Rachat de Djezzy : «A ce prix-là, l’Algérie aurait pu acheter la moitié de VimpelCom»

La reprise par l’Etat algérien de la majorité de l’actionnariat de l’opérateur Orascom Telecom Algérie-Djezzy est-elle en train de virer à la plus grande arnaque du siècle pour l’Algérie ? Tout porte à le croire au vu du montant de la transaction et des transferts que le propriétaire de la société, l’opérateur russe VimpelCom en l’occurrence, s’apprêterait à rapatrier à partir de l’Algérie. En effet, selon des experts, si la transaction est signée entre les deux parties comme prévu avant la fin de l’année en cours, VimpelCom va pouvoir transférer en tout plus de 4 milliards de dollars. Un montant qui englobe les 2,643 milliards de dollars représentant les 51% des actions d'Orascom Telecom Algérie (OTA) repris, au nom de l’Etat algérien, par le Fonds national d'investissement (FNI), auquel s’ajoute 1,9 milliard de dollars d’OTA au titre des dividendes. Soit, comme indiqué plus haut, la somme colossale de 4 milliards de dollars en tout, déduction faite des impôts. Et lorsqu’on sait que la société mère dans sa globalité, c’est-à-dire VimpelCom, ne vaut en Bourse que 8,818 milliards de dollars, selon les données de Market Cap, on ne peut qu’être sidéré par le montant que l’Algérie s’apprête à débourser (4 milliards de dollars) pour racheter seulement 51% d’une filiale du géant russe. Par un simple calcul, le rachat par l’Algérie de 51% des actions de la filiale OTA lui coûtera la moitié du prix global du Groupe russe. C’est dire que l’Algérie avec un tel montant peut se permettre de racheter pratiquement la moitié de VimpelCom en entier, et pas seulement 51% d’une de ses filiales, fut-elle parmi les plus rentables. L’Algérie va donc payer cash 4 milliards de dollars pour racheter la moitié des actions de la filiale algérienne qui ne représente que 8% du chiffre d'affaires global de VimpelCom et 12% de son EBITDA. Et c’est là qu’apparaissent dans la nudité la plus totale la grande supercherie et, au-delà, l’incurie insondable des négociateurs algériens dans le dossier de reprise de Djezzy par l’Etat algérien. Les Russes et leurs associés peuvent donc se frotter les mains devant une telle aubaine, au moment où leur Groupe est en train de vaciller sous les graves accusations de corruption auxquelles il fait face aux Etats-Unis, en Hollande, en Suède, en Suisse et dans d’autres pays comme l’Ouzbékistan. Une situation qui a, d’ailleurs, amené le principal actionnaire du Groupe russe, en l’occurrence Telenor, à exprimer son intention de se débarrasser de ses parts (33%) et de ses droits de vote (43%) dans VimpelCom. Ce que dit, d’ailleurs, à ce sujet Maria Samir, analyste chez Beltone Financial, est intéressant à plus d’un titre et renseigne profondément sur cette supercherie du siècle. «Le prix de vente, qui implique une valorisation nette de 100% d'OTA à 5,182 milliards de dollars, est supérieur à nos attentes, qui tournaient autour de 3,9 milliards. GTH (ex-Orascom Telecom Holding, propriété de l’Egyptien Sawiris, ndlr) va pouvoir rembourser un prêt d'actionnaire accordé par VimpelCom, ce qui diminuera ses charges financières de près de 300 millions de dollars par an», indique l’analyste de Beltone Financial qui ajoute, pour la curée, que l’accord (avec l’Algérie) «devrait permettre au cours boursier de GTH de réaliser son plein potentiel». Et pour compléter le tableau, visiblement bien terni de l’Algérie, il faut savoir, contrairement à ce qui est avancé çà et là, que cette transaction ne réglera en rien les affaires en arbitrage international de l'Algérie dans ce dossier. Car, faut-il le préciser, il y a deux poursuites en arbitrage contre l'Algérie : une initiée par GTH (ex-OTH) et une autre initiée par Orascom TMT (ex-Weather), contrôlée par Sawiris. Certes, l’accord du 18 avril 2014 entre les deux parties prévoit l'arrêt, s’il y a conclusion de la transaction, de la poursuite de GTH, mais ce ne sera pas le cas pour celle d’Orascom TMT (contrôlée par Sawiris). C’est dire que même en payant le prix fort, l'Algérie continuera à être poursuivie en arbitrage. Et tout cela ne fait qu’ajouter de l’eau au moulin des nombreux experts algériens qui continuent à appeler les autorités algériennes à empêcher la signature de la transaction pour la reprise de Djezzy.
Amine Sadek
 

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