Contribution de Youcef Benzatat – Libérer le peuple de sa propre prison

Manif bandits
L'Algérie de demain devra être bâtie sur des valeurs arrimées à à la contemporanéité du monde. PPAgency

Par Youcef Benzatat – Le but de la révolution n’est pas d’arrêter les bandits de la nation ou les plus vulnérables parmi eux à l’occasion de la conjoncture provoquée par la révolte et l’indignation collective du peuple depuis le 22 février. Ni de démettre de leurs fonctions les satrapes qui ont confisqué l’Etat et ses institutions. Il n’y aura pas un après-Bouteflika, comme il n’y a jamais eu un avant. Le système est ce qu’il est, et le départ de Bouteflika est sans aucun doute un non-évènement. Un autre imposteur, au visage de cire, prendra sa place comme à l’accoutumée pour perpétuer le système liberticide qui caractérise le système du pouvoir algérien depuis notre accès à l’indépendance nationale.

Notre conviction est que le peuple algérien n’est pas en mesure, dans la situation qui le caractérise aujourd’hui, à pouvoir restituer sa souveraineté législatrice au profit d’une citoyenneté républicaine en mesure de lui apporter toutes les libertés fondamentales qui caractérisent la contemporanéité du monde.

Végétant dans une conscience pré-politique, façonnée par un demi-siècle de dépolitisation au sortir de 132 ans de néantisation, conjuguée à sa nucléarisation en autant de groupes ethniques, religieux et identitaires, il n’aura d’autre choix que de reproduire le système en croyant être venu à bout, après avoir nourri l’illusion de sa purification des crapules qui ont dévié du droit chemin.

L’inflation des feuilles de route et le puzzle de la transition aux pièces manquantes attestent de l’inconsistance de la conscience collective face au défi à relever pour mettre définitivement le système hors d’état de nuire.

Qu’entend-on au juste par transition lorsqu’on évoque ce concept fondateur ? Les feuilles de route dont s’enorgueillit à convoquer la transition comme sortie de crise, par opposition à celles qui appellent à une élection présidentielle avec la promesse de réformes après coup, revendiquent généralement la volonté de passage d’un Etat totalitaire à un Etat démocratique, sans engagement à repenser les valeurs qui fondent ce système totalitaire et qui lui permettent de se reproduire et de se perpétuer.

Or, la transition démocratique en Algérie n’a de sens que si elle met en branle un processus de disqualification de l’ancien monde, incarné par ce système aux valeurs totalitaires, autoritaires et liberticides, pour laisser place à un nouveau monde qui sera incarné, quant à lui, par un nouveau système fondé sur des valeurs démocratiques, républicaines et arrimées à la contemporanéité du monde.

A y regarder de près, les valeurs qui incarnent ce système et cet ancien monde ne sont autres que les constantes nationales du triptyque arabité, berbérité et islam, qui figent la société en une totalité fermée et qui constituent pour elle autant d’impasses. Qui l’empêchent de se penser autrement que dans les valeurs véhiculées par elles, au détriment du métissage, de la transculturalité et de la liberté de conscience. Ce sont justement ces constantes nationales qui nourrissent les valeurs de totalitarisme, d’autoritarisme et de privation des libertés fondamentales. Répudier l’ancien système, c’est se défaire soi-même de ses valeurs pour laisser place à une transition à de nouvelles valeurs en tant que fondements de la démocratie et des libertés fondamentales. Citoyenneté, égalité entre l’homme et la femme, laïcité, liberté de conscience sont les valeurs fondamentales sur lesquelles se bâtit une véritable transition démocratique.

La transition démocratique ne peut se réduire à la seule quête d’un Etat de droit, à la souveraineté législatrice du peuple, à un Etat civil, définis par ce triptyque. Car il ne peut être question dans ce cas que de la reproduction de l’ancien système et de l’ancien monde qui le nourrit et le légitime.

La transition ne peut se concrétiser au sens plein du terme que si elle vise la refondation de la loi fondamentale par la remise en question de ce triptyque au profit de valeurs véritablement démocratiques. Or, la société est loin d’être prête pour soutenir un tel processus révolutionnaire. Dans ce cas, au lieu de parler de transition, il serait plus indiqué de parler d’assainissement moral de la vie politique et se contenter de se réfugier dans un conservatisme sans ambitions.

Y. B.

Comment (13)

    Ahmed Ghoulem
    15 juin 2019 - 9 h 34 min

    Voilà un discours d’Obédience maçonnique !
    Faisant des valeurs neutre de laicité, metissage et autres de pseudos nouvelles contantes de la pseudo vraie democratie ou de la pseudo civilisation comtemporaine qui en vérité sont occidentales cad Blanche et Chrétiennes et conjoncturellement judéo-Chrétienne. Oui pour une modernité inclusive avec pour chaque peuple qui le souhite ses référants historiques, linguistiques, culturels et religieux.

