Interview – Un médecin algérien raconte sa lutte contre le Covid-19 à Marseille

T Mokhtari
Le docteur Tarik Mokhtari, médecin urgentiste à Marseille. AP

Pour le docteur Tarik Mokhtari, les chiffres du Covid-19 en Algérie «sont erronés» car «il n’y a pas assez de moyens de dépistage, donc plusieurs personnes ne sont pas diagnostiquées, alors qu’elles ont des symptômes typiques d’infection au Covid-19». L’enfant d’Oran qui a fait ses études de médecin à Paris souligne que «même si les circonstances de la vie ont fait que certains sont partis s’installer ailleurs, dans les moments difficiles, ils n’hésitent pas à manifester leur soutien pour leur pays, pour leurs frères et sœurs». En effet, révèle-t-il, un groupe de médecins algériens ont lancé une opération de récolte de dons pour équiper l’hôpital d’Oran en machine de dépistage.

Algeriepatriotique : Docteur Mokhtari, présentez-vous à nos lecteurs…

Dr Tarik Mokhtari : J’ai grandi à Oran et fait mes études à la faculté de médecine de Saint-Antoine, université de Paris VI. Après avoir travaillé dans divers hôpitaux de France, j’ai posé mes bagages à l’hôpital de Pertuis où j’exerce en tant que praticien hospitalier au service des urgences et du Service mobile d’urgence et de réanimation (SMUR). C’est une ville paisible dans la région de Marseille, une région qui me rappelle ma ville natale.

Comment vivez-vous la crise sanitaire actuelle ?

Dans le service où je travaille, nous avons suivi avec beaucoup d’intérêt ce qui s’est passé en Chine, puis en Italie et en Espagne. Nous avons suivi en temps réel la propagation de la pandémie en France avec les hôpitaux débordés dans la région Grand Est et en Île-de-France. Nous avons eu la «chance» d’avoir une longueur de retard par rapport à ces deux régions, ce qui nous a permis de nous préparer à l’arrivée de la crise dans la région du Sud. Nous avons ouvert une unité Covid-19 de 24 lits à l’hôpital d’Aix-en-Provence. Il a fallu mobiliser du personnel pour armer ce service. Plusieurs services ont augmenté leurs capacités d’accueil, ça a été le cas pour le service de réanimation qui fonctionne à flux temps, même en temps normal. Aux urgences, nous avons adapté le circuit des malades avec la mise en place d’une filière Covid-19 pour que les patients suspects ne soient pas en contact avec les autres patients et nous avons effectué des travaux en toute urgence pour équiper plus de lits avec des prises d’oxygène, dans l’éventualité d’un afflux massif de patients en détresse respiratoire.

Comment se fait l’accueil des patients suspects de Covid-19 ?

Dès l’accueil des urgences, on leur remet un masque et le personnel médical s’équipe de tenues adaptées. Après un entretien et une auscultation, on détermine s’ils sont à risque d’être atteints du Covid-19 ou pas. Le test de dépistage n’est proposé que pour les personnes qui sont susceptibles d’être hospitalisées, et cela pour dicter le traitement à mettre en place. Cela est important à souligner car beaucoup de personnes repartent chez elles sans être testées, elles ont comme consignes de rester confinées. Certaines d’entre elles sont atteintes de Covid-19 et n’entreront pas dans les statistiques annoncées par l’Etat. On approche «officiellement» la barre des 2 millions de malades au niveau mondial, dont plus de 140 000 cas en France, mais la réalité est bien plus importante. En Algérie aussi, les chiffres sont erronés, il n’y a pas assez de moyens de dépistage, donc plusieurs personnes ne sont pas diagnostiquées, alors qu’elles ont des symptômes typiques d’infection au Covid-19, je pense que le chiffre de 2 000 cas annoncé est dérisoire. Enfin, de grandes suspicions planent sur les chiffres annoncés du nombre de cas en Chine d’où la pandémie est partie.

Que pensez-vous du traitement à l’hydroxychloroquine ?

