Services publics : l’ISP dénonce les exigences de l’UE

Rosa Pavanelli, secrétaire générale de l’ISP. D. R.

«La divulgation des exigences de l’UE vis-à-vis des pays en développement, dans le cadre des négociations sur l’Accord sur le commerce des services (ACS), met en lumière les normes à géométrie variable qui prévalent au sein de l’UE», dénonce l’Internationale des services publics (ISP) dans un communiqué parvenu à la rédaction. «Alors même que la Commission européenne tente de légitimer auprès de la population son approche à l’égard des accords commerciaux, au motif qu’elle entend préserver ses propres services publics, elle exige des pays en développement qu’ils mettent à mal leurs services publics», ajoute le communiqué.

Parmi les revendications les plus préoccupantes, selon l’ISP, l’UE exige que les autres pays impliqués dans les négociations écartent les autorités régionales et locales de la prise de décision politique, «ce qui limiterait considérablement la possibilité de préserver les services publics». «Une telle décision, juge l’ISP, pourrait exposer les services de proximité, tels que la distribution d’eau, la gestion des déchets, les soins de santé et l’éducation, aux vents mauvais de multinationales mues par le profit». L’Union européenne abrite en son sein certains des plus grands prestataires de services privés au monde «qui ont surfé sur la vague d’autres accords commerciaux pour étendre leur monopole et protéger sauvagement leurs profits», rappelle cette fédération syndicale internationale. Elle souligne que «paradoxalement, de nombreuses villes européennes ont récemment repris le contrôle de privatisations manquées. C’est notamment le cas de Paris et Berlin, qui ont remunicipalisé leurs services de distribution d’eau – une possibilité qui se verrait limitée si l’ACS entrait en vigueur».

«Les pays en développement doivent rester vigilants et surtout ne pas être dupes : les déclarations de l’UE sur l’Europe sociale ne sont que des mots qui ne se traduisent en aucun cas dans sa politique étrangère et commerciale», a averti la secrétaire générale de l’ISP, Rosa Pavanelli. «Le modèle social européen semble incapable de s’exporter au-delà des frontières de l’UE et se mute brutalement en néocolonialisme lorsqu’il est question de politique commerciale vis-à-vis des pays en développement.» «Par ailleurs, la position de l’UE semble ignorer les dangers potentiels inhérents à l’exportation de politiques de privatisation agressives dans les pays en développement dont il a pourtant été démontré qu’elles étaient à l’origine de l’instabilité sociale et politique qui secoue nombre de pays européens», a poursuivi Rosa Pavanelli.

«Plus frappant encore, l’UE demande aux pays en développement de restreindre considérablement leur capacité de réguler les marchés financiers, alors qu’elle-même ne s’est pas encore remise de la dernière crise financière», relève l’ISP.

La prétendue exception des services publics est un mythe

«Dans les derniers documents qui ont filtré sur l’ACS, les services publics sont définis de manière très restreinte et loin d’être adéquate», note encore cette organisation. Elle estime, dans ce sens, que «s’il existe des exceptions relatives à la santé, à l’environnement et à la fiscalité qui, selon les négociateurs, préservent l’intérêt public, il est très peu probable qu’elles se révèlent efficaces dans la mesure où elles ont été calquées sur les exceptions générales de l’OMC, mises en œuvre avec succès par les gouvernements une seule fois sur 44 tentatives».

«Ces documents révèlent que les négociateurs commerciaux de l’UE ont une vision des services publics qui se veut en totale inadéquation avec celle de la population et de nombreux gouvernements européens : celle d’un bien commun qui doit être préservé et qui ne doit en aucun cas être exposé aux vents mauvais de multinationales mues par la recherche du profit», a conclu Rosa Pavanelli.

L’Internationale des services publics est une fédération syndicale internationale représentant 20 millions de femmes et d’hommes qui travaillent dans les services publics de 150 pays à travers le monde. L’ISP défend les droits humains et la justice sociale et promeut l’accès universel à des services publics de qualité. L’ISP travaille avec les Nations unies et en partenariat avec des organisations syndicales et de la société civile et d’autres organisations.

Lina S./C. P.

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