental», dans un discours prononcé lors de la Conférence ministérielle de l’Union pour la Méditerranée (UPM), qui s’est tenue en Jordanie. Pour M. Amar Belani, la concrétisation de cette coopération régionale «passe également par une solution pacifique, inclusive et consensuelle aux conflits en Libye et en Syrie». L’ambassadeur d’Algérie à Bruxelles a, par ailleurs, appelé à mettre l’Union pour la Méditerranée «à l’abri des clivages politiques» de sorte à lui permettre d’évoluer dans le strict respect de «ce qui a constitué, depuis le début, sa vocation et sa mission originelle», à savoir la promotion de l'intégration économique «à travers de grands projets fédérateurs réalisés dans un cadre flexible, pragmatique et à géométrie variable». Amar Belani a souligné que le projet de feuille de route de l’UPM «qui n’a rien de technique et qui ne peut valablement pas être présenté comme un simple plan d’action, doit faire l’objet d’une décision politique consensuelle de la part de nos ministres des Affaires étrangères, au cours d’une réunion statutaire». L’UPM «est certes un pourvoyeur et un contributeur d’intégration, mais elle ne peut certainement pas prétendre à l’exclusivité dans ce domaine, tant il existe d’autres cadres régionaux et sous-régionaux dont la valeur ajoutée est solidement établie», a relevé M. Belani qui «pense en particulier au 5+5 qui a fait les preuves de toute sa pertinence en la matière».
L’Algérie attachée à la construction maghrébine
Abordant la question du Maghreb arabe, le chef de la mission algérienne auprès de l’UE a indiqué que l’Algérie «revendique son attachement indéfectible à la construction maghrébine qui procède d’un choix stratégique incontournable et qui constitue un horizon d’attente de même qu’une aspiration légitime des peuples de la région». «Il s’agit, selon lui, d’une exigence de viabilité économique dictée par la mondialisation et la prolifération des regroupements régionaux». M. Belani a, par ailleurs, noté que «l’évolution erratique de cet ensemble sous-régional est due aux obstacles artificiels dressés sur la voie de l’intégration sous-régionale et que la partie en cause, le Maroc, est appelée à transcender si, réellement, elle est animée du désir sincère de promouvoir la construction maghrébine». L’ambassadeur d’Algérie à Bruxelles a relevé que cette situation «est également due au niveau inégal de ratification des instruments de coopération adoptés au niveau maghrébin, qui sont un indicateur fiable de la volonté politique des uns et des autres, et un catalyseur du processus intégrationniste». M. Amar Belani a rappelé, à ce propos, que l’Algérie «se distingue remarquablement par le nombre d’accords ratifiés» et «a, bien avant la création de l’UMA, inscrit tous ses projets structurants dans une perspective d’intégration». «Cela vaut autant pour les infrastructures physiques de transport du gaz, de la connexion des réseaux électriques, que pour le réseau routier et ferroviaire», a-t-il insisté. Selon M. Belani, l’Algérie considère qu’il serait inapproprié d’appréhender l’intégration sous le seul prisme de l’ouverture commerciale, surtout quand celle-ci se réduit à l’écoulement de produits et marchandises fabriqués en dehors de la région. «Faisant preuve d’ambition, elle plaide en faveur de la mise en place d’une "communauté économique maghrébine" fondée sur l’investissement interne, la complémentarité et les avantages comparatifs qu’offre chaque pays par rapport aux autres», a précisé l’ancien porte-parole du ministère des Affaires étrangères. «C’est la raison pour laquelle, a-t-il affirmé, l'Algérie a renouvelé, lors de la 32e session du Conseil des ministres des Affaires étrangères de l'Union du Maghreb arabe (UMA), tenue à Rabat en mai 2014, sa volonté d'accueillir une conférence portant sur la "communauté économique maghrébine", afin d'approfondir l'étude et de rechercher les voies et moyens de concrétiser le projet d'intégration maghrébine». Il a rappelé que l’Algérie «ne cesse, depuis 2012, d’appeler à la refonte de la gouvernance et des institutions de l’UMA, pour adapter cette organisation aux mutations en cours dans notre région et pour lui permettre de faire face aux défis qui confrontent notre espace, notamment le terrorisme, la radicalisation, la migration, la criminalité transnationale et le trafic de drogues».
Pour une stratégie sécuritaire maghrébine globale
S’agissant du volet sécuritaire, Amar Belani a assuré que «l’Algérie a toujours souligné l'importance de la lutte collective et coordonnée contre les menaces transfrontalières, notamment le trafic d’êtres humains, les réseaux de passeurs, les trafics de drogues, la criminalité internationale et le terrorisme». Il a signalé, dans ce sillage, que l’Algérie «aspire à la mise en place d’une stratégie sécuritaire maghrébine globale pour faire face aux dangers du terrorisme, du crime organisé, du trafic de drogues, d’armes et des êtres humains, de l’émigration clandestine et des organisations criminelles (…) en attendant le parachèvement du processus consensuel issu de la Déclaration d’Alger, adoptée lors de la réunion des ministres des Affaires étrangères maghrébins, le 9 juillet 2012». M. Belani a, enfin, fustigé le «concept géopolitique aux contours flous» fondé sur l’élargissement «inconsidéré» à d’autres espaces extrarégionaux «dont les limites ne peuvent être établies». L’ambassadeur a mis en avant le refus de cette approche par l’Algérie, qui y voit une «complexification des processus en cours dans notre région euro-méditerranéenne en leur plaquant et en leur transposant d’autres problématiques spécifiques qui sont mues par des dynamiques politiques, socio-économiques et sécuritaires qui sont propres à ces ensembles extrarégionaux». «Nous estimons que notre intérêt commun nous commande de nous concentrer exclusivement sur le périmètre géographique stricto sensu de notre processus euromed», a conclu le chef de la mission algérienne auprès de l’Union européenne.
Karim Bouali

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