De nos jours, nous avons une culture de l’EBM (Evidence Based Medicine), ou la médecine basée sur les preuves. Il faut faire des études sérieuses, longues avec une méthodologie rigoureuse avant de pouvoir affirmer une nouveauté dans le traitement d’une maladie. Le problème, c’est qu’on est pris de court et nous ne pouvons pas nous permettre le luxe d’attendre plusieurs mois avant de prendre des décisions. Le professeur Didier Raoult de l’Institut hospitalo-universitaire (IHU) de Marseille a suggéré un traitement associant hydroxychloroquine et azithromicyne. C’est une recommandation formulée par l’ensemble des experts de l’IHU, une structure de référence en maladies infectieuses reconnue au niveau mondial. Elle a été suivie par des décideurs de plusieurs pays dont l’Algérie et le Maroc. En France, il nous a été interdit de prescrire de l’hydroxychloroquine en ambulatoire. Ce traitement est réservé aux formes graves de Covid-19 hospitalisées alors que le professeur Raoult dit que ce traitement marche dans les formes peu sévères et s’il est administré précocement. Les pharmaciens ont reçu des consignes pour ne pas délivrer ce traitement, sauf exceptions, c’est-à-dire sur ordonnance de quelques spécialistes, tels que les dermatologues, rhumatologues, néphrologues pour des pathologies autres que le Covid-19.

Que retiendrez-vous de cette crise sanitaire ?

Je n’oublierai pas ce stress d’être en première ligne face aux malades, au plus près du virus, cette angoisse de le ramener à la maison après une garde aux urgences et contaminer les membres de ma famille, l’annonce régulière que des amis et collègues l’ont contracté et ont frôlé la mort. Mais je retiendrai surtout le formidable élan de générosité des gens envers les soignants. Dans tous les hôpitaux de France, d’Algérie et d’ailleurs, les dons affluent tous les jours. On reçoit des repas qui agrémentent nos gardes, on reçoit des masques chirurgicaux FFP2 ou «faits maison», des sur-blouses, des visières de protection fabriquées d’une manière artisanale mais qui sont pour autant très efficaces. Nous avons réappris à nous parler entre voisins et à nous entre-aider. J’espère que ce savoir-être ne se dissipera pas après le déconfinement.

Avec des amis, nous voulons aider à la lutte contre la pandémie en Algérie, alors on a initié un projet d’achat d’une machine de dépistage du Covid-19 au bénéfice du laboratoire central du Centre hospitalo-universitaire d’Oran. Nous avons récolté plus de 10 000 euros en 5 jours seulement. Si on rajoute les promesses de dons, on devrait atteindre 15 000 euros et nous avons été contactés par un grand groupe pharmaceutique qui nous soutient dans cette initiative. Si le projet se concrétise, on pourra probablement équiper non pas un, mais plusieurs hôpitaux avec ce type d’appareils. Les dons nous sont parvenus d’Oran mais aussi de l’étranger, de plusieurs pays, et c’est là qu’on se rend compte que même si les circonstances de la vie ont fait que certains sont partis s’installer ailleurs, dans les moments difficiles, ils n’hésitent pas à manifester leur soutien pour leur pays, pour leurs frères et sœurs. Avec leur noble action, ils ont réécrit le proverbe : «Loin des yeux, près du cœur.»

Propos recueillis par Houneïda Acil

 

Comment (21)

    Merouch
    17 avril 2020 - 8 h 25 min

    La Chine que « tout » le monde donnait en exemple pour son traitement de la pandémie vient d’avouer en partie son mensonge. L’Algérie fera t-‘elle pareil ?
    Des commentateurs et journalistes algériens d’un autre âge, nous affirment que la Chine a maitrisé la propagation du virus.
    En une nuit la Chine a annoncé plus de 1300 morts à Wuhan, alors qu’elle annonçait depuis plus d’une semaine aucun cas. Cela lui enlève beaucoup de crédibilité.
    Pour revenir à « nos médecins » à l’étranger, il est étrange que l’état algérien passe son temps à nous parler des scientifiques établis à l’étranger, suscite leur aide, qu’elle les invite sur les plateaux de l’Unique … des journalistes d’un autre âge les interviewe sur des journaux locaux et privés … , pour que certains internautes débiles sur ce site les désignent comme étrangers.
    On peut développer des centaines de pages pour expliquer le pourquoi et le comment et une des réponses est : pourquoi la « crème » de la issaba cherche à tout prix à venir se soigner en Europe en se faisant parfois malmener comme ce général à Genève et tant d’autres d’ailleurs.
    Cela devrait suffire à clouer le bec à certains mais ils continuent toute honte bue. L’indignité totale !

