Les journalistes de l’ENTV écrivent à Tebboune : «La situation au sein de notre entreprise est explosive»
Par Mounir Serraï – Dans une lettre adressée au président Abdelmadjid Tebboune, les journalistes de l’Entreprise publique de télévision (EPTV) dénoncent l’absence de tout changement éditorial, conformément à la volonté exprimée par le chef de l’Etat.
«Monsieur le Président, nous ne revendiquons pas la vérité absolue, mais ce que nous allons vous présenter comporte de nombreux faits que nous essayons de formuler brièvement, après avoir vu toutes les portes se refermer sur nos visages et nous dénonçons d’ores et déjà le directeur général qui n’a pas pris la peine d’unir les femmes et les hommes de ce média en un mouvement collectif pour l’élever à ce qui est de meilleur et de plus efficace pour mieux faire face aux grands enjeux auxquels est confronté notre pays. Des enjeux qui nécessitent beaucoup de compétence et de sobriété, la capacité à faire exploser les énergies potentielles et l’exploitation rationnelle des compétences humaines et des capacités matérielles», écrivent-ils, affirmant que le nouveau manager de l’ENTV, nommé le 27 janvier dernier par le président Tebboune lui-même, n’a pas été à la hauteur de la mission qui lui a été confiée.
Les auteurs de la lettre assurent que ce nouveau directeur reproduit «les mêmes pratiques passées dans toutes leurs dimensions organisationnelles et professionnelles : marginalisation, exclusion, règlement de comptes, loyauté, favoritisme, dédain…» Des pratiques, insistent ces journalistes, «qui ont sapé tous les efforts visant à lui redonner sa crédibilité devant l’opinion publique». «Six mois après la nomination du nouveau directeur, nous regrettons de vous faire part de la triste situation qui prévaut au sein de notre institution, situation dont nous craignons qu’elle conduise à une explosion, du fait de la gestion actuelle d’une institution souveraine de la taille de la Télévision algérienne».
«Ce que nous avons remarqué, c’est que l’image commercialisée pour la nouvelle Algérie est très fanée et le discours médiatique préserve encore la langue de bois d’avant le 22 février. L’actuel directeur général insiste pour suivre ses prédécesseurs», dénoncent-ils, accusant ainsi l’actuel directeur de s’opposer à la volonté des journalistes de revenir à la réelle pratique journalistique, avec une information objective et variée. «Les journaux télévisés sont rares, loin des aspirations du peuple algérien et de vos aspirations en tant que premier Président après la révolution populaire pacifique. Le journal de 20 heures reflète encore un contenu stéréotypé, loin de l’esprit de changement voulu par la Présidence», ajoutent-ils, soulignant dans ce sillage que la Télévision publique continue, entre autres, d’accueillir des personnalités politiques qui ne sont pas à la hauteur des défis actuels et futurs, tout en excluant les autres, notamment les jeunes.
«Nous sommes face à un directeur général qui n’accepte pas les critiques, refuse le langage du dialogue fructueux et tente de diluer toutes nos initiatives visant à discuter de ce que nous avons évoqué précédemment, en nous menaçant à travers, notamment, le directeur des ressources humaines qui l’a nommé au poste malgré son absence pendant 12 ans de l’institution et a continué à percevoir son salaire, sans interruption», relèvent-ils, considérant qu’il est urgent d’apporter les changements nécessaires à la refonte totale de la Télévision publique pour qu’elle puisse se hisser aux standards universels.
M. S.
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