Assumez !
Par R. Mahmoudi – Après le quiproquo à couteaux tirés qui a opposé, pendant plus d’une semaine, le Premier ministre à ses deux principaux partenaires, le patronat et l’UGTA, l’heure est aujourd’hui aux leçons à en tirer pour faire l’économie d’autres crises à l’avenir ou d’autres soubresauts dont le pays se passerait bien volontiers, à l’orée d’échéances politiques importantes et dans un contexte géopolitique toujours aussi sensible.
Tous les protagonistes de la crise sont appelés à œuvrer au maintien de la stabilité et à outrepasser les calculs politiciens étroits et les coups «au-dessous de la ceinture» qui ne sont pas faits pour relever le moral ou ressusciter l’espoir chez les Algériens. Au contraire, cette mise en spectacle d’un désaccord politique dans laquelle une bonne partie des médias, y compris publics, s’est joyeusement et aveuglément impliquée, a été reçue par une majorité de citoyens comme un motif supplémentaire justifiant leur désarroi et leurs inquiétudes.
Sur le fond, le commun des Algériens conviennent que les trois partenaires partagent la responsabilité dans la situation actuelle dans laquelle se trouve le pays et doivent reconnaître les erreurs commises par chacun, abstraction faite des intérêts de groupe ou même de la guerre de positions qui continue, en filigrane, à jalonner la course au pouvoir. Sur ce plan, non seulement aucune des trois parties n’a encore fait son autocritique mais, plus grave, toutes essaient d’éluder – ou de refouler – le problème sans en assumer naturellement les conséquences.
La première responsabilité incombe évidemment à l’Exécutif, qui donne l’impression de découvrir seulement aujourd’hui la présence encombrante d’hommes d’affaires dans les cercles de décision politique. Or, si l’Etat avait réellement encouragé l’investissement, comme le prétendent les différents gouvernements dans leurs discours, le pays ne se serait pas retrouvé avec une poignée d’hommes d’affaires mais des milliers qui auraient pu tirer l’économie vers le haut.
Car c’est bien les situations de monopole qui ont aidé un quarteron d’opérateurs à s’imposer dans la sphère très fermée des intermédiaires du pouvoir politique, puis à se constituer en caste et en oligarchie, alors que leur apport aux efforts d’investissements ne cesse de s’étioler. Leur expansionnisme s’est étendu à toutes les institutions, à commencer par les partis politiques et les assemblées élues. Le pouvoir de l’argent s’est profondément incrusté dans le maillage institutionnel.
Tout cela s’est fait avec la bénédiction des autorités politiques pendant des années. Ce n’est que suite à la multiplication des affaires de corruption et de scandales, dont l’affaire Tahkout a été le point culminant, que les pouvoirs publics ont décidé de réagir.
Le gouvernement pouvait lancer sa campagne d’assainissement du secteur privé, si tel était son credo, sans avoir à provoquer de nouvelles fractures et sans s’exposer aux pressions de ceux-là mêmes qu’il veut neutraliser.
R. M.
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