L’emballage du muséologue

CAN musique
La CAN-2019 a fait vibrer des millions d'Algériens. PPAgency

Par Saadeddine Kouidri – Le chant et la musique comme le théâtre, les arts en général font naître des émotions, des vibrations par leurs critiques positives, négatives ou parfois «objectives» de leur société.

Dans la sphère du Sud des années 60, les arts se solidarisaient du Mouvement de libération nationale poussant les germes de la contestation sociale après l’Indépendance pour les plus engagés. Comment fait-on pour dissocier la musique du champ politique et, surtout, pour quelle raison, sont deux questions que je pose lors de ma visite à l’exposition «Paris-Londres. Music Migration», au Musée de l’histoire de l’immigration.

Le produit culturel ne pouvant être que du domaine public, une fois privatisé, va tomber dans des travers. Tout le monde comprend qu’en contrepartie de sa médiatisation, un travail de transformation des arts en produits commerciaux, se fait pour la grande consommation. Cela répond à la  rentabilité financière qui est le premier souci du commerçant, mais c’est loin d’être celui d’un musée, sauf si ce musée reste toujours dans sa vocation première, celui de la colonisation dont  l’intérêt est, dans ce cas, sa poursuite par la guerre des mémoires, de l’histoire. Il reste que seul un musée peut anoblir un produit commercial et lui donner une âme étrangère à ses origines, celle de la contestation, de la revendication, de la révolte, de la révolution ; celle des libertés pour en faire un fétiche. Le muséologue, tout en détournant l’art de sa vocation a, dans ce cas, le mérite de transformer un produit de masse souvent périmé en un produit de luxe.

Aujourd’hui(*), nous allons encore gagner le match de la Coupe d’Afrique des nations, non pas contre le Sénégal dont les joueurs ne vont certainement pas démériter, mais contre la réaction algérienne et égyptienne, la droite française surtout, celle des Le Pen et consorts, d’anciens tortionnaires qui misent sur notre perte. La coupe continentale n’a jamais été un enjeu sportif mais politique. La présence de Total comme sponsor est suffisante pour prouver la néo-colonisation de l’Afrique.

Le coup franc de Riyad Mahrez face au Nigeria était non seulement le but d’un joueur talentueux, mais celui d’un joueur porté par tout un mouvement, celui de la contestation pacifique en Algérie. Ce football fait vibrer la société plus qu’aucun autre art. Le secret est dans la performance des joueurs. Le football est le sport ou tout le corps se transforme en un instrument du ballon, et l’équipe en un instrument du peuple. Cette magie spécifique procure toujours de la joie et beaucoup d’émotion proportionnelle à l’enjeu. Sport et musique mènent souvent à la politique et le musée, comme la S. M. (Sécurité militaire) d’hier, n’y peut rien.

S. K.

(*) Texte rédigé avant la finale de la CAN

Ndlr : Les opinions exprimées dans cette tribune ouverte aux lecteurs visent à susciter un débat. Elles n’engagent que l’auteur et ne correspondent pas nécessairement à la ligne éditoriale d’Algeriepatriotique.

Commentaires

    Elephant Man
    24 juillet 2019 - 19 h 38 min

    Je rebondis sur l’expo Paris-Londres. Music migrations, que je ne connais absolument pas.
    Londres →→ automatiquement je pense à Asian Dub Foundation et notamment l’album Conscious/ Conscious Party et la song Asssassin, groupe que j’ai vu en live à 2 reprises courant 90-2000. Il me semble qu’ils ont même fait un live autour du film la Bataille d’Alger.
    Pour la petite histoire j’ai même une picture de moi des années 2000 en t-shirt Asian Dub Foundation aux monts Megrès et Matrona ????

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