      Chinoiseries
      17 avril 2020 - 14 h 57 min

      Je viens juste de lire la nouvelle sur un media americain. Ca fait belle lurette qu’on leur dit que les communistes sont forts dans l’art de camoufler la réalité. Mais rien n’y fait. Ils y croient quand même

    Rayes AL VHOUR
    17 avril 2020 - 4 h 11 min

    KOUVITE OU PAS COUP VIDE
    LA EST LA QUESTION
    .

    Vangelis
    16 avril 2020 - 17 h 39 min

    Dans la vie il faut à bien des égards être pragmatique.

    Amha, je ne vois pas où est l’intérêt de cette interview. Il est médecin ‘origine algérienne et après ? Il mène sa propre vie qu’il choisie et au surplus il exerce à l’étranger en regardant de loin ce qui se passe dans son pays d’origine auquel il donne une obole sous forme de dons. L’Algérie sait qu’elle a besoin de compétences pour relever les nombreux défis qu’elle a face à elle. Elle n’a pas besoin de cette charité et elle ne le demande pas.

    Son avis sur les statistiques et la façon de traiter les malades du pays où il est, sont malvenus car c’est rabaisser les nombreux praticiens algériens qui sont au front, au péril de leur vie, mais qui exercent quand même, contre vents et marées, ce qui n’est pas le cas de ce médecin étranger.

      Anonyme
      16 avril 2020 - 18 h 36 min

      Cela s’appelle s’acheter une conscience.

        Fleur
        18 avril 2020 - 17 h 05 min

        Quel crime a t il commis? Celui de collecter des dons en faveur de sa région d’origine….pardon je ne savais pas que ça exposait à la vindicte populaire

      Rahim
      16 avril 2020 - 23 h 56 min

      Si le pouvoir n’avait pas besoin de charite, pourquoi a-t-il mis des comptes bancaires en lignes en euro, sterling et dinar ? La fausse fierte du FLN ne fait pas avancer en rien.

      Lacan
      17 avril 2020 - 11 h 14 min

      (…)
      Ce temoignage est de tres haute valeur. Dans un pays tout de meme tres avance’ et develope’, comme la france, les chiffres rapporte’s sont derisoires, qu’en est-il d’un pays sous-develope’? Les cachoteries sont necessairement a la puissance N, par la barak de la corruption, hamdu de Lila.
      Mais plus pertinent est ce cote’ « patriotik » – bravo, fils de son Pere et de sa Patrie Oran.
      Je vous recommende de trouver dans votre clique un KDS qui puisse parler Kabyle pour comprendre la maniere impeccable avec laquelle cet fleau a ete gere’ en Kabylie. Ca se resume au confinement de 2 virus a la fois, le COVID19 et cousin COVID62. Les dons provenant du systeme sont systematiquement rejete’s ou quand abandonne’s aux portes/check-points des villages et petites villes, elles sont conduites dans des fausses communes, lavees a l’eau-de-javel et enterre’es dans la chaux. Tous ceux qui ont voyage’, hors-kabylie, et sont retourne’s sont automatiquement isole’s, dans une section reserve’e du village.

      Fleur
      18 avril 2020 - 2 h 59 min

      Vos propos sont haineux et de plus vis à vis d’un compatriote fusse t il médecin exerçant à l’étranger….il a le droit comme tout algérien de donner son point de vue et qui est à plusieurs juste et fondé…posez vous la question…qu’avez vous fait pour l’Algérie…qu’elle a été votre contribution si ce n’est que déversé du venin…

        Vangelis
        18 avril 2020 - 14 h 24 min

        Habituellement je ne réponds pas à des individus qui au lieu de commenter l’article trouve à redire que ceux qui les font.

