Faux vrais dinars

finance économie Algérie
La planche à billets programmée pour cinq ans pour faire face à la crise financière. D. R.

Par Sadek Sahraoui – Le Premier ministre Ahmed Ouyahia présentera, ce dimanche, devant l’Assemblée populaire nationale (APN), le plan d’action de son gouvernement. Conçu de telle sorte à faire traverser au pays la crise sans trop de dommages, ce plan n’apporte en réalité qu’une seule grande nouveauté : il préconise de recourir sans plus attendre au financement non conventionnel pour éviter à l’Etat et à l’économie algériens l’asphyxie financière ou carrément la faillite.

Pour ce faire, un projet de loi portant amendement de la loi sur la monnaie et le crédit a déjà été adopté «pour introduire le financement non conventionnel au profit du Trésor public». La Banque d’Algérie est désormais prête techniquement et légalement «à prêter directement au Trésor public afin de permettre à ce dernier de financer les déficits du budget de l’Etat, de financer la dette publique interne et d’allouer des ressources au Fonds national de l’investissement». Avec cette réforme, la Banque d’Algérie va donc financer directement le Trésor public par le biais du procédé de création monétaire, communément appelé la planche à billets.

Ahmed Ouyahia avait bien évidemment le choix entre de nombreuses autres mesures pour circonscrire les effets de la crise causée par l’effondrement des prix du brut. Des mesures qui, en plus, auraient donné des résultats garantis. Il aurait pu, par exemple, instaurer de nouveaux impôts, déclarer la guerre aux tenants de l’économie l’informel, mettre la pression sur les contribuables indélicats et pourquoi pas même entreprendre de revoir de fond en comble notre politique en matière de soutien des prix. Cela aurait certainement permis au pays de se relever sans trop avoir à jouer avec le feu de la planche à billets.

Mais voilà, le gouvernement semble avoir eu le souci constant, quand il a eu à choisir une thérapie, d’agir de telle sorte à ce que le front social et la sphère économique restent calmes. Il est vrai que l’imposition de plus d’impôts, la mise en œuvre de réformes économiques de fond ou l’ouverture d’un front avec les barons de l’économie informelle auraient certainement fait entrer le pays dans une zone de turbulences de laquelle personne ne sait dans quel état il pourrait en sortir.

Selon toute vraisemblance, les décideurs n’ont voulu prendre aucun risque, surtout que des acteurs politiques locaux tentent actuellement de créer un contexte favorable à une présidentielle anticipée. Des gens à l’image de Noureddine Boukrouh ou de Soufiane Djilali veulent en effet absolument hâter la succession du président Bouteflika. Contrairement donc à ce que pensent beaucoup de gens, le programme du nouveau gouvernement est avant tout une réponse politique aux détracteurs du «pouvoir». Il n’est pas du tout encore question d’économie.

S. S.

Comment (4)

    A3zrine
    18 septembre 2017 - 9 h 35 min

    Il y a une panoplie de mesures et de solutions, mais pour plus facile, on préconise la planche à billets. Il suffisait de taper dans la poche de l’informel et les barons de l’import import. Mais serait il possible de taper dans sa propre poche? Évidemment non.

