L’autre menace

violence fléau
La violence à tous les niveaux et dans tous les domaines a atteint un seuil alarmant.New Press

Par Sadek Sahraoui – Un fléau aussi dangereux et insidieux que le terrorisme et l’intégrisme islamiste menace le pays dans ses fondements depuis quelque temps déjà. Mais personne n’y prend garde, ni s’en préoccupe vraiment. Tout le monde l’aura compris, il s’agit bien évidemment de l’incivisme. Si l’on n’entreprend rien pour redresser la barre avant qu’il ne soit trop, nous risquons d’avoir une facture sociale très lourde à payer dans les toutes prochaines années car d’ici là la société se sera transformée en véritable jungle.

Telle une gangrène, l’incivisme paraît avoir déjà infecté des pans entiers de la société. A croire que la famille, l’école, le club de foot du coin, les mass-médias ou la mosquée ont complètement failli dans leur mission d’éducation, les gens se comportent aujourd’hui comme de véritables barbares. Il est à se demander d’ailleurs s’ils ont bien acquis un jour les notions les plus élémentaires du vivre-ensemble. Le constat n’est pas exagéré. Il est d’ailleurs vérifiable tous les jours et partout.

Presque plus aucune règle de vie en société n’est respectée. Sacs-poubelles jetés du balcon, tapage nocturne, non-respect du passage piéton, harcèlement de femmes en pleine rue, agressivité injustifiée, dégradation du mobilier urbain, vulgarité, manque de politesse, saleté, etc., la vie dans la plupart des villes du pays est carrément devenue impossible. Ces comportements piteux et navrants causent un tort incommensurable à l’image du pays.

Et c’est quand on vient de l’extérieur qu’on se rend vraiment compte de la gravité du problème. Les étrangers qui viennent d’ailleurs ici pour la première fois, autant ils se disent séduits par la beauté des paysages et la chaleur des gens mais autant aussi ils repartent effarés et choqués par l’ampleur du phénomène. Il faudrait sans doute une armée de sociologues et de psychologues pour comprendre comment nous en sommes arrivés là. Quoi qu’il en soit, qu’on ne tente pas de justifier cette chute aux enfers par un manque de moyens. Bien que déshérités, certains pays du continent peuvent, de ce point de vue-là, nous damer aisément le pion et nous donner des leçons.

Mais au-delà du constat, ce qui est plus inquiétant encore, c’est que personne ne semble voir ce qui se passe. Personne ne daigne encore tirer la sonnette d’alarme et inviter à ouvrir en urgence un débat sur la question. Si les gens en viennent à se complaire dans cette situation ubuesque, cela pourrait vouloir dire que l’incivisme et les insultes sont devenus la norme. Pis encore, cela pourrait signifier que nous sommes en pleine faillite morale. Et si c’était vraiment le cas ?

S. S.

Comment (11)

