L’Arabie Saoudite à la rescousse du régime des Mollahs

MBS iran
Mohammed Ben Salmane. D. R.

Une contribution de Khider Mesloub – Les deux pays ennemis réactionnaires islamistes, l’Arabie Saoudite et l’Iran, viennent de sceller leur réconciliation. A la vérité, contrairement à l’interprétation énoncée par l’ensemble des médias, cette réconciliation ne revêt aucune dimension diplomatique, autrement dit elle ne répond pas à des intérêts d’ordre international. Mais à des préoccupations d’ordre intérieur national. De défense de l’ordre établi. Cette réconciliation, aussi soudaine qu’inattendue, a pour dessein de circonscrire la propagation de l’incendiaire contestation insurrectionnelle iranienne, de neutraliser l’explosion d’une révolution sociale en Iran. Certes, actuellement momentanément assoupies du fait de la brutale répression des autorités contre les manifestants (500 Iraniens tués, 14 000 arrestations, 55 exécutions), et du rude climat hivernal. Le mécontentement de la population envers la République islamique et les raisons de la révolte sont toujours bien prégnants dans le pays.

Pour autant, avec l’arrivée du printemps, le régime des Mollahs s’attend, du fait de l’aggravation de la crise économique, de la perte de valeur sans précédent de la monnaie nationale et de la flambée de l’inflation (supérieure à 50%), au resurgissement de la contestation sociale. A des manifestations massives qui ne manqueront pas de prendre une tournure politique et anti-régime. En d’autres termes, de réactiver le processus révolutionnaire impulsé au lendemain de la mort de Mahsa Amini, décédée quelques jours après avoir été arrêtée par la police des mœurs pour un voile mal ajusté.

L’Arabie Saoudite redoute par-dessus tout une révolution dans sa région. Aussi est-elle   disposée à sacrifier, provisoirement, ses intérêts internationaux, en s’alliant avec le régime des Mollahs pour éviter la poursuite des contestations politiques et sociales en Iran.

Le rétablissement de leurs relations diplomatiques, acté sous l’égide de la Chine, pays également en proie à l’agitation sociale, ne constitue nullement l’amorce d’un tournant géopolitique, mais le prélude à une coopération sécuritaire établie entre les deux régimes menacés d’implosion. A preuve, les deux pays se sont engagés, prioritairement, à ne pas interférer dans leurs affaires internes. En d’autres termes, à cesser leurs respectives menées subversives réciproques. Quoique les deux régimes ennemis soient acculés à devoir, à terme, cesser d’alimenter les guerres dans leur sphère d’influence, pour le moment il n’est nullement question de cessation des hostilités idéologiques et conflits armés commandités par les deux régimes, notamment au Yémen, en Syrie et en Irak. La priorité est à l’extinction de l’incendie protestataire allumé en Iran, à l’endiguement de la guerre sociale déclenchée par le prolétariat iranien contre le régime des Mollahs.

D’aucuns affirment que l’Arabie Saoudite permet à l’Iran de sortir de son isolement sur la scène moyen-orientale. Cette réconciliation va plutôt permettre au régime islamiste des Mollahs de s’extraire de son encerclement intérieur déclenché par une population insurgée, de desserrer l’étau de son siège mené par des protestataires subversifs.

L’heure est à la coopération et coordination policière des deux régimes islamistes. Non à la sécurisation de la région. De la cessation des conflits au Yémen, en Syrie, en Irak. Les deux régimes théocratiques n’œuvrent pas à l’instauration de la paix régionale mais à la restauration de la paix sociale, c’est-à-dire au maintien de l’ordre établi dans leurs pays respectifs, en particulier en Iran, depuis plusieurs mois en proie à des contestations sociales insurrectionnelles. A preuve, l’accord de coopération et de sécurité Iran-Arabie Saoudite de 2001 est réactivé. Il établissait la coopération entre les deux pays sur des sujets relatifs à la lutte contre le terrorisme ou la criminalité. Quand on sait que, dans ces deux régimes théocratiques dictatoriaux, toute activité politique est assimilée à du terrorisme ou de la criminalité, on comprend mieux à quelles fins répond la réactivation de cet accord sécuritaire. Et donc le rétablissement des relations diplomatiques entre ces Etats islamistes.

De même, le rétablissement des relations diplomatiques entre ces deux nains économiques ne préfigure pas l’instauration d’un nouvel ordre mondial ou bouleversement géopolitique, comme le laissent entendre nombre d’analystes. Loin s’en faut. Pareillement, ce réchauffement diplomatique calculé ne freinera pas le processus de normalisation des pays arabes avec l’entité sioniste. Ni la poursuite de la guerre généralisée en cours.

