Ces morts qu’on ne laisse pas reposer en paix

martyrs
Cimetière de martyrs de Bourokba (Relizane). D. R.

Par Mohamed Bengasmia-Chadly – Les membres du Comité d’initiatives et de vigilance citoyennes d’Oran se sentent outragés et indignés par la débaptisation de l’Ecole de formation de pêche Hagani-Khelladi-Zoubida, de Beni-Saf, une enfant de la ville et une moudjahida.

Cette débaptisation récente dans la wilaya d’Aïn Témouchent ne peut nous laisser indifférents et c’est un hommage à la mémoire de cette remarquable dame qui a sacrifié sa courte vie à la formation à l’Université d’Oran Es-Senia de centaines de cadres du pays, menant aussi avec son immense stature des actions responsables en faveur des déshérités et des laissés-pour-compte.

Militante sociale, elle était à la pointe de tous les combats pour les libertés publiques et individuelles, la lutte contre l’analphabétisme, l’exercice de la citoyenneté et l’épanouissement de la femme algérienne et le combat contre toutes les formes de violences faites aux femmes.

Sa disponibilité pour les actions culturelles visant la revalorisation de notre patrimoine populaire ainsi que sa présence et sa disponibilité nous ont toujours incités à aimer notre pays en luttant contre l’obscurantisme et pour l’établissement d’un véritable projet de société.

Même morte, Hagani Khelladi Zoubida dérange encore ceux qui ne tolèrent aucun partage des valeurs d’humanité, de générosité et de tolérance et qui sont responsables de la glaciation du champ politique, du musèlement de la liberté d’expression et des libertés tout court que le système a engendré et qui continue à pourrir le climat politique en s’attaquant aux symboles du savoir, de la tolérance et de l’amour incommensurable que cette dame portait pour son pays, si ce n’est imposer leurs idées rétrogrades en ce qui concerne l’avenir du pays.

A ce devoir de mémoire, nous interpellons toutes les autorités du pays, tous les citoyens épris de justice pour s’opposer par tous les moyens à cette débaptisation irresponsable et fallacieuse afin d’empêcher à l’avenir que n’importe qui ne s’érige en censeur au gré de son humeur partisane tout en se servant des armes de la république pour détruire des pans entiers de notre mémoire.

Il est aussi de notre devoir de rappeler à ces «augustes serviteurs de l’Etat» que la plus grande immoralité, c’est de faire un métier qu’on ne sait pas. Enfin, ce n’est pas l’effacement d’un nom sur le fronton d’une école qui ferait occulter leur incapacité à résoudre les problèmes combien épineux du chômage, du délabrement des services publics, du mal-vivre des Algériens, de la corruption endémique, de la déliquescence des systèmes d’éducation, de formation, de santé, etc.

M. B.-C.

Comité d’initiatives et de vigilance citoyennes (Civic, Oran)

Commentaires

    MELLO
    2 août 2017 - 12 h 44 min

    La révolution algérienne, comme le sont toutes les révolutions universelles, comporte une part de violence. De la même manière que la Révolution française a enfanté le régime de la terreur, le Front de libération nationale (FLN historique) a connu des moments sombres. En partie, cela pourrait s’expliquer par les impératifs historiques. Mais, une fois le but atteint, à savoir la fin du joug colonial, est-ce que cette violence est justifiable ?. Hélas, bien que le discours officiel fasse de la libération du peuple un principe immuable, tous les dirigeants ne se préoccupent pas de l’avenir du peuple algérien. Pour contrôler les rênes du pouvoir, certains dirigeants n’hésitent pas à utiliser la violence contre leurs collègues. Or, tout le problème est dans la démarche. Ainsi, si pour les révolutionnaires de 1954 il fallait associer le peuple à leur action pour se débarrasser du joug colonial, les régimes post-indépendance écartent systématiquement le peuple de la gestion de ses affaires. D’où l’échec. Et aussi le rêve brisé.

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