Mépris et mensonges
Par Abdelkader S. – En affirmant que l’armée «n’a pas de candidat», Gaïd-Salah insulte l’intelligence des Algériens. Un mensonge de plus dans une gigantesque imposture dont la trame a été tissée bien avant la déchéance de Bouteflika.
Il n’est un secret pour personne, désormais, que les prolongations ont été sifflées depuis le début du quatrième mandat, lorsque le généralissime s’est rendu à l’hôpital militaire de Val-de-Grâce, à Paris, pour empêcher toute tentative d’appliquer l’article de la Constitution qui stipule l’empêchement après la maladie de Bouteflika. Gaïd-Salah, dont le sort dépendait de celui qui l’a fait roi, avait tout mis en œuvre pour qu’il continuât à occuper le poste, quitte à déléguer ses prérogatives à son frère, l’essentiel étant qu’il ne fût pas touché aux intérêts du chef de l’armée et, surtout, à sa double fonction alogique.
Le candidat de l’armée qu’il incarne aujourd’hui était déjà inscrit sur ses tablettes depuis qu’il a décidé de préparer la succession de Bouteflika de sorte à sacrifier une partie du clan pour sauver les meubles. La guerre secrète qui s’était déclarée entre Bouteflika et Gaïd-Salah par frère et Premier ministre interposés était, à vrai dire, le prélude à la confrontation ouverte qui fait rage actuellement. Le Président a été déboulonné, Saïd Bouteflika emprisonné, Toufik et Tartag neutralisés. Il ne restait à Gaïd-Salah et à ses mentors qu’à passer à l’étape suivante qui consiste à aller vers des élections truquées «dans les plus brefs délais» pour remettre les clés d’El-Mouradia à celui qui a juré par tous les dieux que «le programme de Bouteflika se poursuivra».
Seulement, tout ne s’est pas passé comme prévu. Dans les calculs effectués par les stratèges sur lesquels s’appuie le dictateur, un chiffre important a échappé à leur vigilance : le peuple. Le peuple qui n’en pouvait plus d’être le dindon de la farce, retranché majoritairement dans une espèce de fatalisme pendant que des révoltes sporadiques et éparses dérangeaient de temps à autre la sérénité d’un régime sans foi, ni loi.
La rue a grondé, et le plan que Gaïd-Salah exécute s’en est trouvé quelque peu chamboulé, mais pas au point d’être passé à la déchiqueteuse. Le pouvoir est au milieu du gué, piégé par une montée des eaux qui l’engloutira tôt ou tard, accroché qu’il est à un tronc emporté par le courant qui le conduit droit vers une cascade abrupte, d’où sa chute n’en sera que plus dure.
A. S.
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