On rase gratis
Par Mrizek Sahraoui – Un nouveau Sommet du Groupe des sept pays industrialisés (G7) s’est tenu ce vendredi auquel a, bien entendu, participé le président américain, Joe Biden. Les sujets phares évoqués à l’occasion de cette rencontre virtuelle, menée par le Premier ministre britannique, Boris Johnson, ont un lien direct avec l’actualité, à savoir la réponse à apporter collectivement à la pandémie liée au coronavirus et le partage des vaccins. Auquel s’ajoute l’application de la promesse du nouveau président américain de rompre avec la politique de son prédécesseur en revenant au multilatéralisme, mis à mal tout au long du mandat Trump.
Bien sûr qu’il faut applaudir toutes les démarches visant à réduire les inégalités entre les pays riches et les pauvres. Singulièrement, à l’occasion de cette pandémie qui a accentué les déséquilibres entre les nantis, lesquels ont englouti la quasi-totalité des vaccins produits, et les plus vulnérables, incapables, eux, de relever le défi d’une vaccination de masse au regard de la cherté du vaccin et de la logistique complexe l’accompagnant.
Raison pour laquelle, dès avril dernier, l’OMS avait mis en place le dispositif Covax pour assurer une distribution équitable des vaccins. D’ailleurs, tout juste après l’annonce par Pfizer/BioNTech de la découverte d’un vaccin anti-Covid, le patron de l’OMS, Tedros Adhanom Ghebreyesus, avait émis le souhait que toute «avancée scientifique bénéficie à tous les pays».
C’était à mi-novembre, plusieurs mois après que le président français, jouant le bon Samaritain, appelle à une aide de la France et de l’Europe à l’Afrique pour lutter contre le coronavirus en «annulant massivement sa dette», avant qu’il ne se rétracte quarante-huit heures plus tard, ne parlant alors plus d’annulation de la dette des pays africains – un objectif, avait-il tempéré – mais d’une suspension des échéances de payement auprès des créanciers. La suite immédiate, on la connaît : la solidarité mondiale tant vantée dans les discours a été battue en brèche par le nationalisme vaccinal.
D’autres promesses viennent d’être formulées à l’occasion du Sommet du G7 de ce vendredi, auquel n’ont participé que les pays membres (Etats-Unis, France, Royaume-Uni, Allemagne, Canada, Italie et Japon) – ni la Russie ni la Chine n’y ont invitées, la preuve d’un multilatéralisme vu sous le prisme occidental. Une aide de 7,5 milliards de dollars est annoncée pour la vaccination. Emmanuel Macron a, lui, plaidé en faveur de la rétrocession de 3 à 5% des doses des pays riches en faveur de l’Afrique «très vite, et que les gens les voient arriver sur le terrain».
A la proposition du président français s’ajoute l’annonce de Joe Biden officialisant une aide à hauteur de 4 milliards de dollars au programme Covax et la contribution de l’Union européenne qui promet de doubler son don pour le porter à un milliard d’euros.
Des promesses insuffisantes, selon de nombreuses ONG qui, elles, insistent sur la nécessité de rendre les vaccins accessibles à tous par la levée des droits de propriété intellectuelle sur les vaccins. Une initiative qui, si elle prend corps, permettra à certains pays de produire eux-mêmes les sérums, bien plus efficaces qu’une aumône venant des pays riches.
Quand on sait les promesses non tenues faites par le passé, l’on est tenté de résumer l’ambitieux programme occidental d’aide aux pays pauvres, loin d’être dans les petits papiers des riches, en quatre mots : demain, on rase gratis.
M. S.
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