Le jeu n’est pas fini
Par Kamel Moulfi – Les observateurs et analystes algériens de la scène politique ont eu beau le pressentir, le limogeage de Tebboune les a surpris et déroutés par sa soudaineté. Ils s’attendaient, peut-être, à une sortie plus en douceur, tout juste pour soigner les formes. Les plus crédules pensaient que «jamais» un Premier ministre ne pouvait être dégommé si peu de temps après sa nomination. Un record.
En Algérie, les échéances cruciales ont toujours joué pour le maintien du titulaire d’un tel poste et même d’un simple ministre. Mais dans ce cas, ni la proximité d’une rentrée sociale incertaine mais que Tebboune promettait calme ni la tenue des élections locales menacées d’une abstention massive, mais que la population, enfin remobilisée, n’aurait certainement pas boudées, n’ont été des facteurs suffisants pour accorder un sursis au Premier ministre.
Il faut croire qu’il y avait «le feu dans la maison» pour qu’une décision de cette importance soit prise dans la plus grande précipitation. Les Algériens, qui ont suivi les péripéties de ce que l’on a appelé le feuilleton de l’été, sont déçus : leur «acteur» préféré, Tebboune, qui avait la main, n’a pas eu le temps d’abattre sa carte. Ils s’attendaient à la fin de l’influence de l’argent sur la vie politique, ils assistent, au contraire, à la neutralisation de la volonté de moralisation qui allait dans ce sens.
Seule consolation : pour une fois, la recherche d’explication au limogeage d’un Premier ministre est superflue. Tout s’est déroulé dans une transparence presque totale grâce aux technologies de l’information qui permettent de suivre les événements en instantané. Les réseaux sociaux ont été, de toute évidence, plus proches de la vérité que les médias lourds.
La question qui se pose maintenant est de savoir ce que va faire le nouveau Premier ministre, Ahmed Ouyahia. Connu pour son intelligence indéniable autant que pour son ambition présidentielle et pour un opportunisme qui relève du réflexe quasi naturel, tiendra-t-il compte de l’«effet Tebboune» dans l’opinion publique algérienne ? Ceux, intéressés, qui ont pavoisé à l’annonce de sa nomination, ont-ils eu raison de le faire sans réfléchir ? Le jeu n’est pas fini. Ouyahia a la main.
K. M.
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