Un lapsus néocolonial
Par Maya Loucif – France Info, la radio publique française, a commis ces derniers jours un article dithyrambique sur la politique africaine du Makhzen, en s’autorisant des allégations à l’encontre de l’Algérie qui confirment l’alliance entre Paris et Rabat dans les tentatives permanentes de recolonisation de l’Afrique. «Le roi Mohammed VI fait de l’Afrique la profondeur stratégique, économique et diplomatique du Maroc (…). Cette montée en puissance gêne l’Algérie, bien sûr, mais aussi l’Afrique du Sud qui se voit comme le leader naturel du continent africain.»
Le commun des mortels savait que la France officielle entretient des relations privilégiées avec le Maroc, son ancien protectorat, au bénéfice duquel elle bafoue le droit international, abusant de son veto systématique au Conseil de sécurité de l’ONU contre l’autodétermination du peuple sahraoui. Ce n’est donc pas par hasard que France Info cible deux Etats africains particulièrement jaloux de leur indépendance et de celle de tous les pays du continent. Une position qu’Alger et Pretoria démontrent dans leur soutien indéfectible au combat légitime des Sahraouis et de toutes les initiatives souverainistes anticoloniales.
Personne n’ignore non plus le type et le volume des investissements français sur le territoire hospitalier du royaume chérifien dont la population autochtone est de plus en plus pauvre, derrière les hauts murs de vastes propriétés françaises aux villas cossues et jardins paradisiaques, dans lesquelles le prolétariat marocain gagne difficilement sa croute et livre femmes et enfants mineurs corvéables à merci. Les Marocains souffrant au quotidien de ce féodalisme économique où les richesses du pays restent entre les mains de la famille royale plus généreuse avec son protecteur français qu’au profit de ses sujets.
C’est pourquoi la publication d’articles d’une infecte complaisance envers le Makhzen, sur le site d’une radio publique française, pue la manipulation de l’Etat français. En vantant le docile protégé marocain au détriment du rebelle algérien, la France se prête à un jeu d’une autre époque. Les Africains ne sont plus ni des indigènes ni les valets d’une métropole qu’on pourrait dresser les uns contre les autres.
Le Quai d’Orsay aura beau mandater son monarque de service pour «ré-apprivoiser» les peuples libres du continent meurtri pendant des siècles de colonialisme, cela ne servira à rien. L’Afrique restera résolument africaine et mettra en échec le retour des colons, en comptant l’Algérie parmi l’écrasante majorité des pays disposés à défendre les indépendances chèrement acquises.
M. L.
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