        Honneur aux dames, donc @ fleur qui porte un joli pseudo mais dans le langage est à vomir. Juste une question, dites moi ce que vous, vous avez fait pour l’Algérie avant de réclamer des justificatifs à autrui.

        @ avant de dire des sottises, apprenez à lire et à comprendre le sens des mots. J’ai parlé de l’Algérie, en tant que pays, et non de pouvoir. Ensuite, même si le pouvoir a ouvert des comptes en devises, il vise les émigrés qui sont partis du pays pour divers raison et pas des individus qui ont profité des systèmes universitaires pour ensuite aller exercer ailleurs. Des déserteurs, en somme. Qui plus est, je ne vois pas pourquoi vous parlez de FLN, d’un, je ne suis pas un partisan ni adhérent et de deux, vous mélangez tout sans apporter votre propre contribution.

        Vangelis
        18 avril 2020 - 14 h 30 min

        Habituellement je ne réponds pas à des individus qui au lieu de commenter l’article trouve à redire que ceux qui les font.

        Honneur aux dames, donc @ fleur qui porte un joli pseudo mais dont le langage est à vomir. Juste une question, dites moi ce que vous, vous avez fait pour l’Algérie avant de réclamer des justificatifs à autrui. Il ne suffit pas de donner 10 dinars pour s’arroger le droit de dire qu’on a fait quelque chose pour le pays. Ensuite, vous trouvez de la haine où il n’y en a pas. C’est la caractéristique de frustrée et qui veut en plus donner des leçons à autrui.

        @ rahim, avant de dire des sottises, apprenez à lire et à comprendre le sens des mots avant de critiquer juste pour critiquer. J’ai parlé de l’Algérie, en tant que pays, et non de pouvoir. Ensuite, même si le pouvoir a ouvert des comptes en devises, il vise les émigrés qui sont partis du pays pour diverses raisons et pas des individus qui ont profité des systèmes universitaires pour ensuite aller exercer ailleurs. Des déserteurs, en somme. Qui plus est, je ne vois pas pourquoi vous parlez de FLN, d’un, je ne suis pas un partisan ni adhérent et de deux, vous mélangez tout sans apporter votre propre contribution.

          Fleur
          18 avril 2020 - 16 h 40 min

          Je ne vois pas ce qui vous fait dire que mon prénom est un pseudo..(.je rends grâce à mes parents )vous voyez autrui à votre image, avançant masqué….
          De quel droit vous vous permettez d´interdire la parole à un algérien qui officie sous d’autres cieux d’une part et d’autre part la générosité n’est pas quantitative mais qualitative ….la preuve vous est donnée par sa contribution pour aider ces compatriotes en ces moments difficiles….alors vos commentaires qui se résument à du verbiage… de grâce réservez -les à vos semblables qui malheureusement sont légions en Algérie

        Vangelis
        18 avril 2020 - 19 h 29 min

        A oui grâce à vos parents !

        J’en apprends tous les jours. Je ne savais pas que fleur était un prénom algérien. Je suis resté à nowara qui est un nom commun mais pas à fleur … fanée.

      Vangelis
      19 avril 2020 - 15 h 16 min

      Une couche supplémentaire pour remettre les neurones en ordre de ceux et celles qui trouvent encore à redire.

       » Pour les « tirailleurs » maghrébins et leurs autres compagnons africains qui ont survécus après avoir été embrigadés par la force coloniale dans les guerres de 14-18 et 39-45, obtenir une reconnaissance -même très tardive- a été une entreprise impossible. Aujourd’hui, pour reprendre la métaphore guerrière de notre Macron-Clémenceau, il y a en France plus de 50 000 médecins, nés outre Méditerranée ou au Moyen Orient qui se battent en fantassins contre la pandémie. Parfois pour 1300 euros par mois. Exigeons pour eux, s’ils la souhaitent, l’obtention de la nationalité française et la reconnaissance complète de leurs diplômes.