    MELLO
    17 septembre 2017 - 17 h 42 min

    Ceux qui gouvernent ce pays ne peuvent ils pas faire un diagnostic juste du mal Algérien ?. Mais si , ils peuvent , mais ils ne veulent pas. Ils savent que l’économie fonctionne en dehors de toute légalité, mêlant la débrouille au délit, et prend des dimensions sordides jusqu’à parasiter et gangrèner les niveaux supérieurs de la hiérarchie de l’Etat, de l’économie, de l’armée et les enserre dans des réseaux de trafic et de corruption étendant leurs ramifications à l’extérieur du pays. Oui ils le savent , mais ils ne veulent pas régler le problème, car ils sont les premiers acteurs de cette situation. Pourquoi, en Algérie, les douloureuses méthodes d’ajustement structurel ont elles débouché sur le chaos et la violence alors que d’autres pays du Tiers Monde ont pu y faire face ? En fait, les dimensions politique et institutionnelle de la crise étaient telles qu’elle ne pouvait se régler par de simples mesures techniques. Ouyahia le savait bien, l’édifice industriel se disloque d’un côté. la filière hydrocarbure se sépare du reste de l’économie, s’autonomise et s’internationalise. Dans les autres secteurs, les entreprises, asphyxiées par les restrictions de crédits et d’importations, dépecées par des procédures opaques de privatisation, étaient soumises à une concurrence nouvelle avec la libéralisation du commerce extérieur. Les collectifs de travailleurs résistaient et résistent mal aux compressions d’effectifs, licenciements et retards dans le paiement des salaires. Leurs cadres, s’ils n’ont pas fui le pays, étaient menacés de rejoindre les prisons , victimes d’une parodie de lutte contre la corruption masquant mal des règlements de comptes. Ils savent que le vrai -faux billet est ailleurs, chez les HADDAD and Co, mais alors pourquoi ne pas les adjoindre à cette crise monétaire ? Pourquoi ne pas opter vers un changement de monnaies avec un nouveau Dinars qui vaudrait 10 Dinars actuels, ce qui obligerait ce circuit informel d’être siphonné par le trésor public ?

    Grandaizer
    17 septembre 2017 - 17 h 03 min

    Ce n’est pas avec de la vraie fausse monnaie(une monnaie de singe) qu’on va redresser une économie en crise.Au lieu de s’attaquer à l’économie informelle,à la fraude fiscale,on préfère la solution de facilité.Injecter de la monnaie de singe pour gagner du temps dans l’espoir d’une « remontada » des prix de l’or noir.Ce qui compte pour eux c’est la survie du régime qui est incapable de gérer sans la bénédiction manne pétrolière.
    Encore une fois avec l’inflation ce sont les salariés et retraité qui vont trinquer.Déjà que les augmentations de salaires et des retraites des années de vaches grasses,ont été complètement épongés par la flambée des prix de produits de consommation.
    Le système politique algérien est condamné, les replâtrages d’Ouyahia n’y suffiront pas à le réanimer.L’Algérie tel qu’elle fonctionne aujourd’hui ne tiendra pas longtemps avec des dirigeants incompétents,incultes et sans vision, qui bafouent et piétinent allègrement leurs propres lois !

    Felfel Har
    17 septembre 2017 - 15 h 04 min

    Quand on est un bon docteur, on s’assure que notre diagnostic a bien conduit à l’identification de la vraie source du problème. Cette première étape, la plus importante, permet alors de mettre en place la thérapie idoine pour soigner le malade. Chez nous, nos dirigeants s’acharnent à fermer les yeux sur les vrais problèmes du pays: la mauvaise gouvernance (du haut de la pyramide jusqu’à la crypte secrète du sous- , sol) qui a enfanté la corruption généralisée et son oligarchie, un système de prévarication qui a permis un enrichissement illicite en un temps record, une classe dirigeante incompétente et incapable de prendre les décisions qui s’imposent. Le PM et le gouvernement qu’il dirige seraient bien inspirés de s’en remettre aux spécialistes de la finance et de l’économie avant de se jeter tête baissée dans la mise en oeuvre de mesurettes qui ne sortiront pas le pays de l’ornière. Non, MR. O la planche à billets, non seulement elle ne résoudra pas nos problèmes, elle les exacerbera, ce qui mettra le pays en danger. En faisant sa promotion, vous ne finirez qu’à enrichir ceux qui ont profité des largesses du pouvoir, alors que ces dans leurs poches et leurs comptes en banques, ici, au Panama, ou ailleurs que vous trouverez l’argent nécessaire pour satisfaire vos besoins de financement du budget et de votre « plan de développement ». Je m’étonne du silence de nos économistes. Talleyrand avait donc raison:  » Ceux qui parlent ne savent pas, ceux qui savent ne parlent pas ». Ya si Hmimed, ouskout oukhali blastek!

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