    Samir Adlane
    15 juin 2019 - 3 h 24 min

    Fausse analyse et analyse survolant de très haut la réalité. C’est une méprise de l’intelligence. Les constantes de la nation n’ont jamais été Arabo-Berbéro-Islamique mais imposées exclusivement Arabo-Islamique. La question identitaire ne se négocie pas ; elle est, pour toute nation saine, une caractérisque historique immuable à laquelle on adhère. Le fait amazigh est nié, occulté voir combatu avec force et aveuglement par une partie de ses enfants qui ont perdu l’usage de sa langue. La democratie quand à elle, elle est bien inscrite dans la matrice ancestrale de cette nation. La sociologie des montagnes des Aures, du Djurdjura ou du Hoggar le demontre. Le fait religieux vidé de sa substance s’invite en contante de la nation pour corrompre la matrice au profit d’une unculture qui sert les seuls tenants du pouvoir.

    salim31
    14 juin 2019 - 18 h 47 min

    Avant de faire le plongon dans la mer ll faut d abord savoir nager , on a deja voulu nager mais on afailli coule la crainte est normale et le pessemisme tout aussi comprensible, chat non nageur craint l eau et puis pour nager il faut etre leger on peut pas nager avec une gandoura ou une bourka c est le coulage garanti , plus serieusement nous portons trop de charges lourds qui nous empechent
    d avancer deja que les musulmans du 21 siecles portent une grande croix mais les algeriens on ont deux de plus ,
    La tryptique _ est une prison en elle meme c est a dire que l algerien est algerien que si il est conforme aux 3 dogmes relugio racialo culturel etablie par les ordres houkoumiste succesif post 62 ,
    1)Islam religion d etat c e n est pas loin de dawla islamya les jeunes de maintenant font la confusion et n arrivent pas imaginer un algerien non musulman ..
    2) l arabite ou l arabisation
    le piege qui veut dire en meme temps la generalisation de langue arabe et la racialisation( el ourouba ) du peuple algerien c est a dire que nous somme declare comme race arabe a part entiere que ce soig jn kabyle mzabi ou chinois algerien
    3) pour reparer cette bourde racialo linguistique ils on introduit l amazighite avec plus de plus separatisme ou il est question de ra e originel et race taiwan de algerien pursang et algerien moiti moiti c est a dire qu il sont arrives en algerie juste il a 800 ans
    Dans toute cette khalouta racialo ethniquo culturalo linguistique l algerien est superaquipe plutot super_ enchaine au point il peut pas faire un geste sans qu un cadenat le retient vous avez raison mr benzelmat l algerien doit d abort ce liberer de sa prison en commencant par abroger ces tryptique de la constitution algerienne et d aller vers la simplicite pour moins de charge sur les algeriens et moins de pression _ la constitution doit mettre en avant l algerianite et les valeur universelle comme le font tout les pays comme la liberte l humanite la solidarite des mots simples et de liberer la religion la culture et la langue de la politique .

    Zaatar
    14 juin 2019 - 18 h 16 min

    Bienvenu au club Y.B, vous venez d’étirer le tissu de l’espace-temps pour expliquer qu’on ne peut dépasser la vitesse de la lumière. C’est ce qu’on n’a pas arrêter de rabâcher avec Karamazov et abou stroff.

    Quand on lit, voit et entend ...
    14 juin 2019 - 15 h 19 min

    …Les supporters de Gaïd Salah, on ne peut pas s’empêcher de penser à un match de football inter-quartiers, pardon ! « Inter-clans » où on entonne la chanson « Djibouha Ya Lewlad »…Djibouha !
    Un seul objectif : Ramener la coupe à la maison de gré ou de force !
    Nous autres algériens, nous sommes tous des passionnés…à moins que, comme dans l’âne de Buridan, notre 22/02/2019 nous aura appris que « le vivre ensemble » doit l’emporter sur l’individualisme corrupteur. Faisons Duas pour y arriver !

    Tangoweb 54
    14 juin 2019 - 12 h 38 min

    Monsieur Benzatat, j apprécie beaucoup vos écrits car ils dévoilent les vrais problèmes de notre pays, mais Dieu merci maintenant le peuple Algerien a décidé de prendre son destin en mains, l espoirs est désormais permis que l Algérie de demain sera très différente, mais y a ces derniers temps un sujet très préoccupant c est de voir certains opportunistes qui cherchent à ce placer et se faire passer pour des leaders de la révolte, alors qu ils ne représente qu, eux même.Je saisie cette tribune pour leur dire de ne pas trop rêver car le peuple ne vous pas mandaté et il ne vous reconnaît aucune représentativité.

