Colère passagère
Par Nasser Chali – Un vieux de mon village me dit un jour qu’il est content de voir des gens riches. Je le dévisage. Il s’empresse alors d’ajouter que si un riche ne t’aide pas, ses problèmes ne t’atteindront pas. Moralité de l’affaire : si ton voisin est pauvre, il ne faut pas en rire car ses problèmes t’atteindront, c’est une question de temps ! Le vieil analphabète de mon village est plus intelligent que ce ministre. Il identifie en riant son pays au «sud de l’Italie», donc il efface de la carte le pays qu’il représente et dit du mal des pays voisins dans une réunion de travail à l’étranger.
Il ignore les rudiments de sa profession. Un politicien est sous surveillance microscopique. Ses faits et gestes sont minutieusement interprétés et passent en permanence sous les fourches de la presse et, surtout, des réseaux sociaux. J’espère que ce fonctionnaire sera convoqué par son Premier ministre.
Je ne suis pas d’accord de relier ce dérapage au sort de 12 millions de Tunisiens. Je ne vois pas du tout comment ce faux pas peut porter atteinte aux relations de 52 millions d’habitants. C’est une manière de donner de l’importance à ce fonctionnaire. Les Tunisiens et les Algériens sont presque un même pays, et l’Histoire, depuis des millénaires, est là pour en témoigner. Quand j’avais vu à la télé, il y a quelques jours, que les Tunisiens peuvent travailler en Algérie sans autorisation officielle, j’étais très content. Je me suis dit que la construction de Grand Maghreb a commencé. Il était grand temps ! Et voilà qu’un ministre qui voulait trop plaire nous ramène en arrière ! Je n’avais pas acheté de boîte de harissa de Tunisie en faisant mes achats hier. Mais je me suis ressaisi. J’en achèterai la semaine prochaine. Notre colère est juste mais un peu excessive. L’orage est passé.
Mais combien de temps passerons-nous à envoyer nos touristes par millions à l’extérieur du pays ? Il faut créer notre propre industrie touristique pour développer en premier lieu le tourisme local pour passer ensuite à l’international. C’est le pétrole de demain. La corniche jijelienne est la plus belle du monde, les gorges de la Chiffa sont féeriques. Le sable de Zéralda et de Moretti à Alger est en or. Béjaïa a déjà une expérience touristique qu’il faut renforcer. Les couchers de soleil dans le désert sont paradisiaques.
Alors, chers concitoyens, au lieu de se plaindre que tel ou tel ne nous aime pas, il faut d’abord être fiers de nous-mêmes pour commencer à se rassembler et se tourner vers nos potentialités intérieures.
C’est ça l’essentiel et non les pérégrinations d’un ministre qui tire un trait sur son pays pour l’identifier au sud d’un autre pays. Et tout ça en riant.
Rappelez-vous les pères fondateurs de notre nation. Ils ont réussi le pari fou de mener une guerre de libération tout en étant en bons termes avec nos frères et voisins. Inspirons-nous-en !
N. C.
Enseignant, Toronto
Comment (13)