Contrairement à ce qu’affirment tous les commentaires officiels, l’heure n’est pas à la refondation d’un nouveau monde, à la naissance d’un nouvel ordre mondial matérialisé par un système multipolaire fondé sur le cadavre de l’hégémonie de l’empire américain (qui, quoi qu’on en dise, demeure dominant, et pour longtemps encore), mais à la décomposition du monde capitaliste, à la fuite en avant dans les guerres totales impérialistes. Aucun pays (ou puissance) n’est porteur d’un projet économique et social salvateur, d’un idéal politique émancipateur. Tous les pays sont enlisés dans une crise économique et institutionnelle systémique mortelle. Notamment l’Iran et l’Arabie Saoudite qui, par le rétablissement de leurs relations diplomatiques, croient pouvoir sauver leur régime théocratique condamné, au vrai, par l’histoire.

K. M.

Comment (6)

    naim
    15 mars 2023 - 10 h 24 min

    … Accusant l’Iran de réactionnaire, il ne nous dit pas en quoi consiste la réaction de ce régime. Est-ce parce que les Mollah, comme nous le répète à satiété les tenants du trotskysme, sont en désamour avec l’impérialisme américain et la culture woke et ses ravages en Occident, ce qui les exclue de la bénédiction moderniste à l’Occidentale dont ont bénéficié les bienheureux peuples de la Palestine, de l’Irak, de Lybie et du Yemen, pour ne citer que ces cas emblématiques des hautes réalisations modernistes à la sauce trotskystes saupoudrée du néolibéralisme sauvage.

    Anonyme
    13 mars 2023 - 20 h 47 min

    Vous devriez … reconsidérer vos analyses Edania. Ma3a eloua9kef et l Arabie Saoudite projette de faire partie du Brics. Elle n oubliera jamais les parlés de Trump quand il a dit : « Vous ne tiendrez pas une semaine sans notre protection ». À moins que cette entente entre les deux voisins est un prélude à une attaque contre l Iran.

    Chaoui
    13 mars 2023 - 11 h 30 min

    Dans votre brûlot anti Iran et Arabie Saoudite, on est sidéré d’y voir du 100% Soros et du Canvas quasi dans le texte…(est-ce que seulement vous êtes-vous relu !).

    Si c’est votre perception de ces deux pays, ce n’est certainement pas la mienne comme j’en suis sûr des millions d’entre nous.

    Bien que je ne porte pas l’Arabie dans mon cœur, contrairement à vous je me réjouis vraiment de cette réconciliation entre elle et l’Iran, surtout dans le contexte géopolitique international actuel…Je les en félicite de même que j’exprime un grand bravo à la Chine. Ce qui les guide ne se réduit certainement pas au seul fait religieux mais à des enjeux autrement plus existentiels. Des enjeux de civilisation loin de viser à bassement faire des ‘calculs’ pour seulement sauvegarder un régime ou un pouvoir.

    le dicton dit :
    13 mars 2023 - 10 h 13 min

    le dicton dit que deux ennemis classiques de bonne foi qui se détestaient mutuellement, peuvent déboucher à une puissante et sincère et une amitié inébranlable, et deux amis qui s’aiment beaucoup, il suffit d’une petite mésentente peut déboucher sur une haine et une discorde acharnée et durable.

    Chaoui
    12 mars 2023 - 23 h 00 min

    Dans votre brûlot anti Iran et Arabie Saoudite, on est sidéré d’y voir du 100% Soros et du Canvas quasi dans le texte…(est-ce que seulement vous êtes-vous relu !).

    Si c’est votre perception de ces deux pays, ce n’est certainement pas la mienne comme j’en suis sûr des millions d’entre nous.

    Bien que je ne porte pas l’Arabie dans mon cœur, contrairement à vous je me réjouis vraiment de cette réconciliation entre elle et l’Iran, surtout dans le contexte géopolitique international actuel…Je les en félicite de même que j’exprime un grand bravo à la Chine. Ce qui les guide ne se réduit certainement pas au seul fait religieux mais à des enjeux autrement plus existentiels. Des enjeux de civilisation loin de viser à bassement faire des ‘calculs’ pour seulement sauvegarder un régime ou un pouvoir.

    Brahms
    12 mars 2023 - 20 h 50 min

    Mettez une Arabie Saoudite toute seule face aux pays catholiques, elle serait vite vilipendée et détruite

    En effet, plus vous cassez de pays musulmans dans le monde, plus vous les rendez faibles.

    Regardez l’Union européenne qui a fait une force de 28 pays à la fois, une libre circulation entre eux, une monnaie unique donc une force de frappe et si un pays musulman venait à faire quoique ce soit, il serait vite refroidi. La différence est donc là.

    Par contre, dans les pays musulmans, ils s’entretuent, ils se détestent entre sunnite, chiites et autres motifs.

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