Le contenu du message de Bouteflika est en décalage avec les nouvelles réalités politiques du pays

Face à la difficulté, liée à son état de santé, de s’adresser directement et de vive voix aux électeurs, le candidat Bouteflika a été contraint de délivrer, ce samedi, un message dont la lecture, monotone, par une journaliste, à l’ouverture du journal télévisé de 20 heures, a pris une bonne vingtaine de minutes. Il s’agit sans doute de la déclaration annoncée par des membres du staff électoral de Bouteflika et dont certains pensaient qu’elle serait faite oralement. C’est donc, plutôt, par un message écrit que s’est exprimé le candidat à la veille de l’ouverture officielle de la campagne électorale. Cette façon de communiquer confirme son absence physique en public durant cette campagne électorale, dont se chargeront les membres de son staff. Ces derniers ont donc déjà, dans ce message, au contenu défensif, un canevas des interventions qu’ils feront pour le compte d’un quatrième mandat pour Bouteflika. D’abord, il y a l’argument de ce que l’on ne peut éviter d’appeler la «légitimité révolutionnaire». C’est, finalement, sur son passé historique que le candidat Bouteflika fonde sa candidature à un quatrième mandat. Il y a également les termes de la réponse à ceux qui affirment que la santé du Président ne lui permet pas d’assumer les contraintes qu’impose la présidence de la République, résumées par une personnalité politique qui connaît bien cette fonction puisqu’il s’agit de Liamine Zeroual, qui a parlé de «lourde et délicate charge, autant morale que physique». Sans aller jusqu’à dire qu’il est en bonne santé, comme se sont efforcés de le faire croire ses soutiens, le président Bouteflika estime toutefois que ce qu’il décrit comme des «difficultés liées à ma santé physique actuelle» ne l’empêcheront pas de faire face aux obligations de la fonction présidentielle. Il n’a visiblement pas tenu compte des appels qui lui ont été lancés, très souvent d’ailleurs sans aucune hostilité, pour qu’il renonce à briguer un quatrième mandat en considération de son état de santé constaté par tous lors de ses rares apparitions sur les écrans de télévision, et particulièrement lorsqu’il a présenté son dossier de candidature devant le Conseil constitutionnel. Il est évident que son entourage ne lui a fait part, exclusivement, que des «appels qui lui ont été adressés l'exhortant à se porter candidat à la prochaine élection présidentielle». C’est d’ailleurs dans cette direction qu’il a adressé son message qui contient, comme dans toute campagne électorale, quelques promesses dont celle, tardive, il faut le reconnaître, concernant «l'édification d'un modèle de gouvernance répondant aux attentes et espérances de notre peuple», sans plus de détails, sauf que cela se fera à travers une nouvelle révision de la Constitution dès cette année, s’il est élu, tient-il à préciser. Il promet vaguement à la jeunesse, impatiente et qui souhaite majoritairement l’alternance, qu’elle prendra le relais. Il évoque les «divisions suscitées et entretenues» en ignorant leur caractère conjoncturel qui est directement lié au risque de rater la possibilité de réaliser l’alternance au pouvoir à cause du quatrième mandat. En résumé, le message ne contient rien qui puisse faire changer d’avis les opposants au quatrième mandat. Au contraire, il n’est pas exclu qu’il provoque le désenchantement chez beaucoup de ses partisans, lassés d’entendre de faux arguments. Le contenu du message du président-candidat à un quatrième mandat est en décalage criant avec les nouvelles réalités politiques du pays révélées par l’«effervescence» que connaît la société algérienne.
Kamel Moulfi

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