Maladie du complexé
Par Ahmed Kharfi – Dans la guerre médiatique que livrent les ennemis de l’Algérie installés partout en Europe, il existe des personnages rocambolesques, plus ou moins aguerris aux outils de propagande, et qui usent de tout subterfuge. Parmi eux, Hichem Aboud, ex-employé de la DGPS, ancienne police politique, qui œuvre depuis Lille – ou Madrid, peu importe – continue de se présenter comme le symbole de la pureté anticoloniale, à travers des vidéos sulfureuses dans le style le plus pur du félon délateur agissant (dixit) sur la base de documents officiels et incontestables. Depuis l’éclatement de la ligne de pouvoir Bouteflika-Gaïd-Salah, le youtubeur de Lille se livre à de violentes attaques verbales, dignes des plus vils chiffonniers, contre la personne du général Khaled Nezzar, ancien chef d’état-major de l’ANP. Comment donc Hichem Aboud justifie-t-il ses arguments ? Voilà qui semble intéressant pour tous les citoyens algériens, mais aussi français, désireux de connaître la vérité sur les dispositions d’esprit des anciens combattants algériens sur leur nouvelle relation psychologique avec l’Etat français.
La stratégie créée par Hichem Aboud pour atteindre Khaled Nezzar est simple mais non dénuée de graves incohérences. Elle consiste à entacher le passé révolutionnaire de la famille Nezzar en prétextant, à partir des mémoires de celui-ci, que le père de l’ancien chef d’état-major de l’ANP était un militaire engagé de longue date dans les rangs de l’armée française et, deuxièmement, que Nezzar a bénéficié de toutes les largesses de l’Etat colonial pour accéder aux écoles militaires françaises. Dans le même temps, Hichem Aboud revendique une famille révolutionnaire exemplaire et exempte de toute souillure, puisque (dixit) : «Aucun Aboud n’a porté l’uniforme de l’armée française», cette famille étant connue dans une wilaya algérienne de l’est (Oum El-Bouaghi) comme «profondément révolutionnaire» (sic).
Cette remarque exhibée par Hichem Aboud appelle plusieurs interrogations. Tout d’abord, doit-on considérer ces propos comme une insulte à la France ? Dire que les Aboud n’ont jamais porté l’uniforme des Français comporte bien une signification particulière qu’on ne peut manquer de relever sur le ton de l’insulte à la terre qui lui a permis de fuir l’Algérie. En exhibant un nationalisme prétendument et purement algérien, Hichem Aboud verse dans le reniement total de la terre qui a hébergé son activisme, la France. Il n’est pas question, ici, de tenir un cahier des comptes que Hichem Aboud devrait à la France, mais il demeure incontestable qu’insulter l’honneur d’une famille algérienne, les Nezzar, en invoquant un argument qui ne peut que se retourner contre lui, Hichem Aboud aura du mal à défendre le purisme de la cause des Aboud. Pourquoi encore ?
Il est une vérité connue de l’histoire de la Guerre d’Algérie que l’appartenance à l’armée coloniale n’a jamais été une cause de non-engagement dans la Révolution algérienne. Bien au contraire, ce sont des anciens militaires aguerris de la Seconde Guerre mondiale et de la Guerre d’Indochine qui, ayant déserté l’armée française, ont formé dans bien des cas les combattants de l’ALN. Avoir été militaire français, ou bien même fonctionnaire civil, n’a pas constitué en soi un obstacle pour le FLN qui avait besoin des cadres. Sinon, doit-on encore reprocher à Abane Ramdane d’avoir passé le baccalauréat ? Le purisme fallacieux de Hichem Aboud chanté de Lille ne correspond absolument pas à la réalité historique.
De plus, prétendre comme on l’entend souvent qu’il existe des nationalistes de la première heure et d’autres qui seraient venus au combat après est encore un facteur de division plus qu’autre chose. Comment peut-on penser que tous les Algériens âgés de 15, 16 ou 20 ans allaient se réveiller en 1954 d’un seul homme contre le pouvoir colonial ? Si des gens sont venus tard au combat ou même pas du tout, en combattant dans le cœur, c’était tant mieux pour la Révolution ; il n’a jamais existé de révolution mathématique. Chacun sait que dans chaque famille dite révolutionnaire, il y avait des récalcitrants et des gens tièdes, voire opposés au combat du FLN. Et combien de révolutionnaires de la première heure, issus de familles n’ayant jamais porté l’uniforme des Français, ont fini par trahir le FLN et ses idéaux ? L’argument de Hichem Aboud n’a aucun sens, sinon celui de se prévaloir d’un statut de combattant pur qui, normalement, n’aurait pas dû le mener, lui et sa famille, en France.
Comment Hichem Aboud peut-il justifier en toute logique ce purisme révolutionnaire ou son nationalisme immaculé au pays qui, très certainement, a fait beaucoup pour sauver et sauvegarder sa famille et ses enfants ? Il existe donc bien un nationalisme algérien misérabiliste, dont il est un représentant, qui consiste à chercher des poux sur la tête de chaque Algérien en exhibant misérablement les prétendues fortunes de chacun, comme si les Nezzar étaient aussi nantis que les Rothschild ou étaient cités en tête des palmarès de Forbes. Honnêtement, en attendant ses «révélations», on s’attendait à quelque chose d’énorme, de gigantesque, un mélange de Rockefeller, Onassis, Soros ou encore de Rebrab, Haddad et Kouninef, nous n’avons eu droit qu’à un appartement en Espagne – les Algériens lambda qui ont acquis des appartements en Espagne moins chers qu’un F3 à Aïn Naâdja ou Bab Ezzouar se comptent par centaines – et des biens sur les hauteurs d’Alger, quelques terres encore.
Pour tout connaisseur du monde économique, il n’y a pas de quoi remuer ciel et terre, surtout de la façon dont Hichem Aboud dénonce l’acquisition légale de biens, depuis la France. Misérabilisme du nationalisme algérien donc. En effet, il est navrant de constater que depuis la France, de prétendus nationalistes algériens déversent chaque jour des propos fielleux sur d’anciens responsables algériens, espérant obtenir ainsi l’assentiment de la nation algérienne. Se réfugier derrière le peuple algérien, qui souffre autant de ses élites amorales, pour assouvir un désir de vengeance personnelle, relève bien de cette pathologie du complexé qui a perdu le sens de la dignité, même envers une France qu’il déteste et qu’il adore au gré de ses intérêts misérabilistes.
A. K.
Comment (18)