      a_kerbadji
      14 juin 2019 - 23 h 34 min

      a Tangoweb54 (12h38),
      je me permets de vous citer: « Je saisie cette tribune pour leur dire de ne pas trop rêver car le peuple ne vous pas mandaté et il ne vous reconnaît aucune représentativité. ».
      dites-nous , vous, qui vous a mandate pour parler ainsi !?
      a bon entendeur …

    Zyriab
    14 juin 2019 - 9 h 29 min

    Tout à fait d’accord C’est d’abord et avant tout un problème « Sociétal » Une société archaïque minée par son tribalisme et son régionalisme dont personne n’arrive à se départir « Nous sommes de telle ou de telle tribu avant d’être citoyen .Une arrestation et on accuse les autorité de « Parce qu’il est de telle tribu  » et non parce qu’il a violé la loi  » Même lors d’une quelconque élection on vote pour lui par ce qu’il est mon cousin et non pour ses compétences .Notre référent permanent est la « Révolution française » et toujours on oublie que cette révolution a enfanté le plus grand criminel de l’histoire et n’a donné le droit de vote au peuple que 60 après et le peuple a élu un Roi Comprendre que le passage du moyen âge (ou nous vivions lors de la colonisation) au XXIème siècle demande non seulement une transition mais surtout un profond changement des mentalités On voulait nous convaincre que c’était juste une question matérielle alors qu’elle est d’abord et avant tout psychique.

    Karamazov
    14 juin 2019 - 9 h 28 min

    « Notre conviction est que le peuple algérien n’est pas en mesure, dans la situation qui le caractérise aujourd’hui, à pouvoir restituer sa souveraineté législatrice au profit d’une citoyenneté républicaine en mesure de lui apporter toutes les libertés fondamentales qui caractérisent la contemporanéité du monde. »

    Ça eût eu le mérite d’avoir été dit si ça l’eût été au début du mouvement et non quand le Hirak a épuisé ses semelles.

    Moua je rajouterai même que le peuple algérien n’est pas sorti de sa conscience de koulounizi et du syndrome de Stokholm , ce qu’il veut c’est que les prédateurs dégagent pour se vautrer à leurs places: Yetnahaw ga3 , koulchi lecha3b.

    Dis-moua Tovarich Abou Stroff, kistipense ?

    Ça, nous on n’a pas attendu que la grossesse du hirak dépasse le terme échu pour dire qu’il s’agit d’une grossesse nerveuse. On a dit qu’un système social basé sur la rente ne peut en aucun cas générer les conditions de son dépassement. et nous n’avions cesser de le répéter en long en large et en diagonale. Parce que le Hirak est un un produit du métabolisme social, si je puis me permettre de m’exprimer ainsi, et même si je ne le puis pas, c ‘est une réaction métabolique. Physiologiquement, c’est un réflexe , comme le réflexe rotulien qui est une réponse au coup de marteau du médecin qui n’ a pas besoin d’être élaborée au niveau du cerveau, ce qui rend impossible la production d’une conscience de classe. D’autant plus qu’aucun événement économique culturel ou scientifique n’est venu modifier les rapports de production ou les rapports sociaux. Bien au contraire la société est engoncée dans ses archaïsmes et dans le culte de ses zombies: hidjama, roqia, Abou 3ali, Oum Youcef, Ibrahimi, Ali yahia, et bigoteries en tous genres .

      Abou Stroff
      14 juin 2019 - 10 h 28 min

      Komrad Karamazov, je te salue!
      rien à ajouter à ton commentaire sinon pour mettre l’accent sur un fait indéniable: le système basé sur la distribution de la rente et sur la prédation ne génère ni société civile (au sens de Gramsci ou au sens de Marx), ni citoyen conscient de ses droits et de ses devoirs, ces deux catégories n’étant générées qu’au sein d’une formation sociale (capitaliste, en particulier) où le travail est la valeur suprême autour de laquelle gravite la dite formation dans son entièreté.
      ce constat étant fait, il est tout à fait pertinent d’avancer que le système rentier ne peut point générer ses propres fossoyeurs (contrairement aux système esclavagiste, féodal et capitaliste) et que son dépassement requiert un choc externe qui pourrait prendre l’un des aspects suivants:
      1- l’émergence d’un HOMME d’ETAT charismatique qui, grâce à sa personnalité exceptionnelle (du genre Attaturk, Mandela ou Bourguiba, par exemple), imposerait une feuille de route dont l’objectif essentiel serait de nous faire réintégrer à l’histoire que nous avons désertée depuis des décennies (je pense que Feu Boudiaf, s’il n’avait pas été assassiné aurait pu jouer le rôle de leader charismatique).
      3- l’arrivée d’un tsunami (une baisse prolongée des prix des hydrocarbures qui annihilerait la base matérielle du système rentier et « déculotterait » les couches rentières qui dominent la formation sociale algérienne, par exemple).
      moralité de l’histoire: je pense que le hirak représente essentiellement une série hebdomadaire de séances de défoulement d’une plèbe en mal de « divertissement ». ce qui permet de soutenir que le hirak ne porte pas en son essence, le dépassement du système qu’il est supposé combattre.

