La dérive dictatoriale du général Ahmed Gaïd-Salah a commencé en juin 2016
Par Abdelkader S. – Les prémices de la dérive dictatoriale de Gaïd-Salah se sont manifestées depuis plus de trois ans et ont précédé la guerre larvée des clans qui avait mis aux prises Bouteflika et son vice-ministre de la Défense et qui avait pour raison irrévélée la répartition de la rente.
En juin 2016, lorsque des voix parmi les généraux à la retraite commençaient à s’élever pour dénoncer la double casquette de chef d’état-major et de vice-ministre de la Défense nationale, Gaïd-Salah, alors dépourvu des attributions illimitées qu’il s’octroiera après son coup d’Etat déguisé du 3 avril 2019 et ne jouissant pas d’une assise légale suffisante pour sévir contre ses pourfendeurs, avait tout de même réussi à faire accepter par l’ex-président Bouteflika qu’une loi portant sur l’obligation de réserve fût votée par le Parlement croupion. Cette loi, passée en deux temps trois mouvements, avait pour objectif de faire taire tout officier à la retraite qui critiquerait la conduite de Gaïd-Salah et sa gestion hasardeuse de la très sensible question de la défense nationale.
Depuis l’usurpation du pouvoir par Gaïd-Salah et les quelques généraux qui lui sont affidés, l’homme fort de l’armée s’est attelé, dès le lendemain de la démission forcée de Bouteflika, à régler ses comptes avec ceux qui l’ont gêné dans sa démarche sous l’ancien chef de l’Etat et qui étaient donc susceptibles d’entraver ses plans dont il préparait l’exécution depuis la réunion du Val-de-Grâce.
Les généraux Hocine Benhadid, Mohamed Mediene dit Toufik, Ali Ghediri et Khaled Nezzar constituaient une véritable menace pour Gaïd-Salah, si bien que leur emprisonnement était, à ses yeux, la seule manière de les neutraliser. Les quatre officiers qui ont eu à occuper des fonctions stratégiques au sein de l’armée – et du gouvernement s’agissant de Khaled Nezzar – pouvaient, s’ils n’étaient pas réduits au silence, freiner le chef d’état-major dans son ambition démesurée qui visait à maintenir Bouteflika au pouvoir – même sur une chaise roulante –, en ce sens que sa déchéance aurait immanquablement entraîné sa propre chute. Puis, quand le peuple s’est soulevé et a exigé le départ de Bouteflika, Gaïd-Salah s’est servi du Mouvement de contestation populaire pour se débarrasser du boulet Bouteflika, pérenniser le système et, ainsi, tirer son épingle du jeu.
La manœuvre avait réussi jusqu’à ce que la mort en décidât autrement.
A. S.
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