      Inattendu cet effet induit du « Covid 19 » que la France, celle d’Eric Zemmour avec dégoût, est en train de prendre en pleine face : la pandémie révèle le rôle capital joué dans cette guerre (dixit Macron-Clemenceau) par les médecins, soignants et chercheurs issus du monde arabe et de l’Afrique sub-saharienne.

      Bien sûr ces praticiens essentiels étaient là avant l’arrivée du virus, mais l’administration de la Santé refusait de les compter comme de vrais acteurs. Pour être souvent considéré comme des suppléants, des vacataires, des intérimaires non indispensables. La preuve, ils sont très mal payés, soumis à des statuts précaires et à une fin de contrat qui peut tomber sans prévenir. Voilà donc un démenti silencieux, et le plus digne qui vient clore les propagateurs d’un mythe d’une « invasion » étrangère » venue nous sucer le sang.

      Le premier médecin tombé dans ce combat s’appelle Jean-Jacques Razafindranazy. Il était originaire de Madagascar et à 67 ans, alors en retraite, il n’a pas hésité, dans l’Oise au cœur du foyer d’infection, à se porter volontaire pour grossir les troupes au front. Sa mort émut toute la France. Depuis, dans l’ensemble de l’hexagone, on ne fait plus le compte de ces soignants, nés hors de France, et infectés par le « Covid ». Pour la seule région parisienne le nombre de professionnels de l’Assistance Publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) contaminés depuis le début de l’épidémie s’élevait, fin mars, à 1 200 personnes. Parmi ces professionnels la proportion de médecins, d’infirmiers et d’ambulanciers originaires du Maghreb, du Moyen-Orient et de l’Afrique sub-saharienne est énorme, difficile d’en savoir plus puisque les statistiques ethniques sont interdites en France (et heureusement). Pour analyser le poids sans cesse croissant de ces professionnels arabo-africains dans la santé en France, il faut donc procéder par recoupements. Les statistiques sur le nombre de médecins et de soignants titulaires d’un diplôme « non français ou européen » peuvent constituer une première source. L’autre moyen d’en savoir plus étant de se reporter auprès des nombreuses associations professionnelles regroupant des médecins selon leur nationalité d’origine (Algérie, Tunisie, Maroc, Liban, Syrie, Sénégal…). Ces groupes confraternels publient souvent le nombre de leurs adhérents.

      Dans cette pratique, les associations médicales algériennes sont les plus nombreuses, comme l’Association des Médecins Algériens en France (AMEDAF), et l’Association des Médecins d’Origine Algérienne de France (AMOAF). Elles deux revendiquent plus de 15.000 praticiens, contre 10.000 par les associations marocaines, dont Médecins Marocains en France (AMMEF), et autant de médecins tunisiens (7.000 à 10.000 praticiens). Enfin l’Association Médicale Franco-Libanaise (AMFL) compte près de 2.000 adhérents, même si elle est loin de représenter l’ensemble de la communauté médicale libanaise installée en France qui, de source diplomatique, est estimée à 7000 disciples d’Hippocrate. Sur le même mode de calcul les médecins syriens exerçant en France sont au nombre de 7000. Et, de plus en plus, le système de santé français bénéficie de l’arrivée massive d’Africains sub-sahariens, venus notamment du Sénégal, du Mali, du Bénin, du Burkina Faso, du Congo, mais aussi de l’ensemble des pays francophones du continent.

