Bouteflika va-t-il retourner son arme contre les hommes d’affaires qui l’ont fait réélire ?

Il est quasiment impossible de deviner les intentions de Bouteflika après sa réélection, tant toutes les analyses et toutes les hypothèses émises par les observateurs avertis de la scène politique nationale se sont avérées fausses. Mais ces «erreurs» de jugement ont le mérite de pousser les analystes à régler leur viseur pour mieux cerner les visées du Président physiquement démuni mais blindé par un aréopage de courtisans et de loyaux serviteurs. Dans sa déclaration d’hier, dont il a dû interrompre la lecture faute de force physique et de voix, Abdelaziz Bouteflika a de nouveau fait part de sa «volonté» de combattre «le crime économique et à sa tête le fléau de la corruption». Cette déclaration signifie-t-elle que le chef de l’Etat va retourner son arme contre les hommes d’affaires véreux et les responsables politiques impliqués dans des affaires de détournements qui ont dépensé sans compter pour lui assurer son maintien au pouvoir ? Car en parlant de corruption, les coupables, s’ils ne sont pas clairement désignés, sont néanmoins connus de l’opinion publique. Bouteflika va-t-il faire accélérer le traitement de l’affaire Sonatrach I et II dont son ancien homme de confiance Chakib Khelil est le principal acteur ? Va-t-il relancer le dossier de la Générale des concessions agricoles (GCA) qui a permis un enrichissement rapide et illicite du secrétaire général actuel du FLN, coopté de force pour écarter le «trop» ambitieux Abdelaziz Belkhadem ? Va-t-il rendre publiques les conclusions de l’enquête sur le scandale de l’autoroute Est-Ouest, «chef-d’œuvre» de l’anormalement enthousiaste Amar Ghoul ? Va-t-il débarrasser les circuits économiques des pratiques frauduleuses et ainsi moraliser le milieu des affaires en sanctionnant tous ceux qui ont fait de la malversation et de la vénalité une règle et de la probité une exception, voire une hérésie ? Comment Bouteflika pourrait-il honorer son contrat lorsqu’on sait que sa campagne électorale, opulente et théâtrale, n’a été rendue possible que grâce au financement généreux d’hommes d’affaires dont la réputation en tant qu’affairistes louches est loin d’être surfaite ? Bouteflika a-t-il utilisé ce magma d’intrigants pour pouvoir rempiler et mieux les contrecarrer car se sentant trahi par eux ? Autant de questions qui ne pourront trouver leur réponse que dans les décisions que prendra le Président dans les prochains jours. On saura, alors, si oui ou non Abdelaziz Bouteflika compte faire amende honorable envers ses électeurs qui ont longtemps cru à ses discours, mais qui dont les aspirations se sont fracassées contre la boulimie de l’argent facile et la soif du pouvoir éternel.
M. Aït Amara 

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