    MELLO
    19 avril 2018 - 19 h 14 min

    Situer la responsabilité d’une telle décadence , c’est éviter de parler de la réalité sociale telle que configurée depuis un certain Octobre 1988. Le 4 octobre 1988, en signe de protestation contre les nouvelles hausses de prix, les foules de manifestants ont pris Alger. Après trente ans de règne sans partage, le régime du parti unique soutenu par les militaires, est ébranlé par les mouvements sociaux de 1988.
    Les jeunes chômeurs pauvres ont saccagé les magasins, détruit les voitures, pillé les bureaux.
    Les chars sont sortis dans les rues – 500 manifestants ont été tués pendant le massacre. Le pays plongeait dans la chute, seule la démocratie pourrait le sauver. Mais quelle démocratie ? Son visage a été voilé et ses effets sont désastreux. Aujourd’hui, 2018, nous pouvons dire que la guerre civile en Algérie (1992-2000) annonçait, d’une certaine manière, la création de l’État islamique. La terreur basée sur la religion était un élément constant. Le plus horrible fut tout ce MASSACRE , d’abord des civils puis des consciences. Le 26 septembre 1992 à l’aéroport d’Alger, effet médiatique sans précédant,une bombe a tué neuf personnes ; un an, plus tard, sont assassinés Tahar Djaout, un écrivain qui luttait contre l’obscurantisme religieux et Youcef Fathallah, le président de la Ligue algérienne des droits de l’homme. Jusqu’à ce président du HCE, Mohammed Boudiaf (Allah Irrahmou) qui fut tué. Plus de Cinq cents écoles ont sautées. Des programmes scolaires obnubilant qui décrètent le savoir HARAM. Les Islamistes tuent politiciens, enseignants, journalistes, avocats, artistes, familles soldats, membres du clergé, étrangers, filles sans hijab. Dans certains villages, les islamistes du GIA ont assassiné trois mille personnes. Ils ont kidnappé les jeunes filles et les ont violées . Des enfants sont nés sous X, c’est ce  » cancer » qui se métastase. Le conflit a éclaté pendant la crise du pétrole (le pétrole et le gaz sont les seules ressources naturelles exportées d’Algérie. En l’absence de devises pour acheter les composants occidentaux, l’industrie lourde s’est écroulée. Les usines ont été désertées. Les villes se sont remplies de chômeurs. Dans les magasins, on manquait de lait, de matières grasses, de sucre, et dans les maisons – de lumière et d’eau. Aujourd’hui, encore, le Nord, que nous vénérons, regarde le Sud avec mépris. On nous méprise, on est malade , une maladie pire que la peste: considérés comme des égorgeurs , des violeurs , nous vivons un déséquilibre total, un échec. Le journal « Le Monde » du 31-12-91 écrivait: « Sur une population largement analphabète, profondément croyante et ignorante des jeux politiciens, le discours simpliste et réducteur du FIS a fait mouche. Logique imparable » Voter pour le FIS, c’est voter pour Dieu. Voter contre le FIS, c’est voter contre L’Islam. L’islamisme implanté par la volonté du FLN dans les écoles et les universités et dans le réseau très développé des mosquées draine déjà une partie du mécontentement des masses au nom d’un islam purificateur. L’arabisation, ce marasme, touchera les universités de droit, littérature, sciences humaines où les cours seront donnés en arabe, la mixité des amphis et des classes supprimée, au nom de cet islam. En médecine et dans les sciences exactes, la pénurie de professeurs arabes fera que les cours sont dispensés en français . Cet enseignement malmené a souvent abouti à former des « analphabètes bilingues » ne maîtrisant ni l’arabe ni le français.
    Au jour d’aujourd’hui,, les richesses qui proviennent essentiellement du pétrole et du gaz ne profitent qu’à une petite minorité qui ne les réinvestit pas dans le développement du pays et jouit de tous les biens de consommation européens. D’un autre côté, on voit s’appauvrir de jour en jour la grande partie de la population algérienne que la VIOLENCE a touché de plein fouet. Désormais la violence qui secoue l’Algérie n’est rien d’autre qu’un terrorisme exercé contre le prolétariat des villes et des campagnes, que seule une refonte politique et une prise en charge réelle de la promotion sociale peuvent mettre fin à ce marasme.

      Anonyme
      22 avril 2018 - 0 h 47 min

      Bien dit mello,t’as tout explique’,bravo. Et c pas fini car ya trop d’injustice sociale surtout. L’algérien qui pouvait d’acheter quand même un plat de sardines ne le pourra plus….et ça fait des frustrations…

        MELLO
        22 avril 2018 - 9 h 18 min

        La frustration, voilà justement le mal qui est en chacun de nous. C’ est un sentiment d’impuissance, une réponse émotionnelle qui surgit lorsque certains désirs et expectatives ne peuvent s’accomplir. En l’état actuel, maints désirs, des Algériens, ne sont pas concrétisés. Le fait de ne pas réussir à résoudre les sentiments de frustration peut provoquer de la démotivation et l’abandon de tout objectif et projet sur tous les plans de notre vie. De là, nous développons toutes sortes de mécanismes pour composer avec les frustrations : la bouderie, la colère, la manipulation, l’agressivité, la fuite, l’affrontement, l’affirmation et c’est le début du terrain de la violence. C’est ainsi qu’  » Une frustration encourue au cours de longues années engendre la révolte et la soif de liberté.”

    AB
    19 avril 2018 - 17 h 23 min

    Salam c est vrai le comportement des algériens en matière de propreté et alarmant surtout vis a vis de la nature , c est honteux pour nos enfants , qui ont l Algérie au cœur a ceux qui partent en vacances comme les miens ils sont très déçu ,mais ce qui est formidable ils continuent a aimer cette Algérie ,j espère que les autorités prendront une initiative avec l aide de vous les journalistes que personnellement j apprécie .salam

    Anonyme
    19 avril 2018 - 17 h 21 min

    Il faut que la police gendarmerie soit bien payés et ensuite terrorisé nos petits voyoux jusqu’au plus gros et enfin on aura le mérite d’être sans pitié pour ce fléau