      Cette difficile recherche indique que près de 50 000 médecins, venus d’Afrique ou du Moyen-Orient, pratiquent leur art dans l’hexagone. Mais, réalité de « l’immigré » qui en toutes circonstances doit se montrer invisible, les chiffres « officiels » sont loin de refléter la réalité. Selon le site « Profil médecin », spécialisé dans le recrutement de médecins et de travailleurs de la santé « un médecin sur quatre inscrit à l’Ordre des médecins est né à l’étranger ». Mais, là encore, le compte n’y est pas puisqu’une bonne proportion des médecins étrangers n’est pas inscrite à l’Ordre des médecins (créé le 7 octobre 1940 par le régime de Vichy). Non pas que ces praticiens refusent l’adhésions mais que celle-ci leur est refusée pour des questions administratives. Par tradition l’Ordre des Médecins est une institution conservatrice qui « protège » ses intérêts et son pouvoir, plutôt que donner priorité à la santé en France. Donc par des tracasseries d’homologation, des médecins bien diplômés hors frontières ne peuvent en France pleinement revendiquer leur titre. Mais les hôpitaux publics, les cliniques privées les emploient quand même comme médecins. Mais au rabais. C’est-à-dire mal payés, corvéables et jetables à tout moment. Une exploitation professionnellement injustifiable, d’autant que la France, en 2018, « manquait » de 20.000. Un statut de soignants de seconde zone qui, sur le plan économique est parfaitement en accord avec les injonctions lancées à l’hôpital, depuis le plan Bachelot qui a donné le coup d’envoi à la santé qui doit devenir un commerce et une industrie, jusqu’à aujourd’hui. On paye très mal de bons soignants tout en faisant des économies : c’est du gagnant-gagnant !

      Pour ces dossiers d’homologation la complexité de la législation française, ubuesque, explique cette criante injustice, et les médias français regardent ailleurs, pire ils stigmatisent volontiers les professionnels de santé, comme un certain Yves Calvi, animateur de télévision, déclarant en direct « j’en ai un peu assez de la pleurniche des hôpitaux ». Et, lors des nombreuses manifestations pour la défense des professions de santé, chacun a pu voir les images de ces « sauveurs » d’aujourd’hui, frappés et gazés par les CRS et gendarmes.

      Les médecins étrangers ont, eux, droit à un double matraquage, celui des Forces de « l’ordre » et celui des lois françaises qui régissent le métier. Selon le site « Profil Médecin » l’appellation « médecins étrangers » recouvre, plusieurs réalités statuaires : « Français ayant obtenus leur diplôme à l’étranger et exerçant en France, médecins étrangers ayant obtenu leur diplôme en France et y poursuivant leur carrière ou encore, médecins nés à l’étranger mais ayant effectué leurs études et exerçant depuis lors en France. »

      Si cet incompréhensible inventaire est possible c’est que le lobby médical installé, que l’Ordre des médecins veille à la porte du sérail. C’est sous sa pression, et celle des nombreux élus qui sont députés et médecins, que la France, en mai 1980, va établir une monstruosité humaine et scientifique : le « numerus clausus ». Pour faire en sorte que les revenus des médecins restent importants, le gouvernement de Giscard d’Estaing a l’idée d’en limiter le nombre. Et cette situation criminelle perdurant, les hôpitaux ont fait appel à des talents étrangers, non diplômés en France, donc échappant au « numerus clausus ». Un dispositif aménagé avec les temps mais qui préside toujours dans les esprits des facs de médecine.

      Certes, une loi récente de 2019 a prévu que ces médecins, pharmaciens, dentistes et sages-femmes pourraient voir leur situation régularisée, « sous certaines conditions ». Aujourd’hui, une pétition a été lancée pour que ceux qui luttent contre le Covid 19 soient automatiquement régularisés. Mais on est encore loin du compte.

      Pendant le confinement, une des chaines de télévision a eu l’heureuse idée de rediffuser Hippocrate, un film sorti en 2014 qui établit, d’une façon romancée et dramatique, un excellent diagnostic des maux de l’hôpital. Et qui place au centre, dans un éclairage intelligent et émouvant, le statut précaire des médecins étrangers livrés à l’arbitraire et l’injustice.

      Lors de sa visite à l’Institut hospitalo-universitaire Méditerranée Infection de Marseille, dirigé par le controversé professeur Didier Raoult, Emmanuel Macron a eu la surprise de découvrir travaillant-là une armée de jeunes chercheurs issus du monde arabe et de l’Afrique. Aux dizaines de chercheurs en virologie et épidémiologie qu’il a croisées, le chef de l’État a demandé :

      « Vous êtes de quels pays ? »

      « Burkinabé, Sénégalais, Tunisiens, Maliens, Marocains, Algériens et Libanais… » ont-ils répondu …

      Et Emmanuel Macron s’est fendu d’un laconique :

      « Merci de participer à l’effort collectif ».

