Pourquoi le président Tebboune a refusé de recevoir le Libyen Aguila Saleh
Par Karim B. – Dans son interview de ce dimanche, le président Tebboune a répondu de manière claire, quoiqu’indirecte, aux agissements de l’Egypte et des autres sponsors qui soutiennent Khalifa Haftar. En affirmant que l’Algérie refusait le fait accompli et les demandes de soutien de la part de ceux qui n’ont pas consulté la partie algérienne, le chef de l’Etat pointait du doigt le président égyptien, Abdelfattah Al-Sissi, et son initiative unilatérale qui a consisté à inviter le chef de l’armée nationale libyenne, Khalifa Haftar, et le président du Parlement de Tobrouk, Aguilla Saleh.
Pour Alger, en effet, il n’y a qu’un seul cadre pour le règlement de la crise libyenne : celui du processus de Berlin, placé sous l’égide de l’ONU, dans lequel l’Algérie est partie prenante, ne déviera pas de sa posture d’équidistance vis-à-vis des parties belligérantes et ne se rangera pas aux côtés de l’une contre l’autre.
Tebboune a, en outre, mis en garde contre l’aventurisme et les dangers d’embrasement pour la Libye, ainsi que pour les pays du voisinage, qui découleraient de l’armement des tribus libyennes, estimant que cela conduira inéluctablement à la somalisation du pays et constitue un appel d’air à tous les terroristes de la région et aux trafics transfrontaliers d’armes, notamment. Ce jeu dangereux de l’Egypte contribue à l’escalade, alors que ce pays, qui adopte une posture feinte, n’arrête pas d’appeler à la désescalade.
«C’est pour ces raisons que la visite d’Aguila Saleh a été reportée», ont révélé des sources proches du dossier à Algeriepatriotique. La visite du président du Parlement de Tobrouk en Algérie visait notamment à solliciter le soutien ou, du moins, la compréhension des autorités algériennes en ce qui concerne les initiatives de l’Egypte et, éventuellement, d’user de l’influence de l’Algérie auprès de la Turquie et de l’homme-lige des Emirats arabes unis, Khalifa Haftar, afin que la bataille de Syrte n’ait pas lieu», précisent nos sources.
Une source diplomatique a affirmé récemment que les autorités algériennes avaient fait savoir qu’elles s’opposaient avec vigueur aux démarches turque et égyptienne qui cherchent l’embrasement en Libye et dans la région tout entière. «L’armement des tribus en Libye ne fera qu’envenimer la situation en ce sens qu’il ajoute un élément armé au conflit déjà complexe», avait indiqué la source diplomatique algérienne, en ajoutant que «rien ne garantit» que ces armes que Le Caire et Ankara fournissent aux belligérants en Libye «ne tombent pas entre les mains des groupes armés terroristes dans la région du Sahel, notamment dans les zones contrôlées par les tribus dont l’influence s’étend au sud, à Ghât et Ghadamès».
L’exacerbation de la situation dans ces zones «vitales» constitue une «sérieuse menace» pour la sécurité de l’Algérie, avait fait savoir la source diplomatique, qui avait précisé que «tout changement des règles et des acteurs dans le conflit libyen fera peser de gros risques sur la stabilité de l’Algérie» qui rejette de façon catégorique la décision du président égyptien, Abdelfattah Al-Sissi, d’alimenter le brasier libyen en armant à son tour une des parties au conflit pour y contrer la Turquie dont le Parlement a adopté une résolution autorisant l’armée turque à intervenir sur le sol libyen. Ce que l’Algérie rejette d’une manière tout aussi ferme.
K. B.
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