    Felfel Har
    19 avril 2018 - 16 h 39 min

    Pour ma part, je renverrai dos à dos autant les pouvoirs publics que les citoyens, car les uns et les autres sont responsables de ce qui arrive. Par leur manque de sanctions des actes inciviques, par leur insensibilité aux dérives vécues et observées dans la vie quotidienne, par leur absence de pédagogie dans les écoles, les lycées, et à cause de leur comportement éhonté (impunité, usage de la force et d’un langage vulgaire, passe-droits, népotisme, corruption, etc.) les pouvoirs publics contribuent à promouvoir l’anarchie dans les espaces communs. Les citoyens, pour leur part, sont aussi à blâmer, car rien ne justifie leurs comportements anti-sociaux: rejets des ordures en plein air alors que des poubelles collectives sont présentes à proximité de leur résidence, crachats, …, agressivité envers leurs concitoyens avec force insultes, injures et propos impolis et menaçants, manque de respect à l’égard des femmes, des personnes âgées, destruction des biens publics. Et si quelqu’un s’interposait et conseillait une plus grande considération, il/elle se verrait reprocher: « Wach dakhlek? Melkeck? Dirli procès! » Les choses s’amélioreraient si les uns et les autres s’arrangeaient à respecter un code de bonne conduite dans la société pour instaurer un vivre-ensemble harmonieux. Nos enseignants doivent donner des leçons de civisme à nos enfants il appartient aux parents de les renforcer à la maison, et nos responsables de corriger leurs mauvaises habitudes car ce sont pas de super-citoyens outrepassant la loi, faute de quoi ils sont sanctionnés par leur hiérarchie, ce qui enverra un puissant message à la population: tout acte asocial est par essence antisocial, donc susceptible d’être sanctionné comme toute autre action de nature à troubler l’ordre public et l’harmonie de la société. Il faut être deux pour danser le tango!

    Abou Stroff
    19 avril 2018 - 7 h 59 min

    l’anomie qui caractérise la société algérienne indique que nous traversons une période de transition entre un MONDE ANCIEN (qui repose sur la distribution de la rente et sur la prédation) qui ne veut pas mourir et que certains désignent par le monde « authentique » au sein duquel nous devons continuer à barboter et un MONDE NOUVEAU (le monde qui reflète des rapports sociaux basés sur le travail) qui ne parvient pas à naître parce que nos « leaders » du moment appartiennent quasiment, sans exception, au monde ancien et défendent les valeurs de ce dernier, valeurs qui leur permettent de garder le pouvoir et de jouer aux démiurges.
    en d’autres termes, l’incivisme que mentionne l’auteur n’est que le télescopage de valeurs appartenant à des mondes antinomiques. ainsi, l’algérien du moment n’a plus de références ou plus précisément a trop de référence, ne sait plus à quel derviche tourneur se vouer et se complait dans la paraître pour cacher l’être foncièrement minable qu’il est devenu. .
    moralité de l’histoire: » l’incivisme » continuera à dominer la société algérienne tant que les porteurs d’un projet social aux antipodes du système basé sur la distribution de la rente et sur la prédation n’auront pas pris le pouvoir et imposé des valeurs basées sur le travail en tant que noeud gordien autour duquel graviteront toutes les autres valeurs.
    PS: reconnaissons que nos « leaders » sont d’une indigence manifeste. or, les individus lambda prennent, nécessairement, pour référence les leaders du moment. si ces derniers arborent et reproduisent des comportements et des « valeurs » aux antipodes des valeurs que requièrent le « vivre ensemble », alors la société se dirige droit vers un suicide collectif.

    MON OPINION A MOI
    19 avril 2018 - 7 h 58 min

    SALAM! Ok pour l’education de la famille mais le principal résponsable c’est l’état qui est absent et qui laisse l’anarchie se développer dans tout les compartiments, je le dis tout le temps il y a beaucoup trop de libèrté en ALGERIE sans doute voulu volontairement par le pouvoir ,en europe en France par éxemple tout le monde a peur de l’état, moi le premier!!! faut serrer taper la ou ça fait mal ,mais il faut être sans reproche aussi voila le problème!!!

    PREDATOR
    19 avril 2018 - 5 h 45 min

    C’est le cas nous sommes bel et bien en faillite morale depuis que nous avions copié des modes de vie étrangers à nos us et coutumes, l’avènement des antennes paraboliques et d’internet ont largement contribué à cette chute en enfer

    Anonyme
    19 avril 2018 - 4 h 29 min

    Les responsables de ce marasme sont dans l’ordre: la famille, l’ECOLE, l’indifférence et accessoirement la mosquée dont les imams sont loin et même très loin du minimum de leur devoir. La famille ne joue pas son rôle en déversant sa progéniture dans la rue pourvu qu’elle la laisse tranquille avec ses feuilletons à télè. L’école qui au lieu d’enseigner aux élèves une leçon de morale chaque matin comme ce fût le cas dans notre jeunesse à partir du cp2, les formes à devenir des crocs-morts. Et le plus grand des dangers est la différence affichée par le voisin ou l’ainé qui détourne son regard au lieu d’intervenir et rappeler à l’ordre le fauteur de trouble, l’incivique ou pour être plus cru, le petit garnement qui au fil des années deviendra le petit voyou parquineur, cracheur, et autre « miséreur » dans a société qui part à vaux l’eau.

    Selecto
    19 avril 2018 - 4 h 21 min

    Les hommes et les femmes politiques chez nous sont des délinquants et délinquantes en puissance et certains citoyens les prennent comme exemple.

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