      Chaoui Ou Zien
      14 juin 2019 - 12 h 35 min

      Si on remplacait berberite (un mot qui denigre plus qu’il n’informe) par amazighite et respectait l’ordre alphabetique, la triptyque deviendrait amazighite, arabite et islam. On serait alors beaucoup plus fans le reel que le superflus.

    Antisioniste
    14 juin 2019 - 9 h 24 min

    Bonjour Monsieur Youcef Benzatat

    On le sait tous, et on le dit tous, l’Algérie après le 22 février 2019 ne sera plus celle d’avant cette date. Certains le pensent et le disent avec optimisme, d’autres avec crainte ou réserve, mais tous ont raison dans une certaine mesure.

    Sachant et croyant que l’Algérie ne sera plus jamais la même que celle d’avant le 22 février 2019 est une bonne chose à savoir et à croire, mais c’est loin d’être la réponse aux questions suivantes : Comment va être cette Algérie ? Quel Algérie voulant nous bâtir ? Et comment ? Les généralités répéter tel que nous voulons une Algérie républicaine démocratique et civile sont bien beau, mais qui a le projet détailler de cette Algérie la ? Et même si quelqu’un possède déjà un tel projet dans ses moindres détails je doute qu’il a pris en considération le fait que d’autres vont eux aussi présenter leur projet qui sera certainement diffèrent (au moins), et là nous risquons d’entrer dans des affrontements risqué. Un constat déplaisant est celui que je viens de faire, j’en suis conscient, et je ne m’en excuse pas de l’avoir fait, car on n’a pas encore un projet de société clair et déterminer. Nous somme en mode VFR (Visual flight rules) autrement dit on navigue à vue, alors que nous devrions être en mode IFR (instrument flight rules) c’est-à-dire avec un plan de vol bien clair et règlementer, suivi par des contrôleurs au sol jusqu’à l’arrivé à destination.

    En effet, la gabegie, la corruption, la déliquescence ont été général (durant les 20 dernières années au moins) au niveau national, avec un soutien et une complicité international qui ne laisse planer aucun doute. Et il serait naïf (pour ne pas employer un autre mot) de la part des algériens de croire que ses multiples arrestations des personnes honni et designer par son excellence le peuple algérien sont le début d’une sortie de crise, ou un gage de bonne foi de la part des réel tenants « de fait » du pouvoir actuellement.

    Pourquoi ?

    Tout simplement parce que la gabegie, la corruption, la déliquescence etc.. n’ont pas toucher uniquement « Alger » la capital, mais l’ensemble de l’Algérie, et d’autre part il n’y a pas que les figures connu, honni, interpeller et mise en détention « provisoire » qui sont les seuls, et les seul responsables. Ils ne l’auraient pas pu s’ils n’avaient pas d’autres tampons « complices » au niveau de toutes les wilayas communes et à tous les niveaux. Alors, en tant qu’algérien lambda je me pose les questions suivantes, qu’en est-il de ses ramifications à l’échelle nationale ? Et quand la justice va-t-elle s’en occuper, si c’est vraiment son intention réelle?

    Pour terminer, je dirai tout simplement que nous avons grand intérêt à ne rien précipiter, et à tout repenser calmement mais surtout lucidement, en étudiant toute proposition/initiative avec la froideur d’un intellect rigoureux, et d’un humanisme consciencieux et tolérant.

    DZA
    14 juin 2019 - 9 h 19 min

    Une analyse pertinente, certes, dont je partage bien des points de vu, mais qui hélas, laisse un goût amer dont la mesure ou elle se pose et s’impose à nous comme un préalable à tout changement.
    Reconnaissant vous-même, à juste titre que notre peuple est formaté, et limité dans ses pensées au fameux  »triptyque » que vous dénoncez, votre exposé fait le black-out sur la dynamique de ce mouvement populaire, de son intelligence et ses capacités d’évolution et d’adaptation à la machine infernale qui tente de le manipuler et à défaut de le mater.
    Jusqu’à présent, il me semble, que c’est le pouvoir mafieux, qui est en train de faire des concessions. C’est le système, qui est en train de subir un séisme sans précédent.
    Quel que soit X, la moralisation de la société, est déjà un acquit non-négligeable, si on y arrive réellement.
    Connaissez une révolution qui s’est faite en 90 jours ?
    Dans notre cas et de bien d’autres, on ne peut pas tout avoir et tout de suite. Le chemin est miné.

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