Que veut la France ?
Par Anouar Macta – Il y a des gestes diplomatiques qui relèvent de la maladresse et d’autres qui trahissent une stratégie. Les récentes sorties d’Emmanuel Macron à l’égard d’Alger appartiennent clairement à la seconde catégorie. Car, enfin, comment expliquer cette succession de piques, d’initiatives biaisées et de signaux hostiles ? Faut-il y voir la simple humeur d’un président aux abois ou l’expression d’une politique concertée ?
L’Algérie, depuis quelques années, a inversé le rapport de force. Assise sur des ressources stratégiques, au carrefour énergétique euro-méditerranéen, et forte d’un réseau diplomatique actif en Afrique, elle n’a plus à tendre la main à Paris. Ce renversement est insupportable à une France qui, dans sa mémoire coloniale, conserve l’illusion d’un magistère moral sur Alger. L’Elysée peine à digérer que ses injonctions n’aient plus d’effet.
La méthode Macron est connue : user de la provocation pour tester la réaction. Une «note» qui fuit vers la presse, un propos ambigu, une remise en cause des accords tacites… autant de manœuvres destinées à créer un climat d’irritation, dans l’espoir de pousser l’Algérie à la faute diplomatique. Cette agitation, loin d’être improvisée, répond à un calcul : rallier, à peu de frais, une opinion française travaillée par les discours anti-immigration, en désignant Alger comme partenaire «difficile» voire «hostile». C’est la vieille recette : transformer la politique étrangère en posture électorale intérieure.
Mais il y a un autre motif, plus structurel : la France ne veut pas perdre définitivement son accès privilégié au marché algérien, ni être marginalisée dans la compétition énergétique qui se joue entre l’Italie, l’Espagne, l’Allemagne et, désormais, les Etats-Unis. En crispant la relation, Paris espère forcer la négociation en position de force. Problème : cette stratégie présuppose que l’Algérie ait encore besoin de l’ancienne métropole. Or, tout indique le contraire.
La vraie question est donc : que cherche la France ? A sauver la face ? A détourner l’attention d’un déclin qu’elle refuse de nommer ? Ou à tester jusqu’où Alger est prêt à aller pour préserver un canal de dialogue ? Quelles que soient les réponses, une chose est claire : cette politique agressive, en croyant isoler l’Algérie, ne fait qu’isoler la France.
A. M.
Comment (6)