Le limogeage d’Abdelghani Hamel vu par la presse étrangère
Par Hani Abdi – Le limogeage surprise du général-major Abdelghani Hamel de la tête de la police a fait les choux gras de la presse internationale. Des journaux, des sites et des télévisions européens et arabes ont donné écho à cette information qui a fait l’effet d’un séisme de forte magnitude en Algérie. Au-delà du communiqué de la présidence de la République, relayé dans bien des cas in extenso, la presse étrangère en a fait lecture et décryptage.
France 24 axe son analyse sur «la puissance» du général-major, qui a pulvérisé tous les records de progression de carrière au sein de l’armée. «L’homme était considéré comme un potentiel successeur du chef de l’Etat», affirme ce média, qui rappelle le contexte algérien dans lequel a été prise cette décision. «Cette décision intervient sur fond de scandale de trafic de cocaïne qui a éclaboussé de nombreux fonctionnaires, dont des magistrats», souligne France 24, qui met en avant les informations relayées par la presse algérienne sur l’implication du «chauffeur personnel» d’Abdelghani Hamel dans l’affaire des 700 kg de cocaïne. Des informations démenties par la DGSN, précisant que la personne mise en cause était «un chauffeur du parc automobile de la direction et non pas le chauffeur personnel du directeur général de la Sûreté nationale». France 24 présente Hamel comme un homme qui a pris trop de poids au sein du régime depuis sa nomination à la tête de la DGSN en 2010, en remplacement d’Ali Tounsi, tué par l’un de ses collaborateurs.
Le Monde évoque une probable confrontation à distance entre «clans au pouvoir». Dans un article décryptage, ce journal français relève des éléments qu’il estime «suffisants pour que les Algériens évoquent une exacerbation des ‘‘luttes de clans’’, alors que des partis liés au pouvoir appellent le président Bouteflika à briguer un cinquième mandat». «Cette confrontation à distance entre les chefs de l’armée et de la police a pris fin avec le limogeage du second. Le candidat putatif du clan présidentiel à la succession du président Bouteflika – en cas de force majeure – semble désormais éliminé de la course», conclut ce journal.
La Croix parle d’«une valse à la tête de la police en Algérie qui pose des questions». Ce journal fait le lien avec la prochaine présidentielle en affirmant que cette «valse des têtes» a été opérée «à dix mois de l’élection présidentielle». «Tout a commencé le 29 mai à Oran avec une saisie de 701 kg de cocaïne sur un navire battant pavillon du Liberia en provenance du Brésil, et qui était passé par le port espagnol de Valence, selon les informations du ministère algérien de la défense. Les gardes-côtes du Commandement des forces navales ont mis en échec ‘‘une tentative d’inonder notre pays d’une grande quantité de drogues’’, avait déclaré le lendemain le ministère dans un communiqué», souligne La Croix, qui évoque une affaire qui a pris rapidement «la tournure d’un scandale et d’une menace pour le pays». Ce journal a également rappelé les déclarations de Tayeb Louh qui promettait que «personne ‘‘quel que soit son rang’’ n’échappera à la justice». Le limogeage du général Hamel est donc pour La Croix lié à cette affaire.
Pour Jeune Afrique, le limogeage de Hamel est d’ordre politique. Ce magazine édité en France présente le désormais ex-chef de la police comme un «potentiel successeur» de Bouteflika. En limogeant Hamel, Jeune Afrique estime que Bouteflika est «rentré en précampagne électorale».
Pour le journal français L’Obs, le limogeage de Hamel est lié à des «luttes de clans». «Présenté comme un possible successeur du chef de l’Etat, Abdelghani Hamel avait critiqué l’enquête menée par la gendarmerie après une saisie record de cocaïne», a fait remarquer ce journal.
Dans le monde arabe, la presse parle d’un «séisme politique» qu’a provoqué cette «décision». Al-Shark Al-Awsat souligne l’effet surprise de ce limogeage dans un contexte d’incertitudes politiques, à moins d’une année de la présidentielle. Al-Quds Al-Arabi met en avant «le choc provoqué» par cette décision «dans la rue algérienne». Comme les autres médias, Al-Quds Al-Arabi lie ce limogeage à l’affaire des 700 kg de cocaïne et les propos du général-major Hamel sur la lutte contre la corruption.
Globalement, la presse étrangère est dans la même grille de lecture que la presse algérienne. Même si, sur les réseaux sociaux, les supputations vont dans tous les sens.
H. A.
Comment (21)