Un nouveau courant politique ?
Par Kamel Moulfi – En écho au slogan officiel des législatives du 4 mai, «Fais entendre ta voix», les Algériens ont fait entendre la leur de deux façons : en allant voter, comme le souhaitaient à la fois les autorités et les partis engagés dans cette compétition électorale, mais, surtout, en s’abstenant de le faire, en grande majorité, plus de 60%, selon les chiffres officiels. En plus, il est tentant d’interpréter comme une abstention déguisée, les bulletins nuls, puisque les électeurs concernés ont refusé de s’exprimer explicitement, ce qui accroît le poids du camp qui a choisi le silence pour faire connaître son opinion.
Le tapage médiatique centré sur l’impératif pratiquement dicté à l’Algérien de faire entendre sa voix va-t-il s’arrêter après la clôture des opérations de vote ou se poursuivra-t-il au-delà du 4 mai pour encourager les citoyens à donner leur avis sur la manière dont ils sont «administrés» à tous les niveaux ? Car en refusant de participer aux élections législatives, les abstentionnistes n’ont pas abandonné leur revendication d’être partie prenante de ce qui se décide dans le pays et qui les touche directement. L’intelligence et l’audace du personnel politique qui gouverne devraient conduire à prospecter avec les citoyens les nouvelles voies permettant d’associer les plus de 60% qui ne sont pas intéressés par cette voie parlementaire. Ils sont la grande majorité. Les chiffres montrent que les élus représentent très partiellement l’électorat et, par conséquent, l’Assemblée populaire nationale ne peut refléter la diversité d’opinions qui existent dans le pays.
L’abstention n’a pas porté atteinte à la stabilité du pays, comme le craignait le discours politique qui a dominé avant les élections. Elle a même contribué, incidemment, au statu quo, dans la mesure où aucun changement n’est intervenu dans la configuration de l’APN, c’est-à-dire une majorité FLN-RND et une opposition avec sa composition ancienne. L’abstention a empêché les partis islamistes de réaliser leurs prétentions démesurées. La vie politique à venir en Algérie devra tenir compte de ce courant de «l’abstention du 4 mai» dont il n’est pas exagéré de dire qu’il se caractérise par une certaine homogénéité au vu des motivations convergentes qui le justifient.
K. M.
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