Mebtoul : «Nous ne sommes pas dans la même situation qu’en 1986»
L’expert en économie Abderrahmane Mebtoul considère que la situation actuelle de l’économie nationale ne peut être comparée à celle de 1986. A plus d’un titre. Intervenant aujourd’hui sur les ondes de la Chaîne III de la Radio algérienne pour notamment commenter la dernière tripartite à laquelle il a assisté, cet expert, connu pour son franc-parler et ses critiques, appelle à éviter les discours trop pessimistes. «Il faut, comme l’a souligné le Premier ministre lors de la dernière tripartite, éviter la vision de sinistrose. Nous ne sommes pas dans la même situation que la période de 1986. A cette époque-là, nous avions un début d’endettement et nous n’avions pas de réserves de change. Nos réserves de change aujourd’hui sont de 112 milliards de dollars. La dette extérieure est inférieure à 4 milliards de dollars», a-t-il souligné.
Abderrahmane Mebtoul estime que «le défi à relever maintenant, c’est de transformer ce capital argent en richesse réelle». Pour ce faire, il faudra, selon lui, lever les contraintes à l’investissement en libérant l’entreprise du carcan de la bureaucratie, en résolvant le problème du foncier et en réformant le système financier qui est actuellement un lieu de distribution de la rente, mais aussi en adaptant le système socioéducatif à l’environnement économique.
Cet expert relève dans ce sillage que, par exemple, les nouvelles zones industrielles sont non opérationnelles, en affirmant qu’elles n’ont ni routes, ni électricité, ni gaz. Il assure qu’elles ne sont que des terrains à des prix exorbitants. Pour lui, le problème du foncier industriel se pose encore et avec acuité et on ne peut pas prétendre encourager l’investissement si l’on ne règle pas définitivement ce problème. Abderrahmane Mebtoul préconise dans ce sillage la création d’un véritable marché du foncier industriel. Il appuie ainsi la proposition du FCE, partagée par d’autres organisations patronales, qui consiste à permettre, en plus de l’effort de l’Etat, à des opérateurs privés d’aménager et de créer des zones industrielles qu’ils mettraient sur le marché au profit de ceux qui voudraient investir. Cet expert cite les pays voisins, le Maroc et la Tunisie, où l’Etat offre à un prix symbolique le foncier pour ceux qui investissent dans la production.
Abderrahmane Mebtoul appelle également à respecter la nouvelle Constitution et à ne plus faire la différence entre l’investissement privé et public. L’invité de la Chaîne III considère comme impératif de libérer totalement l’acte d’investir, de lever le tutorat sur les gestionnaires. Pour lui, l’Etat doit garder son rôle et sa mission de régulation du marché et laisser les opérateurs économiques travailler et produire. «L’économie de marché, a-t-il affirmé, ne signifie pas la fin du rôle de régulation dévolu à l’Etat. Au contraire, un manque de régulation de l’économie nationale.»
Pour cet expert, l’Algérie, qui souffre d’une crise de gouvernance, doit avoir une véritable vision stratégique qui permettrait d’avoir une visibilité à long terme. Il considère qu’il y a une prise de conscience du gouvernement à lever certaines contraintes.
Sonia Baker
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