      Cette formule de politesse aura-t-elle un lendemain ? Qui serait, pour ceux qui le souhaitent, la possibilité d’obtenir la nationalité française et, de toutes façons, la reconnaissance pleine et entière de leurs diplômes et compétences… Puisque le président français apprécie la métaphore combattante, on peut lui rappeler que pour d’autres combattants de véritables guerres, 1914-1918 ou 1939-1945, la reconnaissance envers les soldats venus d’Afrique, les fameux tirailleurs et autre chair à canon, est encore « en cours » !

      Dans une lettre ouverte adressée au Premier ministre, rendue publique le 5 avril, treize éminents médecins français -dont trois d’origine algérienne- demandent l’intégration des médecins titulaires d’un diplôme étranger. Ces soignants, écrivent-ils, sont parmi ceux qui « s’engagent avec abnégation dans les postes les plus exposés, aux urgences et dans les services de réanimation ». Et qui contribuent au maintien du « fonctionnement du service hospitalier dans la bourrasque et sauvent des vies dans des conditions difficiles matériellement, mais aussi périlleuses pour eux-mêmes ».

      Mais le revers de la médaille de cette succes story est affligeant. Et ce sont les pays du Sud qui en payent le prix. C’est le cas de la Tunisie qui, jour après jour, assiste impuissante, et depuis 2011, à un exode massif de ses médecins dont la formation a été financée par le contribuable tunisien. C’est aussi le cas de la plupart des pays du Sud qui se voient vidés de leurs praticiens partis en Europe combattre le désert et l’impéritie médical généré par le libéralisme sauvage.  » Majed Nehme sur R.I

    Lghoul
    16 avril 2020 - 12 h 54 min

    La seule chose que je comprendrai après lecture est que l’Algérien ou il se trouve aime toujours son pays et fera tout pour l’aider en cas de besoin. Ce qui est diamétralement opposé a des illégitimes dont le seul travail est la ruse, le complot, les détournements et les calculs pour tromper le peuple. Et ma conclusion est que ces gens ne méritent pas un tel peuple et ne le représentent pas dans tous les niveaux car plus ils font semblant de le représenter, plus ils l’humilient, en transformant ainsi, une beau pays comme l’Algérie, en risée du monde.

    Ok
    16 avril 2020 - 10 h 37 min

    Bonne chance docteur ds vos projets d’aide aux hopitaux algeriens .suivons l’exemple

    Mounir Sari
    16 avril 2020 - 9 h 55 min

    Ce médecin nous apprend que les chiffres sont erronés, ce que tout le monde savait déjà depuis belle lurette.Il n’y a pas que les chiffres du covid-19 qui sont erronés.Chez nous tout est faux.Il y a de faux moudjahidines, de faux députés, de faux médecins, de faux généraux, de faux ministres, de faux walis, de faux chefs de Dairas, de faux diplômes, de faux passeports, de faux permis de conduire
    la liste est encore trop longue!!!!

      Anonyme
      16 avril 2020 - 12 h 53 min

      un faux président ! en remplacement d’un président invisible ! etc ,etc !!,

      Anonyme
      16 avril 2020 - 19 h 33 min

      La même personne se congratule nombreuses s fois sous differents pseudos !!

      Un citoyen.
      16 avril 2020 - 20 h 00 min

      Ce médecin nous apprend le patriotisme et l’amour du pays et de son peuple,il ne perd pas sont temps la même histoire que même la religion n’est pas épargné.

    L'OCCUPANT
    16 avril 2020 - 9 h 44 min

    L’ex occupant l’ami intime du nouveau occupant,ils ont assassinés tout nos meilleurs enfants,pillés notre patrie,falsifiés notre histoire,volé notre matière grise,et peuplé notre nation par des escrocs et des traitres

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