Mali : l’ONU menace de sanctionner les opposants à l’Accord d’Alger
L’ONU va entreprendre prochainement d’identifier les Maliens qui font obstruction à la paix dans leur pays en vue de leur imposer des sanctions, ont affirmé ce mercredi la France et les Etats-Unis. «Les retards conséquents» dans l’application de l’accord de paix signé à Alger en 2015 «nous conduisent à devoir aller plus loin», a résumé l’ambassadeur français à l’ONU, François Delattre, lors d’une réunion du Conseil de sécurité sur le Mali. «Aucun progrès substantiel n’a été réalisé dans l’application de l’accord et nous souhaitons travailler avec nos partenaires pour identifier les responsables et prendre les mesures qui s’imposent», a abondé Amy Tachco, diplomate américaine, en évoquant la perspective de sanctions. «La France engagera avec ses partenaires dès les prochaines semaines (…) un travail visant à identifier ceux qui font obstruction à la mise en œuvre de l’accord de paix», a précisé M. Delattre.
L’objectif est de viser «dans un premier temps une série de responsables qui nuisent à l’application de l’accord sur le terrain, notamment par leur collusion avec des groupes terroristes ou des activités de trafic», a indiqué le diplomate français, selon l’AFP qui rapporte l’information.
Le projet de la France et des Etats-Unis ne satisfait cependant pas la Russie qui estime la mesure trop hâtive. «L’utilisation directe de sanctions doit être une mesure de dernier recours», a rétorqué l’ambassadeur russe adjoint à l’ONU, Dimitri Polyanski, mettant en garde contre toute «hâte» à cet égard qui serait, selon lui, contreproductive. «Il est de l’intérêt des parties maliennes d’appliquer l’accord de paix» et «le maintien de la sécurité est prioritaire», a-t-il dit.
Comme son homologue de Bolivie, le diplomate russe a jugé que le «chaos» au Sahel était la suite de l’intervention militaire occidentale menée en 2011 en Libye à l’initiative de la France et des Etats-Unis et qui a conduit au renversement de Mouammar Kadhafi.
Présent au Conseil de sécurité mercredi, le ministre malien des Affaires étrangères, Tieman Hubert Coulibaly, a défendu l’action de son gouvernement, assurant que «les petits pas» accomplis pour «rétablir la confiance entre les acteurs» étaient «des pas sûrs».
L’émissaire de l’ONU au Mali, Mahamat Saleh Annadif, responsable de la mission de paix Minusma – quelque 13 000 militaires et policiers –, a aussi souligné qu’il était, pour les Maliens, «temps de passer des promesses aux actes en respectant les échéances convenues». L’opération onusienne de paix au Mali est l’une des plus meurtrières pour les Nations unies dans le monde.
Depuis le déploiement des Casques bleus en juillet 2013, l’organisation déplore 102 morts dans ses rangs, victimes d’actes hostiles. Plusieurs pays, comme l’Ethiopie, ont comme la France et les Etats-Unis affiché leur insatisfaction devant l’absence de progrès.
La Chine a appelé «à un rôle constructif du comité de sanctions» de l’ONU, tout en demandant «à la communauté internationale de respecter la souveraineté du Mali». Les Pays-Bas ont relevé que «les progrès étaient bien trop lents et depuis trop longtemps». «Nous ne devons pas reculer devant l’application des sanctions», a estimé l’ambassadeur néerlandais Karel Van Oosterom.
Fin janvier, le Conseil de sécurité avait accordé jusqu’à fin mars aux parties maliennes pour montrer des avancées dans l’application de l’accord de paix signé en 2015, faute de quoi elles s’exposeraient à des sanctions pour obstruction. En septembre, il avait adopté un régime général de sanctions face au risque d’effondrement de l’accord de paix. Une fois des individus et/ou entités identifiées, le Conseil de sécurité peut décréter des interdictions de visas et geler des avoirs.
R. I.
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